*{ Réforme Robillard. Des collèges pour le Québec du XXIe siècle. 1993 } Présentation. Ce document expose l'esprit, les visées et les cibles stratégiques du renouveau que le gouvernement du Québec propose aux personnels des collèges, aux jeunes et à l'ensemble de la population du Québec. Il explicite les perspectives qui inspirent deux projets de loi actuellement soumis à l'Assemblée nationale, de même que le projet de règlement sur le Régime des études collégiales qui paraîtra sous peu dans la Gazette officielle. Dans ses orientations comme dans les mesures qu'il met de l'avant, le renouveau proposé découle directement des diagnostics, des problématiques et des stratégies qui ont été abondamment discutés lors des six semaines de travaux de la Commission parlementaire de l'éducation sur l'avenir de l'enseignement collégial québécois, en novembre et décembre 1992. Il endosse les consensus clairs, privilégie parfois certains moyens parmi les éventails mis de l'avant, fait aussi des choix lorsque les approches s'opposent. Dans tous les cas, le Gouvernement a été guidé par la ferme volonté de donner suite à la demande, plus manifeste et partagée que jamais, d'un renouvellement en profondeur de l'enseignement collégial. Comme les collèges eux-mêmes, il a bien pris acte de cet appui nuancé exprimé en faveur du collège québécois: oui à son maintien, mais à condition que des changements significatifs y soient opérés. C'est à un chantier de plusieurs années que sont ici conviés tous les acteurs qui interviennent en enseignement collégial. La tâche est considérable: nous assurer des collèges pour le Québec du XXIe siècle. Cette tâche touche le coeur même du projet de formation, son calibre, sa qualité, sa crédibilité, sa reconnaissance; elle interroge dès lors les pratiques quotidiennes, et parmi les plus ancrées. Elle fait aussi appel à ce qu'il y a de meilleur dans les compétences et les engagements professionnels de celles et ceux qui y oeuvrent, plusieurs même depuis les débuts. Le renouveau du collège québécois constitue un élément particulièrement moteur de l'ensemble des entreprises convergentes de réalignement et de relance que le Québec devra réussir au cours de la prochaine décennie pour avoir sa place parmi les sociétés développées de demain. Émergence d'une société à valeur ajoutée et axée sur la connaissance et la créativité des individus, développement des compétences et des qualifications de la maind'oeuvre, développement technologique autour des grappes industrielles d'avenir, engagement des communautés régionales dans leur propre développement et dans les nouveaux circuits internationaux: aucune de ces entreprises qui ne trouve dans la formation des ressources humaines sa source et même sa condition de faisabilité. Quel que soit l'angle envisagé, le collège québécois constitue, plus que jamais et avec l'ensemble du système d'éducation, la « nouvelle frontière » de tous les projets de développement. ? l'intérieur d'un système d'éducation lui-même confronté à d'énormes défis nouveaux, le collège occupe une place particulièrement névralgique. En amont comme en aval, en effet, au secondaire et à l'université, il interpelle les partenaires tout autant qu'il en reçoit lui-même de pressants messages d'ajustement et de renouvellement. La démarche de la dernière année n'aura pas déçu à cet égard. Ainsi que cela ressort à l'évidence des pages qui suivent, c'est de multiples manières que le renouveau proposé s'articule à des actions déjà entreprises au secondaire et à l'université, parfois même de concert. Le présent énoncé comprend cinq chapitres, rédigés avec le souci explicite d'aller droit au but et avec le minimum de données et de références techniques. Le premier rappelle et situe l'action gouvernementale engagée en enseignement collégial et fait état de la démarche collective de réflexion qui a culminé lors de la commission parlementaire. Le deuxième chapitre expose pourquoi et avec quelles nouvelles insistances il convient d'actualiser la mission confiée au collège québécois: c'est l'occasion de brosser la vision du collège québécois qui sous-tend l'action gouvernementale. Disons d'emblée qu'on y voit grand pour le collège de demain. Le troisième chapitre, le plus long, présente, sous quatre rubriques correspondant aux axes stratégiques convergents retenus, l'ensemble des mesures du renouveau proposé, leur justification, leurs visées, leurs résultats escomptés: on y traite successivement de l'accès à la réussite, des programmes d'études, des responsabilités académiques et de l'évaluation, des partenariats. Le quatrième chapitre présente les principes d'action qui guideront la mise en oeuvre du renouveau, de même que son calendrier d'implantation. Enfin, un cinquième chapitre, très bref, esquisse à larges traits le contenu des principaux documents de référence du renouveau - essentiellement des projets de loi et de règlement. En somme: Quoi ? Pourquoi ? Comment ? Mais surtout, partout en toile de fond, pour qui ce renouveau ? La réponse est claire: pour les jeunes du Québec et pour toutes celles et tous ceux qui, comme eux, comptent sur les collèges pour acquérir des formations solides, pertinentes et pleinement crédibles, aptes à leur permettre à la fois de s'épanouir pleinement comme personnes libres et responsables et de réussir leur insertion sociale et professionnelle. Des rendez-vous qui ne doivent tout simplement pas être manqués. 1 L'enseignement collégial québécois: Un renouveau nécessaire et réclamé. Pourquoi un renouveau en enseignement collégial? La question mérite d'être posée de nouveau, même pour celles et ceux qui, depuis plus d'un an, se sont engagés à fond dans un effort de réflexion sur l'avenir de l'enseignement collégial. Essentiellement pour recamper l'origine, le contexte et l'esprit d'entreprise. Et pour la replacer ainsi dans ses justes perspectives. 1-1 Un réexamen nécessaire. Le réexamen de l'enseignement collégial québécois est apparu comme nécessaire, parce que, après 25 ans d'un régime remarquablement stable, il est normal qu'on veuille faire le point et identifier les ajustements qui s'imposent. Les principaux acteurs du réseau des collèges en avaient d'ailleurs eux-mêmes ainsi convenu et se préparaient à des célébrations d'anniversaire axées sur une réflexion de fond. Le Conseil des collèges, d'abord, qui procédait à une vaste consultation en vue de produire un rapport sur l'état et les besoins de l'enseignement collégial; la Fédération des cégeps, également, qui annonçait des activités et un colloque national visant un même type de célébration par la réflexion; l'ensemble des collèges et de nombreux organismes intéressés, enfin, qui, répondant à ces appels, avaient décidé de faire connaître leurs préoccupations et leurs perspectives. Parce que, dans le débat public émergeant autour de l'éducation et de la nécessité de faire du Québec une société à valeur ajoutée, les collèges occupent une place de choix. A la fois comme lieux par excellence de l'accès à un enseignement supérieur démocratisé et comme établissements assurant l'ensemble de la formation des techniciennes et des techniciens, les collèges sont de plus en plus clairement au coeur des enjeux de qualification que doit assumer le Québec dans un ordre mondial plus que jamais axé sur la connaissance et l'innovation technologique. Parce que, avec une insistance plus évidente depuis quelques années, des voix se sont fait entendre, s'interrogeant sur la qualité de la formation dispensée dans les collèges. En l'absence de pratiques communes d'évaluation, des perplexités et des doutes ont fait leur chemin dans l'opinion publique, qui a manifesté beaucoup d'intérêt pour toutes sortes d'évaluations et de classements, ceux-ci fussent-ils appuyés sur des méthodologies douteuses. Nourris par des chiffres inquiétants concernant les taux de diplomation, la durée des études et la fréquentation des programmes d'études techniques, ces doutes et ces perplexités étaient devenus assez persistants pour qu'on entreprît de les dissiper. Parce que, sous le couvert de l'allusion ou tout à fait ouvertement, et sans qu'il soit possible d'y tout réduire au préjugé, des interrogations sont régulièrement exprimées quant à l'opportunité même de maintenir les structures particulières de l'enseignement collégial québécois. Nostalgie inavouée ou volonté de ne pas manquer le train de la mondialisation, ces évocations méritaient d'être admises en discussion publique et examinées au mérite. Parce que, dans le système scolaire québécois, le collège occupe une position stratégique ouvrant particulièrement bien à des retombées en amont - au secondaire - et en aval - à l'universitaire. Dans le respect des objectifs propres à chaque ordre d'enseignement, sans subordination du secondaire et sans assujettissement à l'université, une action sur le collégial permet et entraîne nécessairement le réexamen d'autres composantes du système d'éducation, notamment des arrimages et des harmonisations qui s'imposent entre elles. Parce que, plus fondamentalement, le monde change; les besoins aussi. Conçus dans le sillage de la Révolution tranquille, les objectifs, les contenus et les pratiques de l'enseignement collégial québécois appellent des mises à jour - des confirmations, des ajustements, voire des correctifs. Aussi bien en regard de l'évolution de la société québécoise que de l'émergence d'un environnement mondial que tout désigne comme une profonde mutation de type structurel, il faut pouvoir compter sur des collèges aptes à répondre aux besoins de demain. En somme, on n'entreprend pas de rénover l'enseignement collégial parce que celui-ci irait mal, parce qu'il aurait failli à la tâche ou parce qu'on songerait à faire table rase et à repartir à zéro. Un renouveau est nécessaire parce qu'il y a d'importants rendez-vous d'avenir à ne pas manquer et parce que la santé d'une société est aussi faite de sa capacité de s'évaluer pour s'améliorer, d'ajuster ses trajectoires et d'actualiser ses objectifs. Dire ainsi pourquoi un tel renouveau est nécessaire, c'est dire aussi pour qui on le juge nécessaire: à n'en pas douter, c'est pour les jeunes du Québec et pour toutes celles et tous ceux qui, comme eux, ont besoin de trouver au collège une formation dont le calibre et la qualité les placent en bonne position face aux défis de demain. 1-2 Un renouveau souhaité et attendu. C'est dans le contexte décrit plus haut que, à l'occasion du 25e anniversaire de la définition de l'enseignement collégial québécois et de la création des premiers cégeps, le gouvernement a demandé que la Commission parlementaire de l'éducation tienne une consultation générale sur l'avenir de l'enseignement collégial québécois. Il s'agissait d'instituer ainsi un large débat public sur l'ensemble des questions soulevées à propos de l'enseignement collégial, y compris sur l'opportunité même de le maintenir dans sa structure actuelle. Ce faisant, le gouvernement entendait créer un vaste forum où puissent être traitées les questions touchant à la fois les besoins nouveaux de formation supérieure et les critiques, explicites ou diffuses, dont fait l'objet l'enseignement collégial québécois. Le gouvernement a voulu une discussion ouverte et libre, la moins polarisée possible par la confirmation ou le rejet d'une position gouvernementale préalablement exprimée. C'est pour cela qu'il s'est limité à définir, dans le libellé du mandat confié à la Commission parlementaire, les grandes balises du débat. De concert avec les organismes concernés, il a cependant établi le calendrier de ses travaux de manière à mettre à profit les avis de trois conseils consultatifs: l'avis sur l'enseignement collégial de demain préparé par le Conseil des collèges et rendu public en mai 1992; l'avis sur les objectifs et la structure de l'enseignement supérieur québécois, préparé par le Conseil supérieur de l'éducation à la demande de la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science et rendu public en octobre 1992; l'avis sur les jeunes et l'enseignement collégial, préparé par le Conseil permanent de la jeunesse à la demande du Premier Ministre et rendu public en novembre 1992. Deux cent dix-neuf (219) mémoires ont été soumis à la Commission parlementaire de l'éducation, qui a siégé du 4 novembre au 18 décembre 1992, tenant 105 heures d'audiences et accueillant 109 groupes et organismes. Abondamment couverte par les médias, la Commission a manifestement suscité beaucoup d'intérêt, donnant ainsi poids et visibilité aux importantes démarches de préparation qui avaient été menées dans de nombreux milieux et dans toutes les régions du Québec. Les observateurs ont été pratiquement unanimes à souligner le sérieux, le niveau et la qualité des discussions conduites en commission parlementaire; la convergence des interrogations, des attentes et des perspectives d'action, aussi. Le nombre et la diversité des témoins entendus (directions des collèges, milieux de l'éducation, jeunes, associations étudiantes, personnel enseignant, universités, commissions scolaires, entreprises, syndicats, groupes socio-économiques, municipalités, associations professionnelles, etc), de même que la composition des délégations, témoignent éloquemment des très grandes attentes de ce qu'on peut appeler le «Québec profond» vis-à-vis de tout ce qui concerne l'enseignement collégial. Sur la plupart des grandes questions traitées, les parlementaires et les observateurs ont été à même de constater la nette convergence des positions présentées et débattues. C'est donc à bon droit que l'on peut parler de véritables consensus exprimés au cours de la Commission parlementaire. Gouvernement et Opposition ont d'ailleurs été conduits à conclure en faisant état d'une lecture pratiquement identique des messages entendus. Essentiellement et, dans certains cas, très massivement, on a recommandé: de refaire le choix du collège québécois - un message clair et fort, venu de tous les milieux et souvent accompagné de mises en garde contre de coûteuses et distrayantes refontes de structures -, mais en y opérant certains redressements majeurs de trajectoire, dont plusieurs tiennent dans les messages suivants; de renforcer les fonctions d'orientation et d'encadrement des élèves: déjà au secondaire assurément, mais aussi au collégial, notamment à la faveur de pratiques d'accueil et d'intégration davantage adaptées aux besoins de présence, de soutien et d'appartenance de nombreux élèves fraîchement issus du secondaire; de réactualiser et de renforcer la formation générale commune: précision des objectifs communs, renforcement de la maîtrise de la langue maternelle, ouverture aux langues secondes et autres, enrichissement du «fonds culturel» commun, meilleure intégration aux programmes, nombreuses interrogations sur les objectifs et la place relative de la philosophie et de l'éducation physique; de rénover en profondeur la formation préuniversitaire, en y établissant des programmes aux objectifs plus nettement définis, en l'axant sur une formation large et polyvalente plus nettement conçue comme la première étape d'une formation de cinq ans, en rendant comparable le poids accordé aux divers programmes; de valoriser, développer et adapter la formation technique, en en faisant une promotion plus vigoureuse, en y accroissant la capacité d'accueil, notamment dans les secteurs porteurs d'avenir, en y adaptant mieux les objectifs de formation générale, en rendant possible l'accès modulé au diplôme, en accroissant les possibilités de stages en entreprises et de formation en alternance, en accélérant les processus de révision des programmes, en rationalisant la répartition des programmes, en renforçant l'action des centres spécialisés, en s'engageant dans des partenariats plus serrés avec le monde du travail; de revoir le partage des responsabilités académiques entre le Ministère et les collèges, essentiellement pour renforcer le rôle du Ministère en matière d'objectifs et de standards de programmes et pour accroître l'autonomie des collèges dans le choix des moyens et dans l'aménagement de l'approche programme; d'instaurer un dispositif d'évaluation plus rigoureux et plus crédible, notamment en créant un organisme externe d'évaluation, contre partie normale d'une autonomie accrue des établissements - on notera que l'évaluation figure parmi les thèmes les plus abondamment abordés dans les mémoires; de mettre l'accent sur les compétences pédagogiques et la fonction d'enseignement, notamment en ce qui a trait aux compétences pédagogiques exigées lors de l'embauche, à l'évaluation des personnels, de même qu'au perfectionnement et au ressourcement professionnels; d'assurer les jonctions entre les ordres d'enseignement, en précisant le seuil d'admissibilité au collège, en poursuivant l'élagage des préalables imposés à l'admission dans certains programmes, en assurant l'harmonisation des programmes d'études professionnelles du secondaire et des programmes d'études techniques du collégial, en procédant à la rationalisation de la carte des enseignements professionnels et techniques, en marquant mieux la continuité collège-université en formation préuniversitaire et en améliorant les modalités de passage à l'université des diplômés du secteur technique; d'affermir le leadership éducatif en éducation permanente et en formation des adultes et de poursuivre ainsi la scolarisation et la hausse des qualifications de la main-d'oeuvre québécoise, en mettant l'accent sur la maîtrise des compétences générales transférables et en assurant un financement adéquat de l'offre de formation à temps partiel; d'assurer le financement public de l'enseignement collégial, en maintenant le régime actuel de gratuité, quitte à en baliser l'application, et en incitant les entreprises à participer au financement de certaines activités des collèges, notamment en matière de stages, de services et d'équipements; d'adapter le cadre de fonctionnement des collèges aux impératifs du renouveau attendu, en précisant et en mettant à jour certaines dispositions de la loi actuelle, notamment sur la mission des collèges et sur la composition du conseil d'administration. Des nuances et des différences d'accent se sont exprimées sur certains de ces éléments, mais l'ensemble constitue une base de consensus et d'appui social qui justifie une action gouvernementale que de très nombreux intervenants, y compris les collèges eux-mêmes, souhaitent résolue et prochaine. Nécessaire pour les motifs exposés, un renouveau de l'enseignement collégial est donc aussi souhaité et attendu, et selon des lignes de fond que l'on peut qualifier de consensuelles. 2 Le collège québécois: Une mission et des objectifs confirmés et mis à jour. L'ensemble des actions et des mesures de renouveau proposées trouvent leur sens et leur cohérence dans une certaine idée de l'enseignement collégial québécois, de son environnement national et international, des besoins de la société québécoise qu'il doit satisfaire, de la mission propre de ce type d'établissement. Cette perspective d'ensemble comporte essentiellement les éléments suivants, proposés ici comme éléments fondamentaux d'une vision de l'avenir de l'enseignement collégial québécois. 2-1 Un choix gouvernemental et social toujours valable. Avec une convergence et une insistance particulièrement fortes, c'est l'ensemble des intervenants de tous les milieux qui ont tranché avec netteté cette question quasi préalable: et dans sa structure et dans ses visées essentielles, l'enseignement collégial québécois doit faire l'objet d'un choix renouvelé. Il faut, a-t-on répété, mettre fin aux interrogations lancinantes et démobilisatrices sur l'avenir même du collège québécois. Il est raisonnable de refaire ce choix du collège québécois; Parce que le collège québécois a permis des réalisations et des acquis majeurs. Ainsi, depuis sa création, les taux d'accès à l'enseignement postsecondaire ont connu des progrès énormes: en un quart de siècle, ils sont passés de 16 % à plus de 60 %. L'espérance d'accès à l'enseignement collégial dit régulier avant l'âge de 30 ans, qui était encore de 38,9 % en 1980, atteignait 57,8 % en 1990. Les femmes, qui accédaient en minorité aux études postsecondaires, dépassent maintenant largement les hommes: leur espérance d'accès au collège avant l'âge de 30 ans est actuellement de 65,4 %, contre 50,5 % pour les hommes. Le collège a accueilli des étudiantes et des étudiants issus de groupes de niveaux socio-économiques variés et a apporté une contribution majeure au développement des régions du Québec: plus de 75 % des nouveaux inscrits au collégial ont, l'année précédente, étudié au secondaire dans la région du collège qu'ils fréquentent. Il a permis de hausser le niveau culturel et académique de la formation technique, que le Rapport Parent jugeait délaissée à cet égard. Il a stimulé le passage d'un ordre d'enseignement à un autre et, par là, favorisé la hausse générale des qualifications: en 1992, on a accueilli 70,2 % des élèves inscrits au Secondaire V général l'année précédente - un sommet historique; en 1990-1991, 85,9 % des détenteurs du DEC préuniversitaire et 19,4 % du DEC technique se sont inscrits à l'université. La mobilité entre la formation préuniversitaire et la formation technique s'est accrue: de nombreux changements de programme au collégial se font au profit de la formation technique. Voilà autant d'acquis qu'on doit savoir gré au collège québécois d'avoir permis de réaliser. Parce qu'il n'y a pas de modèle nord-américain unique qui exigerait d'emblée que le Québec s'y rallie. Le modèle québécois, dont bien des étrangers et des organismes internationaux vantent les mérites, est moins « original » qu'on le dit parfois et ne constitue qu'une variante parmi de très nombreuses autres pratiquées en Amérique du Nord, l'Ontario ayant elle-même un modèle original en Amérique du Nord. Il y a sans doute un modèle nord-américain assez répandu, qui comporte généralement une école de douze années et un «Undergraduate» de quatre ans. Mais son adoption exigerait quand même des «Junior Colleges» de deux ans, notamment dans les régions, avec cohabitation du général et du technique. Tout restructurer pour se retrouver avec les mêmes effectifs dans les mêmes bâtiments, mais sous des autorités différentes, constituerait un choix plutôt stérile. Parce que les coûts pédagogiques, académiques, humains et financiers d'un grand redécoupage institutionnel seraient injustifiés et excessifs. Temps, énergies, ressources: les analyses même sommaires de tous les scénarios envisageables montrent à l'évidence que l'aventure serait coûteuse. Parce que, de manière quasi unanime et à travers un éventail très large de groupes et d'organismes qui se sont exprimés à l'occasion de la Commission parlementaire, la population québécoise a clairement dit qu'elle y tenait et tout aussi clairement demandé qu'on fasse une réforme de fond et non de structures. Nous serions mal avisés de nous laisser distraire de l'essentiel, c'est-à-dire des objectifs et de la qualité de la formation. 2-2 Une mission et des objectifs toujours opportuns. Dans la foulée du Rapport Parent, le collège québécois s'est vu confier une mission de formation visant à préparer aussi bien aux études universitaires qu'à l'exercice de fonctions de travail de niveau technique. Il convient de confirmer cette mission de formation, une mission essentielle à laquelle concourent et dont dérivent toutes les activités connexes (recherche, transfert de technologie, développement régional, action internationale, etc) que les collèges ont été appelés à développer pour répondre aux besoins exprimés. Il convient de confirmer du même souffle la structure essentiellement polyvalente de l'enseignement collégial québécois, caractérisée par la cohabitation, autour d'un fonds culturel commun de formation générale, de deux grands types d'enseignement, le préuniversitaire et le technique. La capacité d'assurer l'accès le plus large possible à une formation générale commune de niveau élevé, même en formation technique où les milieux de l'entreprise la jugent plus nécessaire que jamais; la possibilité de permettre les passages d'un secteur à l'autre et de constituer une filière technique en meilleure continuité avec l'université; l'opportunité de maintenir le projet historique du Québec d'intégrer la formation professionnelle et technique dans la poursuite des objectifs de scolarisation de la population: ces visées militent d'emblée en faveur de la confirmation de ce choix de polyvalence institutionnelle. Accessibilité, démocratisation, scolarisation, hausse des qualifications techniques: c'est autour de ces axes que gravitaient les grands objectifs définis, il y a vingt-cinq ans, pour les collèges québécois. Toutes les analyses actuelles des besoins de la société québécoise convergent pour confirmer l'à-propos de ces objectifs. Il faut reconnaître que les objectifs d'accessibilité fixés par le Rapport Parent ont tous été atteints et dépassés, comme le Conseil supérieur de l'éducation l'a longuement démontré dans son rapport annuel 1987-1988, Le Rapport Parent, vingt-cinq ans après. Ainsi, alors que le Rapport Parent prévoyait une espérance d'accès de 45 % à l'enseignement collégial et de 20 % à l'université, ces taux sont plutôt respectivement de l'ordre de 60 % et de 30 %. Et l'on n'oubliera pas que, pour le secondaire, il prévoyait que 20 % des élèves ne fréquenteraient pas l'école au-delà de la 3e année. Cependant, dans le cas des collèges, la répartition entre le secteur technique et le secteur préuniversitaire ne s'est pas faite selon ce qui avait été prévu et souhaité par le Rapport Parent 60 % et 40 %, contre 70 % et 30 % au secondaire -, alors que, bien qu'en croissance, l'importance relative de l'effectif en formation technique est encore sous la barre des 50 %. Mais, globalement considérés, les taux d'accès au collège ont été significativement supérieurs aux prévisions. C'est que les besoins de scolarisation, au Québec comme ailleurs, se sont affirmés et accrus, en même temps que la demande sociale de formation postsecondaire a rejoint des groupes de population jusque-là peu touchés, dans des proportions et selon des modes de fréquentation dont on n'avait guère idée il y a trente ans. Pourtant, ce n'est toujours pas mission accomplie. En dépit de progrès considérables, l'accessibilité n'est toujours pas également acquise dans toutes les régions. Le collège n'est pas démocratisé au point que tous les groupes socio-économiques y soient également présents. Les taux de diplomation - pour les cohortes de la fin des années 80: 34 % en formation préuniversitaire après deux ans et 28 % en formation technique après trois ans, et avec d'importantes variations selon les programmes ne sont pas ce qu'ils devraient et pourraient être, même s'ils s'améliorent considérablement après quatre ou cinq ans. Pourtant, le Québec a, plus que jamais, besoin de techniciennes et de techniciens adéquatement formés dans l'ensemble des secteurs d'activité liés à son développement. Pour garder le cap sur le développement et la prospérité et pour ne pas être déclassé parmi les sociétés avancées comparables, il faut donc continuer l'entreprise de scolarisation et de hausse des qualifications professionnelles. Plus que jamais même, au moment où la connaissance devient au centre des atouts des gagnants de demain. ? la demande de la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, le Conseil supérieur de l'éducation s'est appliqué récemment à définir des objectifs réactualisés en matière de scolarisation. Pour le collégial, il propose les objectifs suivants: Le Conseil propose aussi certaines ventilations et certaines insistances: faire en sorte que la moitié (50 %) des étudiants et étudiantes accèdent au collège «pour devenir techniciens ou techniciennes et l'autre moitié, pour se préparer à des études universitaires» (p 83); prêter une attention spéciale aux retards de plus en plus accusés des hommes en matière d'accès et de diplomation (p. 84); viser un accès et une diplomation comparables d'une région à l'autre (p. 84); augmenter l'accès des femmes dans les secteurs de pointe où elles sont sous-représentées (p.84). Ces objectifs sont exigeants, très exigeants même, mais ils ne sont ni irréalistes ni déraisonnables. Les divers acteurs de l'enseignement collégial sont instamment invités à les placer en horizon à leur action des prochaines années. Le ralliement autour de tels objectifs ne peut qu'être bienfaisant et mobilisateur, même si les accroissements souhaités devaient exiger, comme cela est probable, plus de temps que ne le souhaite le Conseil. La détermination de ces objectifs quantitatifs est, en soi, une source d'inspiration pour le renouveau envisagé et c'est à ce titre qu'elle est proposée aux collèges et à celles et ceux qui y oeuvrent. 2-3 De nouveaux paramètres culturels, sociaux et économiques en émergence. Progressivement au cours des vingt-cinq dernières années et de plus en plus évidemment à l'approche du XXIe siècle, l'environnement dans lequel doit s'exercer la mission du collège est en profonde mutation. Certains traits de cette mutation sont déjà nettement campés, d'autres sont en voie de s'affirmer; tous délimitent un nouveau contexte, porteur de sollicitations et d'exigences dont on ne pouvait pas avoir une bonne idée il y a vingt-cinq ans. Tout renouveau de l'enseignement collégial qui se veut enraciné devra résolument les prendre en compte. Parmi ces nouveaux paramètres, on retiendra au moins les suivants. L'enseignement collégial québécois appartient à l'enseignement supérieur et, comme tel, en partage la mission avec l'université. Clairement confirmée par nos dispositifs juridiques et les structures de l'État, cette appartenance à l'enseignement post-obligatoire et postsecondaire entraîne, de soi, un certain registre d'exigences et de standards, comme aussi des modes de fonctionnement institutionnel et d'encadrement ministériel davantage fondés sur l'autonomie des établissements et sur leurs responsabilités académiques. ? l'instar de ce qui s'observe dans les systèmes d'enseignement supérieur des pays industrialisés avancés, le collège québécois est entré dans une ère de fréquentation de masse; les progrès encore souhaités pour la fréquentation du collège ne pourront même qu'accentuer le phénomène. Ce trait n'avait pas été vraiment prévu il y a vingt-cinq ans. Tout comme l'université, le collège doit donc affronter un double et crucial défi: accueillir et gérer la diversité croissante des populations étudiantes et de leurs profils personnels, sociaux et scolaires; honorer les incontournables exigences de la qualité, selon des approches où les formes connues de l'élitisme sont devenues impraticables. ? l'image des nouvelles pratiques privées et publiques, le collège québécois doit composer avec l'expansion de nouveaux modèles de fréquentation scolaire et d'organisation de la vie quotidienne des individus et des ménages. Ainsi que l'a abondamment illustré le Conseil supérieur de l'éducation, les populations étudiantes actuelles n'ont plus beaucoup de ressemblances avec les images de l'étudiant d'il y a trente ans. Travail rémunéré, habitation autonome, engagements personnels et sociaux parallèles, études à temps partiel: tout cela a un énorme impact sur l'aménagement quotidien du temps et des énergies et sur les rythmes de cheminement. C'est là un paramètre pédagogique de première importance. Plus rapidement et plus imperceptiblement que ne l'avaient prévu les maîtres à penser de l'éducation permanente, et en dépit de pratiques encore embryonnaires en matière de congé-éducation, le Québec et la plupart des sociétés avancées sont à l'heure de l'éducation permanente et de la formation continue, et le collège québécois est manifestement au coeur de ce processus. Le nombre d'« adultes » qui fréquentent le collège, souvent même incognito parmi les effectifs dits « réguliers », ne cesse de s'accroître. A telle enseigne que les distinctions entre « jeunes » et « adultes » semblent à court de critères et que la perception du collège comme lieu de formation des jeunes correspond de moins en moins à la réalité observable dans les couloirs et les salles de cours des établissements. S'organiser pour accueillir des nombres élevés de personnes en perfectionnement, en recyclage ou simplement de retour aux études constitue une tâche majeure et nouvelle à maints égards. Au Québec comme ailleurs, on observe un certain report des moments d'orientation personnelle et professionnelle, même en dépit de contraintes de système liées au choix relativement précoce des options et des programmes. Crise de l'emploi et de l'économie aidant, multiplicité des chemins offerts et hésitations sur les valeurs également, les individus semblent avoir besoin, pour « se brancher » et arrêter leurs choix, de plus de temps qu'il y a vingt-cinq ans. De sorte que, même en ayant décidé de s'inscrire dans tel ou tel domaine de formation, de nombreux jeunes diplômés du secondaire arrivent au collège, perplexes et indécis quant à leur orientation. En nette croissance au cours de la dernière décennie, ce phénomène exige du collège qu'il assume de plus lourdes fonctions d'orientation et de transition. Dans les faits et pour de très nombreux individus, le collège est ainsi devenu un lieu de maturation et d'orientation, à l'image de la vie professionnelle elle-même, qui ne s'accommode plus guère de carrières uniques et linéairement poursuivies. Phénomène lié à l'instauration d'économies concurrentielles à valeur ajoutée, on assiste à une véritable mondialisation des normes et à l'émergence de standards internationaux de compétence, en particulier dans le secteur des techniques. Ce mouvement, qui n'a rien à voir avec quelque uniformisation des programmes d'études ou des structures d'organisation scolaire, imposera de plus en plus au collège québécois de rendre ses diplômés aptes à soutenir des barèmes internationaux à la hausse. Il y a là un enjeu nouveau qui concerne notre capacité même de participer, en matière de compétences acquises, aux circuits internationaux qui comptent. ? l'heure où tout le monde parle de compétences professionnelles et de technologies de pointe, la formation générale de base n'a jamais été aussi en demande, et par les entreprises et l'industrie elles-mêmes. Plus que jamais, on pointe les compétences fondamentales et les connaissances transférables, voire la « compétence culturelle » et les attitudes personnelles, comme les compétences qui font ultimement la différence, dans la vie personnelle et sociale comme sur le marché du travail. Maîtrise de la langue d'usage, connaissance d'autres langues, rigueur de la pensée, ouverture à l'histoire et aux réalités culturelles, créativité, autonomie, sens des responsabilités, capacité de travailler en équipe, sens critique, conscience morale, etc: les milieux de l'entreprise s'allient actuellement aux milieux de l'éducation pour les rappeler avec insistance. Comme l'ensemble du système d'éducation, le collège québécois est plus que jamais appelé à être ce qu'il a toujours dû être: un lieu de culture, de connaissances fondatrices et de formation large et ouverte. Le collège québécois est là pour durer. Sa mission de formation est toujours opportune, comme aussi sa structure polyvalente et les grands objectifs d'accessibilité, de démocratisation, de scolarisation et de hausse des qualifications techniques définis il y a vingt-cinq ans. Mais c'est dans un environnement nouveau à maints égards que cette mission et ces objectifs doivent maintenant être poursuivis et réalisés. Le collège québécois doit clairement relever les défis de ce nouvel environnement. Ainsi, il doit: assumer les exigences de qualité et d'autonomie qui découlent de son appartenance à l'enseignement supérieur; ajuster ses stratégies de poursuite de la qualité dans un système à fréquentation de masse; diversifier et adapter ses pratiques pédagogiques pour rejoindre des populations aux modes de fréquentation et aux profils personnels de plus en plus variés; assouplir et adapter ses pratiques et ses modes d'organisation pour servir adéquatement et équitablement le nombre croissant de demandeurs de formation continue; intensifier sa présence et son appui à des populations étudiantes en quête d'orientation personnelle et professionnelle; se mesurer aux standards internationaux de compétence en émergence et viser à y être dans le peloton de tête; intensifier ses engagements pour l'accès de tous à un fonds culturel large et riche et à une formation axée sur les compétences transférables. C'est ce projet du collège québécois qui inspire le renouveau proposé. C'est aussi le projet de collège qui est proposé aux étudiantes et aux étudiants, jeunes et adultes, aux éducatrices et aux éducateurs, et à l'ensemble de la population du Québec. 3 Les cibles stratégiques. Du renouveau proposé. La visée de fond du renouveau proposé découle directement des consensus exprimés en Commission parlementaire et des impératifs liés au nouvel environnement de l'exercice de la mission du collège québécois, tels qu'on les a rappelés plus haut. Elle s'impose presque d'elle-même: Il s'agit, dans un contexte mondial de plus en plus compétitif, d'assurer aux jeunes et à l'ensemble de la population du Québec un enseignement collégial d'un calibre et d'une qualité qui leur permettent de se mesurer aux meilleurs standards de compétence. Il nous faut donc des collèges où il se donne des formations solides, adaptées et reconnues, vrais lieux de culture et d'apprentissage où s'acquièrent des compétences et des qualifications de niveau international. Les collèges québécois n'ont sans doute jamais visé à faire ou à être autre chose, mais les besoins en émergence les y invitent maintenant d'une manière plus pressante que jamais. Cette visée centrale, le renouveau proposé entend la poursuivre à travers un ensemble de mesures axées sur les quatre grandes cibles stratégiques suivantes: un nouveau défi d'accessibilité: la réussite des études; des programmes d'études cohérents, exigeants et adaptés aux besoins; des responsabilités académiques accrues pour les établissements et, corrélativement, un dispositif d'évaluation plus rigoureux; des partenariats renouvelés et resserrés. Les pages qui suivent décrivent, pour chacune de ces cibles stratégiques, les mesures de renouveau envisagées, de même que les motifs qui en sous-tendent le choix. 3-1 Un nouveau défi d'accessibilité: La réussite des études. La scolarisation de la population québécoise n'est ni complétée ni acquise. Et les collèges, qui ont été placés au coeur de cette vaste entreprise collective, n'ont pas fait le plein de l'effectif étudiant souhaitable, voire nécessaire aux besoins en émergence. L'accès au collège demeure donc un objectif à poursuivre. Mais, ainsi que nous le montre l'expérience du dernier quart de siècle, ce n'est pas le seul accès au collège qui est le véritable enjeu actuel de l'accessibilité. Ce n'est pas tout d'être admis au collège. Encore faut-il y persévérer et, surtout, y persévérer jusqu'à l'obtention du diplôme postulé et dans des délais raisonnables. Cette première cible stratégique du renouveau proposé concerne donc l'accessibilité dans sa dimension sans doute la plus engageante: l'accès à la réussite des études. Une stratégie éducative de la réussite comporte nécessairement plusieurs volets complémentaires, à l'image de la pluralité et de la complexité des facteurs mêmes de la réussite et de l'échec. L'une et l'autre, en effet, renvoient généralement à de multiples éléments d'environnement qui, sans jamais pouvoir se substituer à la décision individuelle de prendre ses études et sa vie en main, n'en sont pas moins particulièrement déterminants. Ainsi, il est d'observation courante et élémentaire que la différence entre la réussite et l'échec au collège peut tenir à des facteurs comme le calibre de la préparation scolaire antérieure, le progrès harmonieux dans des cheminements sans piétinements ni détours inutiles, la capacité de vivre des transitions harmonieuses entre les grandes étapes de la formation, les modes d'organisation et d'encadrement institutionnels, les pratiques pédagogiques dominantes, les ressources financières disponibles, l'incitation ambiante à faire de la réussite des études un enjeu de responsabilité personnelle et institutionnelle. Les mesures exposées ici recouvrent l'ensemble de ces facteurs déterminants de la réussite. Des seuils précisés pour l'admissibilité aux programmes conduisant au diplôme d'études collégiales (DEC). Pour réussir au collège - l'expérience le montre à l'évidence -, il faut y arriver correctement préparé. Les éducateurs sont unanimes là-dessus: entrer au collège avec des lacunes criantes de formation de base, avec un diplôme d'études secondaires obtenu par la peau des dents ou avec un contenu insuffisant dans les matières de base, c'est presque à coup sûr aller vers l'échec, et souvent dès la première session. Il faut éviter ces aventures vouées d'avance à l'impasse. Le Diplôme d'études secondaires (DES) - ou le Diplôme d'études professionnelles (DEP) - doit demeurer la condition générale et suffisante d'admission dans les programmes d'études conduisant à un Diplôme d'études collégiales (DEC). Mais le DES n'est pas une sanction univoque. Certains élèves l'obtiennent avec le nombre minimal d'unités (130); d'autres, avec 160 ou même 180 unités. Certains l'obtiennent avec un ensemble d'«options fortes»; d'autres, avec des contenus moins campés. Cela est normal. En raison de son homogénéité poussée, le curriculum québécois permet même des disparités moins grandes que celles qu'on peut observer dans la plupart des écoles secondaires nord-américaines. La question, maintes fois soulevée en commission parlementaire, est plutôt de savoir ce que doit comporter le DES obtenu pour justifier une admission au collège qui offre un minimum de garantie de réussite. Ajouter au nombre minimal d'unités sans en déterminer le contenu pourrait bien, en effet, ne rien changer à la substance des choses. Ce qui est proposé, c'est que le Régime des études collégiales précise dorénavant que le DES qui donne accès général au collège doit comporter la réussite de certains cours. Il s'agirait, en l'occurrence, des derniers cours obligatoires dans les matières de base: langue d'enseignement et langue seconde de 5e année, mathématique de 5e année ou un cours enrichi équivalent de 4e année, histoire et sciences physiques de 4e année. Ce sont là des cours que tous les élèves doivent suivre de toute façon et dont la réussite est d'ailleurs prévue aux règles de sanction définies par le Régime pédagogique du secondaire (art. 69). La précision envisagée est devenue nécessaire, d'une part, parce que ces règles de sanction ne sont pas encore toutes appliquées et que, d'autre part, d'importants programmes du collégial, dont celui de sciences humaines, ont été révisés sur la base de ces règles de sanction. La suppression de certains préalables, à l'université comme au collège, a également été relancée sur les mêmes bases. Ne pas procéder à cette précision obligerait à offrir au collégial des cours obligatoires du secondaire, ou bien à réintroduire des préalables supprimés, notamment en sciences humaines et dans bon nombre de programmes techniques, et cette fois - fait absolument inusité pour des cours obligatoires du secondaire. En somme, il s'agirait de consacrer cette règle de bon sens: pour être admis à un niveau d'études, il est normal d'avoir réussi l'essentiel obligatoire du niveau précédent. Avec un tel seuil d'admissibilité précisé, il deviendrait possible de poursuivre l'opération d'élagage des cours à option du secondaire exigés pour l'admission dans certains programmes d'études collégiales, une opération actuellement ralentie par le rythme d'implantation des règles de sanction des études secondaires. Des programmes continueraient bien d'exiger de tels préalables, parce que ceux-ci s'inscrivent dans des séquences d'apprentissage pédagogiquement justifiables. Mais les candidats qui ne les ont pas en main continueraient de pouvoir les prendre au collège en cours d'appoint ou de mise à niveau. Ces pratiques sont connues et encadrées par des règles claires, les mêmes pour tous. Pourvu qu'elles n'enferment pas les élèves dans des voies sans retour, elles n'ont rien de répréhensible, de nombreux systèmes d'éducation prévoyant ces modes d'articulation; elles comportent même des avantages en ce qu'elles permettent aux élèves de se frotter à certains apprentissages plus exigeants. Plus la solidité des contenus de base du DES sera assurée, cependant, plus on pourra réduire le nombre de ces préalables. Des études professionnelles du secondaire pleinement reconnues. Le cas des élèves qui détiennent un Diplôme d'études professionnelles (DEP) sans avoir obtenu un DES exigerait une gestion attentive et adaptée, comme cela est d'ailleurs déjà nécessaire. Les cours obligatoires du secondaire dorénavant identifiés comme donnant accès aux programmes conduisant au DEC correspondent à des apprentissages qui s'inscrivent dans des séquences évidentes, notamment en langues et en mathématique. De ce fait, ils ne sont pas des outils de sélection; ils assurent plutôt les candidats qu'ils pourront poursuivre leurs études avec des chances normales de succès. En revanche, cependant, les études professionnelles du secondaire peuvent aussi être l'occasion d'acquisitions significatives dans certains domaines de base. C'est pour cela, notamment, que le Régime des études collégiales maintiendrait le pouvoir général des établissements de juger, lors de l'admission, des formations équivalentes déjà acquises. A cet égard, l'équivalence n'est pas sans parenté avec le concept de ~ préalables fonctionnels » qui est pratiqué au secondaire. Dans les deux cas, en effet, il s'agit de reconnaître des capacités réelles, et non de brader des exigences jugées essentielles. Par-delà ces reconnaissances et ces équivalences « sur dossier » pratiquées par les établissements lors de l'admission, c'est une reconnaissance plus systémique - une ~ reconnaissance en bloc » - des études professionnelles du secondaire qui est envisagée, une nouvelle disposition du Régime des études collégiales permettant dorénavant d'identifier, à l'intérieur des programmes d'études techniques, des modules de formation. Et le premier des critères applicables serait d'y situer clairement les formations acquises au secondaire dans des domaines qui, au collégial, sont repris et intégrés dans des formations plus poussées et de niveau proprement technique. Ainsi en est-il, par exemple, en secrétariat et techniques de bureau, ou en agriculture. Une liste serait donc constituée, permettant de situer clairement les blocs de formation professionnelle du secondaire d'emblée reconnus au collégial comme étape déjà franchie vers l'obtention du DEC. La possibilité de progresser sans détours inutiles joue aussi en faveur de la réussite. Des règles également précisées pour l'admissibilité aux programmes d'établissement. Pour l'ensemble des programmes que les collèges sont autorisés à élaborer et à offrir en formation techniquedes programmes conduisant à une Attestation d'études collégiales (AEC) décernée par les collèges -, la règle générale actuelle continuerait de prévaloir: on devrait s'assurer que les candidats ont la préparation suffisante pour pouvoir profiter de la formation à laquelle ils s'inscrivent. Comme ces programmes d'établissement conduisant à une AEC prendraient également la relève des autres programmes actuels et de leurs sanctions - Certificat d'études collégiales (CEC) et Diplôme de perfectionnement de l'enseignement collégial (DPEC) -, il est proposé que la règle qui prévaut actuellement pour l'admission dans les programmes conduisant au CEC s'applique désormais à l'ensemble des programmes d'établissement conduisant à une AEC: avoir interrompu ses études pendant au moins deux sessions consécutives ou une année scolaire, ou être visé par une entente conclue entre le collège et un employeur ou par un programme gouvernemental, ou être déjà titulaire du Diplôme d'études collégiales. La raison qui, en 1984, avait présidé à l'imposition de ce type de règle vaut toujours: éviter que, dès la sortie du secondaire, des jeunes ne soient, de quelque façon, incités à privilégier des programmes courts et à contourner les exigences propres aux programmes conduisant à un DEC. L'entrée prématurée dans des programmes conçus pour le recyclage ou le perfectionnement n'est pas, pour des jeunes issus du secondaire, un placement pour la réussite à long terme. Une reconnaissance des acquis plus effective. Pour l'ensemble des candidates et des candidats, tout particulièrement pour les personnes revenant aux études ou en formation continue, la reconnaissance des acquis constitue un enjeu de première importance. Il n'y a même pas d'alternance travail-études vraiment harmonieuse sans elle. Le mode de soutien financier actuellement expérimenté dans les collèges serait maintenu. Joint aux nouvelles possibilités de reconnaissance offertes par des programmes dorénavant bâtis selon la méthode ~ par compétences », ce mode de financement plus réaliste devrait permettre d'accélérer les progrès enregistrés en cette matière, des progrès qui, par-delà les seuls impératifs de gestion, interpellent aussi radicalement les mentalités et les façons de faire. Une première session sous le signe de l'accueil et de l'intégration. Pour les jeunes arrivant du secondaire, l'entrée au collège marque généralement la découverte de pratiques substantiellement différentes d'organisation scolaire et d'encadrement pédagogique, parfois accompagnée d'une organisation personnelle de vie et d'habitation plus autonome. Pour un bon nombre, ce passage arrive à point nommé et correspond à une étape souhaitée dans l'exercice des responsabilités personnelles: au cours des années 80, près de la moitié des nouveaux inscrits au collégial ont réussi tous leurs cours au premier trimestre et plus des trois quarts n'en ont abandonné aucun, les étudiantes et les étudiants de 17 ans et moins faisant même ici mieux que leurs aînés. Pour d'autres, l'expérience est plus difficile, surtout pour celles et ceux qui sont mal fixés quant au choix de leur programme ou qui, à cause de leur dossier scolaire antérieur ou pour toutes sortes d'autres raisons, présentent des risques plus élevés d'échec ou de désistement: le taux de réussite au cours de la première session est souvent déterminant pour la réussite des autres sessions et pour la persévérance dans le programme choisi. Pour tous, cependant, il s'agit d'une transition importante, souvent délicate, dont la réussite commande largement la suite. Des collèges ont fort bien compris cet enjeu et ont appris à accorder un soin particulier à l'organisation de la première session, voire de la première année, des nouveaux arrivants. Présence plus intense auprès des étudiantes et des étudiants, agencement des cours offerts, formation de groupes plus stables, système d'entraide par les pairs, activités pédagogiques connexes, etc: des initiatives diversifiées ont été observées, particulièrement au cours des dernières années. Les collèges doivent être encouragés à poursuivre dans cette voie et même à y accentuer leurs efforts. Ils y sont d'ailleurs eux-mêmes résolus, puisque le mémoire présenté par la Fédération des cégeps à la Commission parlementaire contient une orientation explicite en ce sens: «Les collèges entendent poursuivre l'établissement de programmes de soutien à l'apprentissage et favoriser la réussite de leurs élèves, notamment en instaurant de nouvelles mesures liées à l'organisation scolaire, au cadre horaire et à l'étalement sur une année de certains cours de formation générale de première année.» C'est là un engagement sur lequel le renouveau proposé peut légitimement compter. Il est envisagé d'aller plus loin et d'assurer un soutien spécial à l'organisation de sessions d'accueil et d'intégration à l'intention des étudiantes et des étudiants qui en expriment le besoin ou à qui il serait indiqué de le conseiller. Des règles administratives et financières spécifiques seraient donc établies pour permettre aux collèges d'organiser la première session selon des modalités favorisant l'encadrement pédagogique et la présence auprès des étudiantes et des étudiants, y compris une aide accrue en matière d'orientation. Le contenu de ces sessions d'accueil serait fait essentiellement de cours obligatoires appartenant à l'ensemble des programmes, auxquels pourraient se greffer des activités axées sur l'orientation et, le cas échéant, certains cours de mise à niveau prévus par le régime des études. Les étudiantes et les étudiants n'y seraient pas encore inscrits dans un des programmes spécifiques du collège, mais il ne s'agirait pas pour autant d'une « propédeutique », puisque le cheminement réalisé serait intégrable dans tout programme auquel l'étudiante ou l'étudiant déciderait de s'inscrire au terme de la session. Des collèges ont déjà à leur actif certaines de ces pratiques visant à ménager les transitions. Il est proposé de les développer et de les étendre, et de les soutenir adéquatement; des ressources financières récurrentes seraient prévues à cette fin. Toutes les étudiantes et tous les étudiants n'ont pas d'emblée besoin d'un accueil ainsi encadré. Mais, pour un bon nombre, tout indique qu'il pourrait y avoir là le coup de pouce qui fasse la différence entre l'échec et la réussite. La promotion des pratiques institutionnelles axées sur la réussite. Ainsi que l'a rappelé le Conseil supérieur de l'éducation, il y a, dans les collèges québécois, un important éventail de pratiques pédagogiques inventives et adaptées, dont la visée explicite est le soutien à la réussite des études. Centres d'aide à l'apprentissage, bulletins de mi-session, groupes de pairs, soutien pédagogique individuel, etc: la liste est considérable et sans cesse en évolution. Il importe d'en faire une promotion plus rigoureuse et plus systématique. C'est dans cette perspective que, à la faveur du renouveau proposé, il est prévu: de maintenir le soutien financier actuellement accordé au fonctionnement des centres d'aide à l' apprentissagedont la visite pourrait d'ailleurs impressionner bien des parents et bien des citoyens; de diffuser un répertoire des pratiques institutionnelles innovatrices ayant donné des résultats positifs pour la réussite des études; d'accorder, dans le cadre du PAREA (Programme d'aide à la recherche sur l'enseignement et l'apprentissage), un haut degré de priorité aux projets de recherche pédagogique liés à la réussite des études. La gratuité scolaire maintenue. Mesure centrale de la loi de 1967, l'accès gratuit aux études collégiales pour les étudiantes et les étudiants à temps plein serait maintenu. On reviendrait même à l'esprit originel de la loi, en accordant cette gratuité à toutes les étudiantes et à tous les étudiants inscrits à temps plein dans un programme d'études, qu'il s'agisse d'un programme conduisant à un DEC ou d'un programme d'établissement. Quant à la définition de l'étudiante et de l'étudiant à temps plein, la loi confirmerait la situation actuelle, qui est aussi celle qui est prise en compte pour l'aide financière: est considérée à temps plein, la personne inscrite à au moins quatre cours d'un programme d'études collégiales ou à un nombre moindre de cours comptant au total un minimum de 180 périodes d'enseignement d'un tel programme. Le collège québécois, notamment dans les programmes d'études techniques, a réussi à attirer et à accueillir des groupes socio-économiques de la population qui n'avaient traditionnellement qu'un faible accès aux études postsecondaires. C'est pour cela que l'imposition de droits de scolarité au collégial pourrait, contrairement à la situation qui prévaut à l'université, avoir un caractère régressif et compromettre dès lors des acquis encore faiblement enracinés dans les pratiques et les mentalités des individus et des familles. En regard des objectifs d'accessibilité, le maintien de la gratuité apparaît actuellement comme une affaire de prudence. Une mesure financière visant la responsabilisation et l'incitation à la réussite. En complément de ces mesures de soutien à la réussite des études - précision du seuil d'admissibilité, encadrement accru en première session, promotion des pratiques pédagogiques efficientes, maintien de la gratuité -, il est proposé d'ajouter une mesure à portée financière visant la responsabilisation face aux études et l'incitation à la réussite: l'instauration de droits de 50 $ pour chacun des cours auxquels s'inscrit une étudiante ou un étudiant, lorsque cette étudiante ou cet étudiant a accumulé un certain nombre d'échecs - cinq dans les programmes d'études préuniversitaires et sept dans les programmes d'études techniques. Ces droits cesseraient d'être exigibles après la réussite de quatre cours ou après l'obtention du DEC, selon des modalités précisées par règlement du gouvernement. Il est évidemment entendu que, conformément aux pratiques actuelles de gestion académique, certains cas particuliers de force majeure - accident, maladie prolongée, assistance à des proches, etc - ne sauraient être mécaniquement assimilés à des échecs, mais plutôt à des dossiers dits «incomplets». Des intervenants ont proposé de fixer un nombre de sessions au-delà duquel le droit à la gratuité intégrale disparaîtrait. Cette solution a l'inconvénient de pénaliser les étudiantes et les étudiants qui adoptent un cheminement plus lent pour des raisons d'aptitudes, de ressources financières ou de choix personnel, de même que celles et ceux dont le choix de carrière n'est pas arrêté à leur arrivée au collège. Quant à l'hypothèse de fixer un nombre maximal d'unités permettant de bénéficier de la gratuité, elle soulève la difficulté de déterminer ce nombre pour des programmes d'études dont les durées sont très différentes. De plus, elle pénaliserait l'étudiante ou l'étudiant qui change de programme ou qui décide de revenir au collège dans une nouvelle orientation, après avoir déjà complété un cours collégial. Il est d'ailleurs légitime de penser qu'il n'y a pas utilisation excessive du système lorsqu'on se réoriente positivement ou qu'on acquiert une nouvelle formation. Une mesure dont le déclencheur est un nombre d'échecs accumulés est plus susceptible d'améliorer l'efficience du réseau collégial. En outre, la mesure projetée inciterait les étudiantes et les étudiants qui ont des difficultés scolaires à profiter au maximum des ressources particulières, notamment des nouvelles sessions d'intégration, mises à leur disposition pour les aider à réussir ou à réviser rapidement leur orientation, si nécessaire. Le cas échéant, cette mesure pourrait même les inciter à reporter leur projet d'études collégiales, s'ils n'arrivent pas à surmonter leurs difficultés. L'article 33 du régime pédagogique actuel stipule que l'étudiante ou l'étudiant n'ayant pas obtenu plus de la moitié des unités des cours suivis lors d'une session doit obtenir l'autorisation du collège pour s'inscrire à la session suivante. Son application varie beaucoup d'un établissement à l'autre. Mais c'est une disposition qui donne effectivement aux collèges une sorte de pouvoir d'exclure des étudiantes et des étudiants en situation d'échec. Certains souhaiteraient que, en lieu et place de toute mesure à portée financière, on resserre le libellé de cet article, au point même de rendre obligatoire l'exclusion de celles et ceux qui auraient accumulé un certain nombre d'échecs. Ce n'est pas la voie qui est retenue dans le renouveau proposé. L'exclusion, en effet, est une mesure limite, à laquelle on consent lorsqu'il n'y a plus de changement positif à espérer; sa brutalité et son caractère de peine totale sont aussi difficilement conciliables avec une vision sociale de l'accessibilité et une pédagogie de la réussite. L'incitation financière retenue mise d'emblée sur la volonté de réussir plutôt que sur l'exclusion. Devenu dès lors moins utile, l'article 33 serait aboli. 3-2 Des programmes d'études cohérents, exigeants et adaptés aux besoins. Particulièrement en enseignement supérieur, les programmes d'études sont au centre de toutes les pratiques institutionnelles: ce sont les programmes qui délimitent le projet de formation proposé, assurent la cohérence des fins et des moyens et forment le point de ralliement de celles et ceux qui oeuvrent à la réalisation effective du projet de formation. Ils sont ainsi appelés à occuper, dans les collèges et dans les cheminements de formation des étudiantes et des étudiants, le premier grand point de référence. 3-2-1 Dans tous les programmes d'études conduisant au DEC, une formation générale commune enrichie et plus cohérente. Ainsi que l'ensemble des intervenants en ont exprimé la conviction et le souhait, la part de formation générale commune qui a fait la marque de l'enseignement collégial québécois doit être maintenue. Nous avons plus que jamais besoin de ce fonds culturel commun. Il importe même d'en réactualiser le contenu, de l'enrichir, d'en assurer la polyvalence, d'en accroître la cohérence interne, d'y mieux distinguer les objectifs de formation des impératifs proprement disciplinaires, de mieux l'articuler aux dominantes des divers programmes et, précisément à cet égard, d'encadrer plus rigoureusement son potentiel de complémentarité. Les accents peuvent varier quant aux éléments constitutifs de cette formation générale commune, mais on peut dire que, très massivement, c'est la maîtrise des langages fondamentaux, l'appropriation d'éléments majeurs de l'héritage toujours vivant de la culture, l'équilibre et l'intégration des divers aspects de la formation qui sont ici pointés comme essentiels. ?tre bien formé et « cultivé » aujourd'hui, ce serait dès lors: maîtriser sa langue - une maîtrise indissociable de la capacité même de penser -; être capable de s'exprimer avec précision et de saisir par l'intérieur les richesses de l'héritage littéraire; être capable de communiquer en d'autres langues, au premier chef en français et en anglais, à un niveau qui dépasse le simple code d'usage; maîtriser les règles de base de la pensée rationnelle, du discours et de l'argumentation; être capable d'autonomie dans la réflexion et pouvoir se situer critiquement par rapport aux valeurs et aux divers discours sur la réalité humaine; pouvoir se situer par rapport aux grands pôles de l'évolution de la pensée humaine; pouvoir se gouverner responsablement en matière de santé et de condition physique; comprendre les spécificités des approches du réel qui sous-tendent les grands domaines du savoir - l'art, la science, la technologie, la mathématique, les sciences humaines, etc. Telle est, à peu de chose près, la vision de la formation générale qui inspire la majorité des propos entendus au cours de la dernière année. Telle est aussi celle qui sert de fil conducteur aux aménagements envisagés. Dans cette perspective, il est donc proposé de regrouper, en un ensemble de 26 et deux tiers unités, les unités actuellement attribuées aux «cours obligatoires» et celles attribuées aux «cours complémentaires», de manière à accroître les possibilités d'insérer de nouveaux objectifs de formation et de constituer un tout plus cohérent. Il est également proposé de franchir un pas vers un énoncé de champs de formation qui combine plus souplement le découpage disciplinaire et l'identification de domaines ou de thématiques plus larges, ainsi que l'a suggéré avec force le Conseil des collèges. Cet ensemble commun serait fait de trois composantes. Un premier bloc de 14 et deux tiers unités, pour lequel le ministre définirait les objectifs, les standards et les activités d'apprentissage. On y trouverait: 7 et un tiers unités en langue d'enseignement et littérature, 2 unités en langue seconde, 4 unités en philosophie ou «Humanities» et 1 et un tiers unité en éducation physique. Un deuxième bloc de 6 unités, pour lequel le ministre déterminerait les objectifs et les standards, mais dont les collèges arrêteraient les moyens pour les atteindre, avec un souci explicite d'y tenir compte, dans la mesure et de la manière jugées utiles, des besoins et intérêts dominants des programmes ou de groupes de programmes. On y trouverait: 2 unités en langue d'enseignement et littérature; 2 unités en langue seconde; 2 unités en philosophie ou «Humanities». Un troisième bloc de 6 unités, pour lequel le ministre définirait les objectifs et les standards, mais dont les collèges établiraient les moyens à utiliser pour les atteindre, dans une perspective explicite de polyvalence et de complémentarité par rapport aux intérêts dominants du programme. Cinq domaines ou thématiques sont ici identifiés: culture scientifique et technologique, art et esthétique, sciences humaines, langage mathématique, langue moderne. Deux (2) unités seraient allouées à chacun de ces domaines et l'étudiante ou l'étudiant devrait en prendre 6, réparties dans au moins 2 des 5 domaines. Ces enseignements pourraient être assurés par des enseignantes et des enseignants de plus d'une discipline. Plus qu'un simple nouveau partage des disciplines et des domaines de formation, le réaménagement proposé s'inspire de préoccupations et nourrit des visées qui appellent quelques précisions. Globalement, d'abord, ce réaménagement permettrait de donner suite à des souhaits abondamment exprimés à l'occasion de la Commission parlementaire: préciser les objectifs et les contenus communs en langue d'enseignement et littérature, en philosophie ou «Humanities» et en éducation physique, et en accroître la comparabilité d'un collège à l'autre; accroître le temps alloué à la maîtrise de la langue d'enseignement; introduire des cours de langue seconde; tenir davantage compte des besoins propres à chaque programme; réduire l'éventail des cours complémentaires, resserrer les règles de la complémentarité elle-même et favoriser ainsi un meilleur équilibre de la formation. En langue d'enseignement et littérature, l'augmentation du nombre d'unités - de 8 à 91/3 - permettrait de mieux répondre à un besoin identifié de toutes parts, celui de mieux suivre le travail des étudiantes et des étudiants et d'encadrer leurs exercices pratiques. Ce n'est pas le nombre de cours qui serait ici augmenté, mais plutôt l'élément de pondération lié à l'encadrement des travaux pratiques. Il en résulterait une diminution du nombre d'étudiantes et d'étudiants assignés à chaque enseignante ou enseignant; en revanche, celle-ci ou celui-ci passerait plus de temps avec les mêmes étudiantes et étudiants. L'essentiel de ces unités ferait partie de la composante commune à tous les programmes. Leur contenu et leur ordonnancement seraient définis dans la foulée des travaux actuellement conduits pour préciser les objectifs de chaque année des cours primaire et secondaire: suite serait ainsi donnée à la recommandation pressante des enseignantes et des enseignants de langue et littérature, à l'effet que la séquence des objectifs des divers ordres d'enseignement devrait faire l'objet d'une répartition claire et respectée. On connaîtrait dès lors avec précision quel niveau de compétence doit être atteint au terme de chaque étape de la formation primaire, secondaire et collégiale, et les objectifs propres à chaque ordre d'enseignement. Les deux unités prévues dans la composante particulière à chaque programme permettraient, dans les cas où cela est utile et souhaitable, d'adapter les activités d'apprentissage aux besoins propres à chaque programme ou à chaque groupe de programmes. Il pourrait s'agir tantôt d'un corpus littéraire particulier, tantôt d'un type particulier d'écriture. Rien de formaliste ici, mais une volonté de répondre à des besoins réels, dans le cadre d'objectifs et de standards qui demeureraient fondamentalement communs. En langue seconde, quatre unités seraient introduites. On répondrait ainsi à des besoins ressentis comme pressants autant par les anglophones et les allophones que par les francophones. Les premiers, pour s'assurer de participer pleinement à la vie d'une société dont la langue est le français, une langue qui est par ailleurs une des grandes langues de culture et d'échanges internationaux. Les seconds, également pour des motifs d'enrichissement culturel et parce que l'anglais est devenu la première langue internationale, mais aussi pour s'assurer de participer aux nouvelles réalités du libre-échange nord-américain et de la mondialisation des échanges. ? leur arrivée au collège, les étudiantes et les étudiants font preuve de degrés fort divers de maîtrise de la langue seconde. La formulation des objectifs et des standards devrait tenir compte de cette réalité et prévoir, par-delà les seuls objectifs minimaux reliés à l'usage courant, des possibilités de formation plus poussée et plus diversifiée, notamment sur les plans littéraire et culturel. Le recours massif et systématique à l'octroi d'équivalences s'accorderait plutôt mal à la maîtrise observée de la langue seconde, parlée ou écrite. ? l'instar de ce qui est prévu pour la langue d'enseignement et dans le même esprit, l'insertion de deux de ces quatre nouvelles unités sous la rubrique « formation générale particulière à un programme » permettrait aussi, là où cela est utile et souhaitable, de favoriser la maîtrise de la langue seconde dans le domaine spécifique d'activité couvert par un programme d'études ou par un groupe de programmes. Il pourrait s'agir tantôt d'un vocabulaire particulier, tantôt d'un type particulier d'écriture, tantôt d'un corpus littéraire particulier. Mais, là encore, on serait toujours dans le cadre d'objectifs et de standards fondamentalement communs. En philosophie ou « Humanities », on passerait formellement de huit à six unités, mais, en raison de la nature même des domaines ou thématiques retenus pour la composante de formation générale complémentaire, ces disciplines y seraient largement mises à contribution: au moins une de ces thématiques complémentaires pourrait être confiée aux enseignantes et aux enseignants de philosophie ou de « Humanities ». Le contenu et l'ordonnancement de ces six unités seraient définis en tenant compte des insistances qui se sont affirmées avec le plus de netteté à l'occasion de la Commission parlementaire et qui correspondent à certains des résultats les plus attendus de ce genre de formation. D'abord, des attentes concernant la capacité de raisonner et d'argumenter avec rigueur et de distinguer les ordres de discours: tout cela qui, tenant à la fois de la logique et de l'épistémologie, touche à la précision et à la clarté de la pensée et du discours. Ensuite, des attentes concernant la réflexion critique sur les valeurs et les réalités éthiques, et cela selon l'ensemble de leurs dimensions personnelles, sociales et politiques. Enfin, des attentes concernant la connaissance de cet ensemble de repères historiques qui permettent de situer les grandes étapes d'une évolution de la pensée et des idées dont nous vivons toujours. Ces insistances n'auraient pas à être traduites mécaniquement en trois cours distincts. Deux de ces unités feraient partie de la composante de formation générale spécifique à un programme ou à un groupe de programmes. Tout comme dans le cas de la langue d'enseignement et de la littérature et de la langue seconde, il s'agirait, dans les moyens utilisés pour atteindre des objectifs et des standards fondamentalement communs, de tenir compte des intérêts propres à des programmes ou à des groupes de programmes. Le champ de l'éthique, qu'on ne confondra pas avec la déontologie des professions, apparaît d'emblée comme pouvant avantageusement être traité dans ce cadre. Mais d'autres éléments liés à chacune des trois insistances évoquées plus haut pourraient aussi y figurer avec profit. En éducation physique, il y aurait diminution effective du nombre d'unités. Les étudiantes et les étudiants continueraient d'avoir accès aux équipements sportifs et d'être incités à les utiliser, mais le nombre d'unités obligatoires créditées passerait de 2 et deux tiers à 1 et un tiers et le nombre équivalent de cours, de quatre à deux. La proposition retenue s'appuie sur les motifs suivants: l'importance de l'activité physique pour la santé physique et mentale, les pratiques implantées dans les collèges et l'âge des étudiantes et des étudiants qui arrivent du secondaire militent en faveur du maintien de certaines activités physiques obligatoires; en revanche, dans les systèmes d'enseignement supérieur canadiens et étrangers, il n'y a généralement pas d'activités physiques obligatoires et créditées; le cours obligatoire crédité étant un moyen parmi d'autres, il est impossible d'identifier le rapport entre exercice physique et santé à un rapport nécessaire entre cours obligatoire d'éducation physique et santé; la diminution du nombre de cours crédités n'entraînerait pas la diminution de l'accès aux équipements sportifs, qui continueraient d'être accessibles et où pourraient oeuvrer des spécialistes de l'éducation physique; le nombre de dispenses actuellement accordées en éducation physique par les collèges publics et privés témoigne d'une prise en compte souple de ce type d'enseignement obligatoire; les universités ne tiennent pas compte des résultats obtenus en éducation physique, la «cote Z» les excluant même de ses calculs; la suppléance convenue il y a vingt-cinq ans est moins nécessaire aujourd'hui, maintenant que des équipements sont largement répandus dans les écoles et dans des centres sportifs de toute nature; la formation en langues est suffisamment prioritaire pour qu'on consente à lui faire de la place. En formation générale complémentaire, le choix serait fait par le collège en fonction du programme d'études et permettrait d'assurer un meilleur équilibre de la formation. Deux unités y seraient allouées à chacun des cinq domaines proposés; l'étudiante ou l'étudiant devrait en prendre pour six unités et dans au moins deux des cinq domaines. Telle étudiante ou tel étudiant de techniques ou de sciences de la nature devrait, par exemple, s'inscrire en art et esthétique, en sciences humaines ou en langue moderne. Telle étudiante ou tel étudiant de sciences humaines devrait aller plutôt vers la culture scientifique et technologique, le langage mathématique ou art et esthétique. Et ainsi de suite. Il s'agit donc d'un resserrement significatif par rapport à l'éventail actuel des cours complémentaires et d'une gestion plus rigoureuse de la complémentarité. Ce resserrement permettrait aussi d'accorder une importance relative accrue à l'apprentissage des langues modernes. 3-2-2 Dans les programmes d'études préuniversitaires: une articulation plus nette entre le collège et l'université. Les changements proposés pour la formation générale commune sont de première importance pour la maîtrise des langages fondamentaux nécessaires à toute poursuite des études; il n'est donc pas étonnant que, dans leurs mémoires et leurs interventions, les universités aient particulièrement insisté sur l'amélioration de la formation générale comme élément majeur de l'amélioration de la formation préuniversitaire. Mais, dans la partie appartenant spécifiquement aux programmes préuniversitaires - ce que l'on appelle couramment la « concentration » -, le renouveau proposé met de l'avant une perspective stratégique de base et deux pistes d'action. Une perspective de base: un continuum en deux étapes articulées La perspective qui inspire les actions de renouveau concernant les programmes d'études préuniversitaires est nette: il s'agit de progresser vers des programmes collégiaux qui, plus nettement que maintenant, constituent vraiment la première de deux étapes dans un cheminement conduisant normalement au premier grade universitaire de baccalauréat. Deux années au collège, généralement trois années au premier cycle de l'université: telle est bien, en effet, la version québécoise de l'«Undergraduate», ce niveau fondamental de la formation postsecondaire, qui emprunte lui-même, on l'observe dans de nombreux pays industrialisés, des modèles de plus en plus diversifiés. Explicitement conçue dès l'origine pour favoriser l'accès à l'enseignement supérieur, cette séquence collègeuniversité doit être exploitée selon tout son potentiel, plus systématiquement qu'on ne l'a fait jusqu'ici. C'est de cette façon que les arrimages et les harmonisations partout souhaités pourront se réaliser, bien audelà du mécanisme des « structures d'accueil universitaires » que collèges et universités reconnaissent actuellement comme insuffisantes. Bien plus que la réussite de cours préalables nommément pointés, c'est l'atteinte d'objectifs de formation clairs et définis en concertation qui est garante des continuités et des articulations. Des expérimentations conjointes systématiques. C'est dans cette perspective stratégique que, avec le soutien financier du Ministère, plusieurs équipes d'enseignantes et d'enseignants de collèges et d'universités sont actuellement engagées dans une expérimentation systématique du cadre récemment défini pour le programme de sciences de la nature. Le but de l'expérimentation est de définir des approches pédagogiques et un ordonnancement optimal des contenus, à la faveur desquels le cadre même du programme pourrait éventuellement être ajusté ou revu. Ces expérimentations prometteuses se poursuivront, sous la supervision du Comité de liaison de l'enseignement supérieur - couramment appelé le « CLESEC », de son nom devenu anachronique de Comité de liaison de l'enseignement supérieur et de l'enseignement collégial. Se poursuivront aussi les rapprochements inter-institutionnels autour du nouveau programme de sciences humaines, dont des collèges et des universités, notamment dans la région de Montréal, ont pris l'initiative. ? l'instigation du Comité de liaison de l'enseignement supérieur, des équipes de collèges et d'universités s'engageront également sous peu dans des projets dont l'objet est la révision des programmes d'arts et lettres. Selon les termes de l'appel d'offres qui sera fait prochainement, les travaux porteront d'abord sur la définition d'un cadre général de programme, puis sur l'expérimentation conjointe dans des collèges. Dans une perspective plus proprement exploratoire et prospective, le Comité de liaison de l'enseignement supérieur se prépare également à superviser des expérimentations conjointes de ce que pourrait être un programme d'études préuniversitaires à caractère plus polyvalent que les concentrations actuelles - une sorte de «Liberal Arts» ou de «DEC ès arts», qui, si l'expérience s'avérait concluante, pourrait inspirer des évolutions futures de l'approche des programmes d'études préuniversitaires. Un ajout d'unités en sciences humaines et en arts et lettres. Les programmes d'études préuniversitaires actuels ne comportent pas le même nombre d'unités: 32 en sciences de la nature, 28 en sciences humaines, et 24 en arts et en lettres. Il y a des raisons historiques à cela. On se souviendra, en particulier, que, au moment de la création des nouveaux collèges, plusieurs voix avaient réclamé pour les étudiantes et étudiants de sciences humaines, d'arts et de lettres, plus de temps pour la lecture et les travaux personnels, leurs collègues de sciences de la nature devant, pour leur part, avoir des activités accompagnées en laboratoire. Ces intentions de départ ont cependant connu des évolutions qui ont fini par laisser croire que certains programmes avaient moins de poids que d'autres. De telle sorte que, depuis un certain temps, plusieurs réclament que l'on donne un «poids plus équivalent» aux différents programmes. Un pas a été franchi en 1991, lors de la mise en oeuvre du nouveau programme de sciences humaines: celui-ci est alors passé de 24 à 28 unités, ce qui a permis l'ajout d'un cours commun en méthodologie des sciences humaines et d'un autre en méthodes quantitatives. A la faveur du renouveau proposé, il convient de pousser plus avant dans cette voie. En sciences humaines, une fois assurée l'implantation en cours, on passerait donc de 28 à 30 unités, ce qui permettrait, sans retoucher à la structure du nouveau programme, de donner suite au souhait exprimé d'une activité d'intégration de l'ensemble du programme. En arts et lettres, on profiterait de la révision qui s'enclenche pour porter le nombre d'unités de 24 à 28. C'est dans le cadre élargi de ce nouveau paramètre que pourrait se conclure le processus de révision. 3-2-3 En formation technique, des programmes plus souples et adaptés aux besoins du marché du travail. Les modifications envisagées au bloc commun de formation générale constituent déjà un apport important à la qualité des programmes de formation technique. En même temps qu'elles assureraient une mise à jour et un rééquilibrage culturel significatifs, elles permettraient une meilleure articulation avec la formation spécifique aux divers programmes d'études. Cette rénovation et ce renforcement de la formation générale vont très directement dans le sens des attentes et des souhaits exprimés par les employeurs eux-mêmes. Dans une enquête ~ publiée récemment, ceux-ci ont bien manifesté leur satisfaction générale à l'endroit des compétences professionnelles des techniciennes et des techniciens qu'ils embauchent, mais ils ont souligné le caractère primordial des aptitudes de base, notamment de la maîtrise des langues, et ont, à cet égard, fait part de graves lacunes observées. Les mesures proposées pour la formation générale commune doivent donc être considérées comme dirigées, elles aussi, vers l'amélioration de l'ensemble des compétences des diplômés du secteur technique. Dans les composantes de formation spécifiques aux programmes d'études techniques - ce que nous appelons couramment la «spécialisation» -, le renouveau proposé adopte aussi une perspective stratégique de base, qui inspire l'ensemble des mesures retenues. Une perspective de base: une articulation fonctionnelle aux besoins du marché du travail. C'est essentiellement sous le signe d'une plus grande souplesse et d'une adaptation plus rapide aux besoins du marché du travail que sont placées les mesures de renouveau ici proposées. A l'instar des jonctions avec l'université favorisées pour les programmes d'études préuniversitaires et dans un même esprit de respect des objectifs propres aux uns et aux autres, il s'impose de pousser plus avant les liens de collaboration et les partenariats avec les instances du monde du travail. Il est ici question des éléments qui touchent les programmes d'études proprement dits, mais on comprendra qu'ils sont à mettre en liaison avec d'autres mesures, exposées plus loin, qui concernent le renforcement du partenariat avec le monde du travail. On pense ici surtout au Comité national des programmes d'études techniques; aux stages en entreprise et à la formation en alternance; à la nomination de gens d'entreprises aux conseils d'administration des collèges ou à leur participation, comme experts, à certains travaux de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial; aux nouveaux liens entre les collèges et les sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre; au développement des centres de transfert de technologie. Des longueurs variables maintenues pour les programmes conduisant au DEC. Le régime des études actuel prévoit que la spécialisation peut compter un nombre d'unités variant de 45 à 65. Cette disposition de géométrie variable doit être maintenue. Elle permet d'avoir des programmes qui sont très majoritairement de trois ans, mais sans qu'on y soit contraint artificiellement. Certains souhaiteraient que le maximum d'unités soit porté au-delà de 65, pour permettre des cheminements dépassant assez significativement le maximum actuel. On ne fermera pas cette voie de façon absolue et définitive, mais la plus grande prudence s'impose ici. Outre qu'il faille contrer les surenchères, faciles en ces matières, l'instauration de nouveaux chevauchements entre les ordres d'enseignement irait tout à fait à l'encontre du mouvement inverse souhaité pour rationaliser ceux que l'histoire nous a légués. La fourchette actuelle (45-65) serait donc confirmée, les cas particuliers pouvant toujours être examinés et traités au mérite. La possibilité d'un accès par modules au DEC technique. Le projet de Régime des études collégiales accorderait au ministre le pouvoir de reconnaître - «reconnaître», parce que les collèges pourraient prendre l'initiative d'en proposer -, à l'intérieur des programmes d'études techniques conduisant au DEC, des modules de formation. Fréquemment souhaitée depuis quelque temps, cette possibilité d'un accès modulé au DEC permettrait de procéder à des arrimages de système entre le secondaire et le collégial et d'offrir, notamment aux personnes déjà engagées sur le marché du travail, certains cheminements pédagogiquement mieux gradués. Les étudiantes et les étudiants y seraient toujours inscrits au programme conduisant au DEC; mais, dans les cas où cela est utile, il serait possible pour le collège de ponctuer leur cheminement par une certification plus significative qu'un simple bulletin de notes. Il ne s'agirait pas d'une nouvelle catégorie de programmes, ni d'un nouveau type de diplôme, mais plutôt d'un mode de cheminement possible vers le DEC. C'est pour cela, d'ailleurs, que, conformément à la structure fondamentale du DEC, tout module devrait comporter une composante de formation générale. Trois cas spécifiques sont envisagés. Il y a d'abord celui des programmes d'études professionnelles du secondaire ayant une suite au collégial et comportant ainsi une inévitable part de chevauchement: pour assurer les arrimages nécessaires et éviter aux étudiantes et étudiants les répétitions inutiles, il pourrait y avoir reconnaissance en bloc et, moyennant certains éléments de formation générale, reconnaissance d'une étape déjà franchie vers le DEC. Deuxièmement, dans les programmes comportant des troncs communs, l'identification de modules correspondant à ces troncs communs permettrait de reconnaître une étape significative vers l'obtention du DEC. Enfin, ainsi que le cas en a été exposé en commission parlementaire, il y a certains blocs de formation qui correspondent à des fonctions de travail bien identifiées et reconnues. L'identification de modules permettrait alors de sanctionner cette étape d'acquisition de compétences sur la route de l'obtention du DEC. Une révision accélérée des programmes d'études techniques. La redéfinition des programmes par la méthode dite des compétences est résolument enclenchée, mais, ainsi qu'on l'a unanimement réclamé, il faut absolument en accélérer la réalisation. Les employeurs, en particulier, déplorent à juste titre la lourdeur des processus de révision. Le rythme des révisions étant ultimement une affaire de moyens, des ressources additionnelles seraient, au cours des prochaines années, allouées à cette tâche centrale pour la capacité d'adaptation de notre dispositif de formation technique. Et les divers partenaires concernés y seraient étroitement associés, dans le cadre d'un Comité national des programmes techniques dont il sera question plus loin. Un éventail de programmes à simplifier et à rationaliser. La révision en cours des programmes techniques devra aussi être l'occasion de réduire le nombre actuel - environ 125 - de programmes conduisant au DEC: il est d'ores et déjà prévu de ramener ce nombre à moins de 100. Des consensus émergent concernant l'opportunité de consolider cet éventail et de procéder à la constitution de troncs communs. L'insistance à mettre sur l'acquisition des compétences génériques et transférables milite en faveur de cette simplification. Cette simplification a son pendant dans la répartition des programmes entre les établissements et entre les régions. Les directions des collèges ont beaucoup insisté, ces derniers mois, sur la nécessité de rationaliser davantage l'offre des programmes en formation technique. Suite sera donc donnée à cette volonté et, en lien avec les actions déjà conduites au sujet des programmes inactifs ou dits sous le seuil de viabilité, une opérationréseau de rationalisation sera bientôt enclenchée de concert avec les collèges et le monde du travail. Le but visé sera d'assurer à la fois l'accessibilité et la constitution de pôles suffisamment consistants pour atteindre l'excellence. Les programmes d'établissement: une marge de manoeuvre considérablement accrue. Seuls les programmes conduisant au DEC seraient désormais des programmes correspondant à ce qu'on appelle couramment des « programmes d'État». Les programmes conduisant naguère au Certificat d'études collégiales (CEC) et au Diplôme de perfectionnement de l'enseignement collégial (DPEC) seraient abolis, du moins quant à leur appellation et à leur statut de programmes et de diplômes d'État. La raison en est la reconnaissance très hésitante de ces diplômes sur le marché du travail, voire une certaine confusion dans les appellations et les perceptions, qui risquerait même de s'accroître avec l'arrivée des nouveaux modules envisagés. A côté des programmes de DEC, ne subsisteraient dorénavant que les programmes d'études techniques d'établissement conduisant à une Attestation d'études collégiales (AEC). Cette sanction serait, comme actuellement, une sanction d'établissement, couronnant, comme maintenant, la réussite dans un programme d'études techniques à durée variable élaboré par l'établissement. Les contenus des programmes de CEC actuels pourraient continuer d'être offerts comme programmes d'établissement conduisant à une AEC. Deux prescriptions nouvelles sont à signaler. D'abord, l'autorisation ministérielle de ces programmes ne serait plus requise. C'est là un autre pas vers une responsabilité académique accrue des collèges et vers une réponse plus souple et plus rapide aux besoins de formation technique. Deuxièmement, à moins d'une autorisation ministérielle expresse - ce sera notamment le cas pour les collèges privés non subventionnés -, les collèges seraient dorénavant autorisés à offrir de ces programmes dans les seuls domaines d'études techniques pour lesquels ils sont autorisés à offrir un programme conduisant au DEC, quitte à conclure, le cas échéant, des ententes avec des collèges autorisés. On entend ainsi inciter les collèges à intervenir dans les champs où leur compétence est établie et à le faire dans le cadre d'une concurrence mieux harnachée. Cette nouvelle latitude d'élaborer, de dispenser et de sanctionner des programmes de formation technique de durée variable permettrait aux collèges de répondre avec plus de souplesse et de rapidité aux besoins de formation courte ou de formation sur mesure. Tout en favorisant, évidemment, la reconnaissance des compétences acquises dans les programmes conduisant au DEC dans lesquels les étudiantes et les étudiants pourraient éventuellement décider de s'inscrire. La promotion de la formation technique. Ces mesures d'assouplissement relatives aux programmes d'études techniques ne suffisent pas à assurer leur fréquentation. Il faut aussi y attirer des étudiantes et des étudiants en plus grand nombre. Avec plus de 75 000 étudiantes et étudiants - presque la moitié de l'effectif total-, l'enseignement technique collégial représente déjà une force et un potentiel considérables pour les besoins du Québec. Mais, les avis sont unanimes, il faut y accroître encore le nombre d'étudiantes et d'étudiants. Des actions visant l'accroissement de l'accès en formation technique sont déjà enclenchées, avec deux mesures importantes: la création, pour septembre 1993, de 10 000 places-élèves dans les collèges, dont plus des trois quarts en formation technique; la poursuite et l'intensification de la campagne de valorisation et de promotion de la formation technique, conduite par les collèges et le Ministère auprès des jeunes du secondaire et de l'ensemble de la population. Le discours actuel de promotion de la formation technique semble déjà porter fruit, puisque, depuis 1990-1991, la croissance des effectifs en formation technique est plus rapide qu'en formation préuniversitaire. Et les données actuellement disponibles sur les admissions de l'année 1993-1994 indiquent une accélération marquée de cette croissance. L'accueil en formation continue à temps partiel. Des dizaines de milliers de personnes, « adultes » jeunes ou moins jeunes, frappent chaque année à la porte des collèges pour y suivre des activités de formation à temps partiel. Certaines le font dans le cadre des programmes de soutien de la main-d'oeuvre ou de plans de formation de leur entreprise; elles bénéficient alors de la gratuité, voire de mesures d'aide personnelle. Mais un nombre élevé de personnes viennent d'elles-mêmes au collège pour y prendre des formations à temps partiel. Comme l'établit la loi actuelle et comme il est proposé de le confirmer, ces personnes doivent assumer des droits de scolarité. Ces droits ne correspondent évidemment pas aux coûts réellement encourus par les collèges; ceux-ci ne peuvent donc pas répondre à cette demande sans des subventions reçues au titre de l'«enveloppe de l'éducation des adultes». Les ressources du trésor public sont actuellement soumises à des contraintes dont tout le monde est conscient. Il n'est donc pas envisageable de procéder d'un seul coup à un accroissement considérable des ressources allouées à l'offre de formation à temps partiel. L'accroissement de ces ressources, spécifiquement en formation technique, fait tout de même partie des rendez-vous dont doit faire état le renouveau proposé pour l'enseignement collégial: les collèges doivent avoir les moyens d'établir une offre de services de formation à temps partiel mieux ajustée à une demande actuellement en nette croissance. Le niveau de l'enveloppe destinée à l'offre de formation technique à temps partiel sera donc progressivement haussé à compter d'août 1993. 3-3 Des responsabilités académiques accrues pour les établissements et, corrélativement, un dispositif d'évaluation plus rigoureux. Dynamique cruciale pour la mise en oeuvre du renouveau proposé, il est essentiel que les collèges assument avec maturité des responsabilités académiques accrues. L'observation et la recherche le confirment de toutes parts: la clef de la qualité et de la réussite est dans le dynamisme des établissements eux-mêmes et, particulièrement en enseignement supérieur, c'est en regard des programmes d'études que s'exercent ce dynamisme et les responsabilités les plus déterminantes. Les universités ont souligné avec force que les améliorations attendues et la capacité même d'assurer les arrimages souhaitables avec les collèges supposent, chez ces derniers, une plus grande maîtrise des programmes d'études qu'ils offrent. En revanche, comme en un mouvement normal d'équilibre, cette autonomie accrue doit être accompagnée de mécanismes plus serrés d'évaluation a posteriori. Les universités connaissent déjà bien cette dynamique, elles qui, pleinement responsables de leurs programmes d'études, doivent se mesurer aux standards nationaux et internationaux de multiples instances d'évaluation et d'accréditation. Tout au long des débats des derniers mois, les collèges eux-mêmes et de très nombreux intervenants - en fait, c'est la demande quantitativement la plus marquée en commission parlementaire - ont proposé l'instauration de vigoureux mécanismes d'évaluation interne et externe, en même temps qu'ils ont réclamé des responsabilités académiques institutionnelles beaucoup plus grandes, allant parfois jusqu'à souhaiter que les collèges décernent eux-mêmes le Diplôme d'études collégiales. Des responsabilités redéfinies en matière de programmes d'études. La nouvelle structure des programmes conduisant au DEC et le nouvel agencement des contenus vont de pair avec une redéfinition des rôles et responsabilités académiques du ministre et des collèges. C'est nettement du côté des objectifs et des standards que porterait dorénavant l'action ministérielle. Les objectifs désignent les compétences (les habiletés, les connaissances, etc) que l'on vise à faire maîtriser et les standards, les niveaux ou les degrés auxquels ces compétences doivent être maîtrisées au collégial. Quant aux activités d'apprentissage, il s'agit des cours (laboratoires, ateliers, séminaires, stages ou autres activités pédagogiques) destinés à assurer l'atteinte des objectifs et des standards visés. La répartition proposée signifie un engagement académique accru des collèges dans l'administration responsable des programmes d'études, à un degré qui, sans se comparer à ce qui se pratique à l'université, est plus compatible avec un statut d'ordre d'enseignement supérieur. Dans les programmes d'études préuniversitaires, les nécessités de jonction collège-université militent en faveur du maintien d'un taux relativement élevé (au moins 50 %) d'activités définies par le ministre. Sont ainsi assurés les troncs communs correspondant aux structures d'accueil dans les différents programmes universitaires. Ces troncs communs sont actuellement variables selon les programmes, mais il est possible que certains soient modifiés au terme des expérimentations en cours ou projetées. D'ici là, le minimum de 50 % est tout à fait fonctionnel. En formation technique, les collèges auraient l'entière responsabilité de la définition des activités d'apprentissage assurant l'atteinte des objectifs et des standards des programmes conduisant au DEC. Les nouveaux programmes par compétences rendent cette mesure appropriée, de même que la nécessité, fortement soulignée en commission parlementaire, de favoriser l'adaptation rapide et efficace aux besoins du marché du travail. Pour assurer la comparabilité des formations, cependant, le ministre garderait la responsabilité de définir les objectifs et les standards. Quant aux programmes d'établissement conduisant à des AEC en formation technique, les collèges auraient l'entière responsabilité de définir à la fois les objectifs, les standards et les activités d'apprentissage. Un engagement institutionnel accru dans la gestion des programmes d'études. Ces responsabilités accrues en matière de programmes d'études conduiraient nécessairement les collèges à s'engager plus nettement dans la gestion des programmes d'études et à soutenir des pratiques efficaces de ce qu'on appelle couramment l'«approche programme». Trois actions complémentaires sont ici retenues. La première est nettement du ressort des collèges. Il appartiendrait à chacun d'eux certains sont déjà avancés dans cette voie - de définir les structures et les pratiques leur permettant d'assurer cette gestion académique redéfinie. Il n'y aurait pas de modèle établi ministériellement. De plus, il n'est aucunement envisagé de remettre en question l'existence et le fonctionnement des départements et de la coordination départementale. Lieu d'appartenance important pour la vitalité et le ressourcement des disciplines elles-mêmes, les départements gardent toute leur utilité, y compris pour l'approche programme, à laquelle ils peuvent d'ailleurs contribuer, comme l'enseigne l'expérience des collèges qui y sont déjà engagés. Deuxième action retenue: faire obligation aux collèges de définir et d'appliquer une politique institutionnelle d'évaluation des programmes d'études qu'ils dispensent, et tels qu'ils les dispensent. Cela s'impose en raison de leur rôle considérablement accru dans la définition des activités d'apprentissage destinées à atteindre les objectifs et les standards des programmes conduisant au DEC. Cela est également commandé par les nouvelles responsabilités assumées en regard des programmes d'établissement conduisant à une AEC. Troisième action retenue: transformer la Commission pédagogique, actuellement chargée d'aviser le conseil d'administration sur l'organisation et le développement de l'enseignement, en une Commission des études dont le mandat serait plus nettement centré sur des préoccupations propres à la gestion des programmes d'études, comme on en trouve généralement en enseignement supérieur. Cette commission des études aurait pour fonction de conseiller le conseil d'administration sur toute question relative aux programmes d'études, à l'évaluation des apprentissages et à la sanction des études. Plus spécifiquement, elle serait obligatoirement consultée sur: les projets de politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages, y compris les procédures de sanction des études; les projets de politiques institutionnelles d'évaluation relatives aux programmes d'études; les projets de programmes d'études du collège; le choix des activités d'apprentissage relevant de la compétence du collège; tout projet de politique ou règlement relatif aux règles, procédures et critères régissant l'admission et l'inscription des étudiants. L'évaluation des apprentissages: d'abord une affaire institutionnelle. C'est d'abord aux collèges qu'il appartient d'évaluer les apprentissages réalisés et l'atteinte des objectifs de formation visés. Le renouveau proposé confirme évidemment cette responsabilité fondamentale et maintiendrait donc l'obligation actuellement faite aux collèges de définir et d'appliquer une politique institutionnelle d'évaluation des apprentissages. Il est proposé de demander aux collèges d'apporter deux enrichissements à leur politique d'évaluation des apprentissages. Cette politique devrait prévoir les modalités de gestion du pouvoir d'accorder des équivalences, des dispenses ou des substitutions de cours, de même que la procédure de sanction des études, notamment en ce qui a trait à la recommandation, faite par le conseil d'administration et adressée au ministre, de décerner le Diplôme d'études collégiales aux étudiantes et étudiants dont la réussite est attestée. Cette politique devrait prévoir l'instauration d'une épreuve synthèse à la fin de chaque programme d'études. Cette épreuve serait sous la responsabilité du collège et gérée selon les dispositions de sa politique d'évaluation des apprentissages. Les expériences en cours, en particulier pour le nouveau programme de sciences humaines, devraient fournir des enseignements intéressants sur les modèles que les collèges pourraient avoir profit à privilégier. Il est aussi raisonnable d'escompter que les collèges se regrouperont pour mettre au point de telles épreuves, qui acquerraient ainsi un plus haut taux de fiabilité et un potentiel plus élevé de comparabilité et d'équité. Possibilité maintenue de certaines épreuves uniformes. La loi actuelle stipule que le ministre peut faire adopter des règlements en matière d'examens. Il est envisagé de conserver et de préciser ce pouvoir ministériel et de l'orienter spécifiquement vers les composantes des programmes d'études dont le ministre définit les objectifs, les standards et les activités d'apprentissage. L'instauration d'«examens nationaux» a été proposée par certains intervenants. On n'a pas manqué non plus de vanter les mérites des examens pratiqués, par exemple, au Baccalauréat international, et de souligner leur pouvoir de stimulation, voire les complicités nouvelles qu'ils suscitent, les étudiantes et les étudiants s'y préparant avec les enseignantes et les enseignants, si l'on peut dire. Dans un régime où les programmes sont, dans leur base même, des programmes «nationaux» et où des éléments importants sont définis centralement, on comprend aisément le pouvoir d'attestation d'épreuves uniformes permettant de vérifier, par-delà les diversités institutionnelles, la maîtrise de certains objectifs communs et l'atteinte de certains standards communs. L'esprit et les visées du renouveau proposé ne militent évidemment pas en faveur d'un véritable système d'épreuves uniformes. Outre que la gestion en serait lourde et les vertus forcément limitées - on n'oubliera pas qu'on s'en est naguère affranchi avec conviction et que, là où il existe, on s'interroge sur son avenir -, un tel système nous rapprocherait davantage du secondaire que du postsecondaire. De manière beaucoup plus ciblée, c'est d'abord l'actuel «test de français» qui, lorsque cela pourra être fait pour les deux langues d'enseignement, pourrait évoluer vers une épreuve portant sur les objectifs et les standards propres au collégial en langue d'enseignement et littérature. C'est donc un champ restreint d'application qui serait visé par le maintien des dispositions légales relatives aux examens. L'institution d'une Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. La volonté convergente de renforcer le dispositif d'évaluation externe peut se comprendre comme la résultante de deux évolutions observables dans les milieux collégiaux et chez celles et ceux qui s'intéressent à l'enseignement collégial. D'une part, on reconnaît généralement que la création du Conseil des collèges et de sa Commission de l'évaluation a permis, depuis 1979, des progrès importants dans les pratiques d'évaluation, mais que ces progrès plafonnent - structurellement, et non par la faute des responsables et qu'un mécanisme plus rigoureux s'impose maintenant, davantage accordé à la plus grande autonomie académique jugée souhaitable pour les collèges. D'autre part, la stratégie ministérielle d'évaluation des dernières années a largement contribué à accroître la conscience de la nécessité de changements importants: établissement d'un lien entre l'adoption d'une politique institutionnelle d'évaluation des apprentissages et l'octroi des diplômes, publication de séries d'indicateurs institutionnels de performance, instauration d'un test de français pour les candidates et candidats à l'université, expérimentation d'une épreuve synthèse en sciences humaines et en mathématique, expérimentation de l'évaluation institutionnelle des programmes d'études dispensés, etc. Le statut proposé pour la nouvelle commission rompt avec la structure familière d'un groupe de type représentatif. Il confie plutôt l'organisme à trois commissaires, nommés par le gouvernement sur recommandation du ministre responsable et clairement mandatés pour évaluer, c'est-à-dire porter un jugement formel de qualité sur la manière dont les collèges remplissent leurs responsabilités académiques. La Commission exercerait ainsi un pouvoir déclaratoire de caractère essentiellement public, assorti d'un pouvoir de recommandation à l'adresse des collèges (changements à des politiques institutionnelles, changements à des manières de dispenser des programmes, etc) et à l'adresse du ministre (changements possibles aux objectifs mêmes de certains programmes, délégation possible du pouvoir de décerner le DEC, etc). La Commission aurait pour mission d'évaluer, dans chacun des collèges d'enseignement général et professionnel et dans chacun des établissements d'enseignement public ou privé auquel s'applique le Régime des études collégiales: les politiques institutionnelles d'évaluation des apprentissages, y compris les procédures de sanction des études, et la mise en application effective de ces politiques et procédures; les politiques institutionnelles d'évaluation relatives aux programmes d'études et la mise en application effective de ces politiques; la mise en oeuvre des programmes d'études établis par le ministre, compte tenu des objectifs et des standards qui leur sont assignés; les objectifs, les standards et la mise en oeuvre des programmes d'études établis par le collège, compte tenu des besoins qu'ils ont pour fonction de satisfaire. Une telle évaluation des politiques institutionnelles et, surtout, des programmes d'études tels qu'ils sont offerts couvre, en fait, un vaste ensemble de réalités institutionnelles, y compris l'enseignement et sa gestion, l'organisation pédagogique, la maîtrise des apprentissages par les étudiantes et les étudiants, voire la performance des diplômés sur le marché du travail ou leurs résultats à l'université. L'évaluation des programmes effectivement offerts est toujours aussi, à sa manière, une évaluation de l'établissement et de ses pratiques. La Commission s'y livrerait selon les procédures connues et largement pratiquées en enseignement supérieur: questionnaires et démarches auto-évaluation, assignation d'experts oeuvrant dans les domaines appropriés, visite des établissements, rapport préliminaire, réactions de l'établissement et discussions, rapport final, etc. Comme dans les organismes de ce genre, le personnel permanent assurerait le déroulement des opérations de base, et non l'évaluation elle-même. Quant à l'hypothèse de l'instauration d'un système d'accréditation proprement dite, elle n'a pas été retenue, parce qu'incompatible avec un système où le ministre continue d'approuver et d'autoriser les programmes d'études et de décerner les diplômes. Les systèmes d'accréditation émergent normalement du regroupement d'établissements ayant pleine autorité sur leurs programmes et sur leurs diplômes. En revanche, la dynamique enclenchée par la définition de nouvelles responsabilités académiques pour les collèges et par la délégation possible de la capacité de décerner le diplôme national pourrait éventuellement rendre pensable de franchir de nouveaux pas vers une autonomie plus grande. La création de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial obligerait à réaménager l'exercice de la fonction consultative en enseignement collégial, plus spécifiquement à disposer de la nouvelle situation faite au Conseil des collèges. La solution mise de l'avant est d'abolir le Conseil des collèges et de confirmer le mandat qu'a déjà le Conseil supérieur de l'éducation en matière d'enseignement collégial. Cependant, deux mesures permettraient d'assurer la visibilité de la fonction consultative en enseignement collégial et le maintien d'une obligation gouvernementale de consultation sur les questions pédagogiques fondamentales. Ainsi, la Commission de l'enseignement collégial du Conseil supérieur serait rétablie et l'obligation de soumettre dorénavant le Régime des études collégiales à l'avis du Conseil supérieur serait inscrite dans la loi. Une délégation possible du pouvoir de décerner le DEC. Il a été fait ci-haut mention du pouvoir qu'aurait la nouvelle Commission d'évaluation de l'enseignement collégial de recommander, au terme d'une opération d'évaluation, que le collège concerné soit habilité à décerner lui-même le Diplôme d'études collégiales (DEC). Corrélativement, le ministre aurait donc dorénavant le pouvoir de déléguer à un collège, sur recommandation expresse de la Commission, tout ou partie de sa responsabilité de décerner le DEC. Nous disons bien le DEC, car ce n'est pas d'un diplôme institutionnel qu'il s'agirait alors, mais bien de la capacité pour un collège d'attribuer lui-même l'«appellation d'origine contrôlée», si l'on peut se permettre cette analogie pour le Diplôme d'études collégiales. Adaptée à nos dispositifs de programmes et de sanction, cette nouvelle provision est apparue comme une manière progressive, réaliste et pédagogique d'évoluer vers un système qui allie sanction par l'établissement et mécanisme d'évaluation externe des établissements. On est en droit d'attendre beaucoup d'une telle incitation essentiellement basée sur la qualité publiquement reconnue: à tout le moins, un puissant stimulant à la prise en charge d'une plus grande autonomie académique, ainsi que le vise le présent renouveau. La poursuite des activités ministérielles d'analyse du système. Le Ministère prépare et publie régulièrement des recueils de données ou d'indicateurs, de même que des études sur des phénomènes généraux (données sur l'accès et la diplomation, changements de programmes, relances, etc). Il intervient aussi par des programmes spécifiques de soutien (amélioration du français, PAREA, etc). Ces travaux s'inscrivent dans la réalisation de ses responsabilités d'ensemble sur l'évolution du système d'enseignement collégial et leurs résultats peuvent servir aux différents intervenants de toile de fond pour situer leur propre action et, à lui-même et au gouvernement, comme informations de base pour orienter leur action. Ces travaux seraient poursuivis, avec les mêmes visées et dans les mêmes perspectives. Le Conseil supérieur de l'éducation: un mandat confirmé en enseignement supérieur. Dans l'esprit de son mandat propre et au niveau qui caractérise ses interventions, le Conseil supérieur de l'éducation est également appelé à participer à l'évaluation de l'état et des besoins de l'enseignement collégial. Ce regard externe, porté sur l'enseignement collégial par un organisme mandaté pour l'ensemble du système d'éducation, est de nature à éclairer et à soutenir le Ministère et l'ensemble des acteurs de l'enseignement collégial dans la conduite de leurs actions propres. Il doit être considéré ici comme une composante majeure du dispositif global de vigilance destiné à accompagner la marche des collèges vers une plus grande autonomie académique. Ce rôle deviendrait d'autant plus important que, avec l'abolition du Conseil des collèges et du Conseil des universités, le Conseil supérieur de l'éducation serait dorénavant le seul organisme consultatif en éducation. Les collèges et le Ministère ont beaucoup à tirer des approches et des analyses d'un organisme autorisé qui, en plus de traiter des questions propres au collégial, s'emploie, par sa mission même, à les situer par rapport aux deux ordres d'enseignement dont le collège doit assurer la jonction, le secondaire et l'universitaire, et par rapport à l'ensemble de la mission éducative. 3-4 Des partenariats renouvelés et resserrés. C'est sous de multiples aspects que le collège québécois est engagé dans des rapports de partenariat. Structurellement même, en raison de sa mission et de la place qu'il occupe dans le système d'éducation, son action doit constamment s'articuler à celle d'autres intervenants majeurs. L'histoire des vingt-cinq dernières années a d'ailleurs confirmé la profondeur d'un partenariat qui rejoint le tissu social et régional profond du Québec. Une des cibles stratégiques majeures du renouveau proposé concerne justement ces partenariats, qu'il importe de renouveler et de resserrer, à la faveur de voies d'actions qui sont exposées ici succinctement. La mission du collège: le cadre d'un partenariat fondamental avec la société québécoise. C'est la mission des collèges qui établit le cadre général de tous les partenariats, parce qu'elle est elle-même au centre du partenariat fondamental qui lie les collèges à la société québécoise. Le renouveau proposé appelle, de soi, une nouvelle confirmation de cette mission: c'est ce que fait le projet de loi déposé, qui établit cette mission comme une mission de formation, à la fois et indissociablement dans des programmes de type préuniversitaire conduisant à l'université et dans des programmes de type technique conduisant principalement au marché du travail. Voilà qui dispose clairement les balises de tous les engagements des établissements et qui permet de juger de leur pertinence et de leur compatibilité. Cette mission fondamentale, la société québécoise a invité les collèges, au cours des vingt-cinq dernières années, à la déployer selon des dimensions dont toutes n'avaient pas été prévues à l'origine, mais qui, toutes, s'y rattachent légitimement et permettent d'en réaliser des facettes importantes. C'est pourquoi il est proposé que les pouvoirs du collège s'exercent aussi dans des activités de formation de la main-d'oeuvre, de recherche, de transfert de technologie, d'aide à l'entreprise, de développement régional, de services à la communauté et de coopération internationale. Toutes ces activités prolongent ou appuient la mission fondamentale de formation et y trouvent leur justification ultime et leur principe intégrateur. La mission fondamentale de formation n'est absolument pas, pour les collèges, une mission parmi d'autres, si louables soient-elles. C'est essentiellement à elle que, à travers l'ensemble de leurs activités, les collèges doivent se consacrer. Et c'est elle qui donne sens à toutes leurs activités. Il n'est pas sans signification que le renouveau proposé le réaffirme clairement. Le conseil d'administration: le lieu du premier partenariat institutionnel. En instituant les cégeps en corporations publiques, le Québec a voulu, dès l'origine, marquer l'importance du partenariat fondamental évoqué plus haut et, plus immédiatement, celle des liens du collège avec une communauté, locale et régionale, d'appartenance. En même temps qu'on réaffirme la mission des collèges, il y a lieu de traduire plus clairement, dans la composition même du conseil d'administration, ce lien d'appartenance aux collectivités qu'ils desservent plus immédiatement. Il est donc proposé de rendre majoritaire la représentation des membres externes, tout en maintenant la participation des personnels et des étudiantes et des étudiants du collège. Ces nouveaux besoins de représentation ne devraient pas être satisfaits par la simple addition de postes au sein du conseil. En effet, à vingt, le nombre de membres est déjà élevé. Il pourrait donc être ramené à dix-huit, dont onze de l'externe. La composition proposée est la suivante: deux membres nommés après consultation des groupes socio-économiques du territoire desservi; un membre désigné parmi les personnes proposées par le conseil régional de la Société régionale de développement de la main-d'oeuvre de la région où est situé le collège; un membre nommé parmi les personnes proposées par les universités du territoire desservi et un, parmi les personnes proposées par les commissions scolaires de ce territoire; deux membres nommés parmi les personnes oeuvrant au sein des entreprises de la région ayant leurs activités dans les secteurs économiques correspondant aux programmes d'études techniques offerts par le collège; deux diplômés du collège, dont l'un du secteur préuniversitaire et l'autre du secteur technique; deux parents qui ne font pas partie du personnel du collège, élus par leurs pairs; deux étudiantes ou étudiants du collège, dont l'une ou l'un du secteur préuniversitaire et l'autre du secteur technique, nommés conformément à la Loi sur l'accréditation et le financement des associations d'élèves ou d'étudiants; trois membres du personnel du collège ne faisant pas partie du personnel cadre, élus par leurs pairs; la directrice générale ou le directeur général et la directrice ou le directeur des études. Les étudiantes et les étudiants: des partenaires qui sont aussi la raison d'être des collèges. Les étudiantes et les étudiants sont au centre de toute l'action éducative. Dans un cheminement de formation, il n'y a pas de consommateur ou de «client» passif: celles et ceux qui se forment sont les premiers agents de leur formation. En accroissant l'engagement institutionnel dans les réalités académiques, particulièrement dans l'administration des programmes d'études, le renouveau proposé comporte, dans ses visées mêmes, une incitation à associer les étudiantes et les étudiants autour de tâches qui les concernent au premier chef: les plans de formation, en quoi consistent les programmes d'études. Après tout, dans la vie quotidienne d'un établissement, les programmes d'études ne sont-ils pas ce qui rassemble effectivement les divers partenaires autour d'un projet commun et les confronte ensemble aux mêmes objectifs et aux mêmes standards? Le programme «réel», n'est-ce pas finalement un groupe de personnes travaillant ensemble à l'atteinte des mêmes objectifs? Dans des établissements exerçant de plus grandes responsabilités académiques, la présence prévue des étudiantes et des étudiants à la Commission des études et au conseil d'administration devrait pouvoir s'articuler à une présence active dans l'ensemble des lieux qui assurent la gestion institutionnelle de l'approche programme. Avec le secondaire: une carte intégrée des enseignements professionnels et techniques. Les collèges partagent avec les commissions scolaires une mission essentielle dans le dispositif québécois de formation professionnelle et technique. Leurs programmes de formation s'articulent dans bien des cas; ils se recoupent partiellement dans certains cas; les passerelles manquent dans certains autres. Dans la foulée des travaux qui ont permis de se doter d'instruments communs d'information sur les programmes de formation professionnelle et technique - guide détaillé et répertoire déjà disponibles, dépliants et magazine grand public disponibles sous peu -, une carte intégrée des enseignements professionnels et techniques sera établie de concert avec le ministère de l'Éducation et servira de guide aux développements futurs en matière de programmes d'études. Les travaux techniques de base sont déjà en cours et devraient conduire sous peu à des résultats concrets. C'est d'ailleurs déjà à la lumière de ces travaux communs que sont nés des projets de centres conjoints de formation. Avec les universités, un lieu de liaison et des projets conjoints. Comme il en a été fait état au sujet des programmes d'études préuniversitaires, c'est essentiellement autour des programmes d'études que des liens plus fonctionnels sont appelés à s'établir entre les collèges et les universités. Dans certaines régions, ces liens vont déjà jusqu'à des actions communes de promotion et d'organisation de l'enseignement supérieur; ailleurs, ce sont des protocoles formels liant les uns et les autres dans des engagements concertés. Les projets mis de l'avant par le Comité de liaison de l'enseignement supérieur associent des équipes d'enseignantes et d'enseignants des établissements des deux ordres d'enseignement dans des démarches concrètes d'expérimentation de programmes d'études en plus grande continuité. Ces travaux se continueront dans le cadre du Comité de liaison, qui devra également s'attaquer sous peu aux enjeux de jonction dans le secteur technique, où près de 20 % des diplômés passent actuellement aussi à l'université. Avec les employeurs et les autres partenaires: un comité national des programmes d'études techniques. Pour répondre au besoin qu'ont identifié les collèges et des groupes d'employeurs, il est proposé d'instituer un comité national de concertation portant sur les programmes d'études techniques, notamment pour tout ce qui a trait à la définition et à la validation des objectifs et des standards des composantes spécifiques aux programmes d'études techniques, à l'opportunité d'élaborer et de réviser des programmes d'études techniques et à leur répartition géographique. Chacun dans l'exercice de ses responsabilités propres, Ministère, collèges, employeurs, syndicats, intervenants gouvernementaux au premier chef, dans le domaine de la main-d'oeuvre - et autres intervenants concernés y siégeraient à titre de partenaires ayant un champ propre d'action et de décision. Le ministre s'engagerait, avant de prendre les décisions qui lui reviennent, à y faire examiner les projets de définition d'objectifs et de standards des programmes, les calendriers d'élaboration ou de révision des programmes, de même que tout projet de nouvelles autorisations de programmes. Il ne s'agirait donc pas d'une instance consultative chargée d'aviser les autorités constituées, mais bien d'un lieu où, dans le respect du champ de décision propre à chacun, des partenaires acceptent d'examiner un certain nombre de questions d'intérêt commun en matière de programmes d'études techniques. Une telle instance doit forcément rassembler des personnes habilitées à prendre des décisions ou très proches des centres de décision. Elle ne s'engagerait pas elle-même dans les travaux d'ordre technique devant soustendre et éclairer ses échanges. Mais, elle pourrait prendre l'initiative de lancer et de superviser de tels travaux. Elle serait présidée par le ministre ou son représentant. Une telle instance n'aurait pas davantage à se substituer à tous ces lieux de concertation et de collaboration qui, autour des établissements ou de projets circonscrits, assurent les jonctions entre les collèges et le monde de l'entreprise, tels les comités collège-entreprise ou autres instances locales de concertation, voire ces mécanismes de liaison que l'ensemble des collèges et d'autres organismes pourraient décider de se donner. Elle situerait d'emblée ses actions au niveau des orientations d'ensemble, assumant et élargissant ainsi la portée de certaines questions qui étaient jusqu'ici examinées à la Commission de l'enseignement professionnel du Conseil des collèges. Avec la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre: une participation engagée. La Loi créant la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre prévoit qu'une personne représentant le milieu de l'enseignement collégial est nommée membre de la Société. Elle prévoit aussi qu'un membre du conseil régional de chaque société régionale provient du milieu des établissements d'enseignement de niveau collégial et est nommé après consultation des milieux concernés. Par ailleurs, ainsi qu'on l'a mentionné plus haut, une personne proposée par le conseil régional de la Société régionale de développement siégerait dorénavant au conseil d'administration du cégep. Ces provisions sont prometteuses, en ce qu'elles institutionnaliseront, au centre comme dans toutes les régions du Québec, la collaboration et la participation des uns et des autres aux programmes et aux dispositifs de développement de la main-d'oeuvre. Intervenants majeurs dans la formation elle-même, les collèges seront ainsi mieux à même d'engager des liens de coopération efficaces et harmonieux avec ces nouvelles instances paragouvernementales. Les collèges sont dès lors invités à s'y engager avec la volonté d'assurer la cohérence des services offerts à la population et de contribuer à clarifier et à simplifier des pratiques dont trop d'usagers déplorent encore la lourdeur et la complexité. Pour stimuler le partenariat avec l'entreprise: les stages et la formation en alternance. Il y a pratiquement unanimité sur la nécessité d'une formation technique qui comporte des stages en entreprise, voire qui s'organise sur le mode de l'alternance études-travail. On cite même volontiers l'exemple de certains pays européens particulièrement avancés en ce domaine. Mais, en raison de la structure industrielle du Québec et des traditions des entreprises qui y prévalent, et sans qu'on puisse dénoncer quelque mauvaise volonté que ce soit, il arrive qu'on ait plus de stagiaires potentiels que de lieux de stages. Et quand ces lieux sont disponibles, il arrive qu'on réussisse difficilement à s'occuper efficacement des stagiaires. Il y a beaucoup à faire pour que les entreprises accueillent plus de stagiaires et participent activement à la formation, dans le cadre pédagogiquement irremplaçable de l'entreprise elle-même. Beaucoup à faire aussi pour que les milieux d'enseignement aient le réflexe de penser collaboration avec les entreprises. Les propos entendus en commission parlementaire témoignent de ce que collèges et entreprises sont tout à fait disposés à accroître une coopération axée sur la formation, comme on en observe dans les cas où elle est solidement amorcée. Les liens qui se tissent actuellement à la faveur des opérations de définition des programmes selon la méthode dite « par compétences », de même que ceux qui se noueront au Comité national des programmes d'études techniques, devraient de plus en plus avoir des suites dans la mise en oeuvre de ces programmes dans les collèges. Le renouveau proposé invite à aller plus avant dans cette direction. La consolidation et l'expansion des centres collégiaux de transfert de technologie. Selon le nouveau nom proposé pour les centres spécialisés actuels, le réseau des centres collégiaux de transfert de technologie sera consolidé et graduellement étendu. Actifs et hautement performants dans toutes les régions du Québec, ces centres rendent aux entreprises des services appréciés et sont engagés dans de très importantes activités de formation, de recherche appliquée et de transfert de technologie. Ce faisant, ils assurent des retombées positives pour les programmes d'études techniques autour desquels ils prennent naissance et s'articulent. Trois nouveaux centres viennent d'être créés, au terme d'un processus rigoureux d'évaluation des candidatures: un en aérospatiale au Cégep Édouard-Montpetit, un en électrochimie au Cégep de Shawinigan et un en agroalimentaire au Cégep de Saint-Hyacinthe, ce dernier en association avec l'Institut de technologie agroalimentaire et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Les dix-huit centres actuels forment un réseau qui oeuvre dans des créneaux correspondant à des grappes industrielles désignées. De nouveaux champs pour les partenariats entre les collèges. La mise en oeuvre du renouveau proposé conduirait les collèges à s'engager dans des domaines où ils ont acquis des expertises inégales et où ils auraient aussi à assumer certaines tâches nouvelles, notamment en ce qui touche les programmes d'études. Ainsi, ils auraient à déterminer des activités d'apprentissage pour de nombreux programmes, à présenter aux étudiantes et aux étudiants les programmes effectivement donnés chez eux, à élaborer des politiques d'évaluation des programmes, à instaurer des épreuves synthèses, etc. Ce sont des tâches exigeantes pour chaque collège, surtout si chacun devait agir seul. Bien sûr, c'est progressivement que ces dispositions se mettraient en place et on peut penser que les outils existants, notamment les Cahiers de l'enseignement collégial et les libellés des programmes actuels, évolueraient peu à peu vers la configuration découlant des orientations proposées. Mais les collèges auraient tout intérêt à conjuguer leurs efforts dans des champs d'action qu'ils ont, collectivement du moins, encore peu investis. Le Ministère serait disposé à les aider dans cette voie. Entre le Ministère et les collèges, une dynamique renouvelée en matière de programmes d'études. La nouvelle répartition des responsabilités académiques relatives aux programmes d'études exige, de soi, un renouvellement des méthodes de travail des uns et des autres en ces matières. En effet, on voit mal que, même si la responsabilité ministérielle doit ultimement s'y exercer, le Ministère travaille seul de son côté à définir des objectifs et des standards, pendant que les collèges attendraient de pouvoir y ajuster leurs activités d'apprentissage. Tout comme on n'imaginerait pas que les collèges n'associent pas leurs personnels à la détermination de ces activités d'apprentissage. C'est donc à une dynamique plus interactive que le Ministère et les collèges sont clairement conviés, ces derniers étant appelés - et résolus, d'ailleurs - à occuper leur place dans l'élaboration et la révision des programmes d'études. Cette nouvelle dynamique est déjà à l'oeuvre dans les travaux conjoints entrepris sous l'égide du Comité de liaison de l'enseignement supérieur; et c'est celle qu'on entend voir se développer au Comité national des programmes techniques. Mais elle doit aussi inspirer la mise au point des objectifs et standards de formation générale commune, une opération qui devrait se réaliser très bientôt en vue d'une première implantation en août 1994. Le Ministère et les collèges devront convenir à cet égard des modalités et d'un lieu appropriés de collaboration. 4 L'implantation du renouveau: Principes d'action et calendrier. Le renouveau proposé comporte un important ensemble de mesures, dont plusieurs entraîneraient des changements importants dans les pratiques et donc, au premier chef, pour les personnes des collèges. C'est pour cela que le traitement des questions liées aux ressources humaines et le réalisme du calendrier d'implantation importent ici tout autant que la pertinence des objectifs visés. Qu'en est-il du «comment» du renouveau, en somme? Les deux sections qui suivent présentent l'essentiel des orientations retenues et des mesures envisagées. 4-1 Les agents du renouveau: Principes d'action. La mise en oeuvre du renouveau proposé comporte des impacts sur les personnels. Certains de ces impacts sont de portée générale: il s'agit des changements que les divers acteurs seraient appelés à introduire dans leurs pratiques, voire dans les cadres de leur action. D'autres concernent plus spécifiquement certains groupes de personnels plus directement affectés dans le contenu de leur tâche et le mode de leur contribution aux activités du collège. Quelques principes et indications sont énoncés ici à titre de perspectives pour l'action ministérielle et institutionnelle. Miser sur les compétences des directions et des personnels des collèges. Le renouveau proposé prône essentiellement une prise en charge accrue de l'enseignement collégial par les établissements qui ont mandat de le dispenser, les collèges eux-mêmes. Il y a des moments où l'on doit être prêt à assumer des responsabilités et des autonomies plus grandes: les directions des collèges se sont clairement déclarées prêtes à franchir des pas importants dans cette direction et, dans les personnels des collèges, les voix ne manquent pas pour réclamer de plus grandes marges de manoeuvre et moins d'interventions ministérielles directes. Il y a là le signe d'une maturité qu'il est temps d'honorer. On l'a souligné au passage, les nouvelles tâches académiques à assumer comportent d'importants défis pour les collèges. Mais c'est essentiellement dans ces derniers que seront puisées les compétences nécessaires. Le Ministère est tout à fait disposé à collaborer avec les collèges et à convenir avec eux de certains mécanismes d'accompagnement - lesquels, paradoxalement et comme toujours, devront nécessairement faire appel ...aux ressources du réseau. Mais on évitera d'implanter la présence et l'action ministérielles là-même d'où le Ministère est d'ores et déjà prêt à se retirer. La responsabilisation institutionnelle doit commencer sur le bon pied. Réaliser le renouveau proposé avec les personnels en place. Ce principe est fondamental, et il a une signification au moins double. Il signifie d'abord - bon sens et saine gestion obligent - que, pour les nouveaux enseignements et pour les nouvelles pratiques, l'on recourra aux personnels en place et à leurs compétences. Pour dispenser les nouveaux enseignements, certes, mais aussi pour leur élaboration et leur mise au point. Les enseignantes et les enseignants et leurs instances seraient, au premier chef, associés aux collèges et consultés sur la définition des objectifs et des standards dont le ministre a la responsabilité. Et les collèges feraient évidemment de même pour l'accomplissement des tâches devenues leurs. Plus fondamentalement, ce principe d'action indique un esprit et une approche de la gestion du changement: le renouveau proposé doit progressivement devenir celui des acteurs de première ligne et susciter dès lors leur adhésion et leur engagement, à défaut de quoi d'importants pans de l'ensemble pourraient bien produire des résultats fort limités. L'expérience récente de l'implantation du nouveau programme de sciences humaines s'est essentiellement inspirée de ce principe et, selon de nombreux témoignages entendus, on a réussi à y susciter des regroupements d'énergie particulièrement féconds. Certes, il aura fallu pour cela convenir d'assouplissements dans certaines pratiques, mais tout indique qu'il y a maintenant lieu de s'en féliciter. Implanter le renouveau proposé dans le respect des conventions collectives en vigueur. Aucun élément du renouveau proposé n'entraîne, de soi, des modifications aux conventions collectives en vigueur. Il n'y a donc aucun « nouveau mandat » qui en découle. Le renouveau s'implanterait dans le respect des conventions collectives en vigueur. Cela signifie que les règles présidant à la définition des tâches, à l'affectation des personnels, aux délais de modifications de programmes, aux changements dans les autorisations de programmes et au fonctionnement des départements continueraient de s'appliquer. D'évoluer aussi, si les parties en conviennent éventuellement, mais sans que cela soit exigé par le renouveau proposé. De même, les clauses locales concernant la Commission pédagogique seraient respectées et c'est localement que serait géré le passage de la Commission pédagogique à la Commission des études, si les parties décidaient effectivement de procéder à une substitution plutôt qu'à une instauration parallèle. De même aussi, les modifications progressivement apportées aux Cahiers de l'enseignement collégial tiendraient compte, comme il se doit, des clauses des conventions collectives qui s'y rapportent, notamment au sujet du champ d'application, des stages et ateliers, de la liste des disciplines et du calcul de la charge individuelle de travail. En philosophie et «Humanities», un niveau d'affectation pratiquement inchangé. Le régime des études proposé comporte une diminution formelle des cours de philosophie et de « Humanities », qui passeraient de quatre à trois. Mais la nature des cours de formation générale complémentaire et les principes mis de l'avant pour la gestion du renouveau conduiraient les collèges à offrir au moins un de ces cours, vraisemblablement davantage, aux enseignantes et aux enseignants de ces disciplines. Et l'on n'oubliera pas que le réseau collégial est actuellement en période de croissance des effectifs étudiants, ce qui crée automatiquement des postes dans les matières obligatoires. Les mises en disponibilité qui seraient initialement décidées auraient donc un caractère plus technique et formel que réel et effectif. Il est prévisible que des charges normales seraient rapidement reconstituées pour l'ensemble des enseignantes et des enseignants permanents actuels. Les collèges seraient d'ailleurs incités à gérer en ce sens et un suivi ministériel serré serait assuré. En éducation physique, des réaffectations nécessaires et accompagnées. C'est en éducation physique que le régime des études proposé entraînerait les impacts les plus significatifs sur la tâche et l'emploi des enseignantes et des enseignants de cette discipline, puisqu'on y effectuerait une réduction de 50 % et que les cours de formation générale complémentaire n'offriraient pas de nouveaux créneaux d'activités dans ce secteur. Il est donc à prévoir que la moitié des enseignantes et des enseignants d'éducation physique devraient être mis en disponibilité, et sans que cela puisse être pour tous purement technique ou temporaire. Les collèges auraient à examiner, de concert avec les premiers intéressés, chacune des situations individuelles. Les enseignantes et les enseignants mis en disponibilité seraient d'abord invités à participer aux efforts institutionnels déployés pour accroître l'encadrement pédagogique des étudiants, notamment dans le cadre des sessions d'accueil et d'intégration dont il a déjà été question: leurs compétences pédagogiques et leur expérience de présence auprès des étudiantes et des étudiants pourraient y être d'un très précieux apport. D'autres pourraient être affectés à l'encadrement pédagogique des activités physiques et sportives auxquelles les étudiantes et les étudiants vont continuer d'être invités à s'adonner, les plateaux d'activité physique demeurant à leur disposition. Dans certains cas, d'autres qualifications professionnelles non reliées à l'éducation physique pourraient permettre des réaffectations dans d'autres disciplines; il arrive, en effet, que des enseignantes et des enseignants aient plus qu'un type de qualification à leur dossier. D'autres, encore, pourraient avoir déjà à leur crédit des intérêts ou des éléments de formation auxquels il pourrait être indiqué de donner suite dans un plan de recyclage réalisable dans un temps raisonnable. D'autres, enfin, pourraient décider d'oeuvrer en éducation physique dans des lieux et des organismes à l'extérieur du réseau collégial, l'attrition continuant de s'exercer normalement. Ici aussi, les collèges seraient incités à gérer avec soin et un suivi ministériel serré serait assuré. Des politiques de gestion des ressources humaines et des budgets de perfectionnement. Toujours stratégiques, mais sans doute plus encore en période de changement et de renouvellement, la gestion et le développement des ressources humaines doivent être au centre du renouveau, tout comme ils devraient l'être au sein de collèges plus autonomes et exerçant plus de responsabilités académiques. Il est donc prévu de faire obligation à chaque collège d'adopter une politique de gestion de ses personnels qui, dans le respect des conventions collectives en vigueur, couvre les aspects essentiels et interdépendants que sont les exigences à l'embauche, l'évaluation du rendement et le perfectionnement. Particulièrement important au cours des années de l'implantation du renouveau, le perfectionnement des personnels pourrait aussi être assumé localement. Aussi, au fur et à mesure de l'adoption de ces politiques institutionnelles, le Ministère est-il disposé à transférer aux collèges les sommes allouées au perfectionnement qu'il gère actuellement lui-même. Plus proches des besoins et en concertation avec les instances locales, les collèges pourraient ainsi, conformément à leur souhait répété, utiliser efficacement ces nouvelles ressources pour soutenir l'implantation du renouveau proposé. Conclusion. Tel est le renouveau proposé pour les collèges québécois, à ce moment-ci de leur développement. Confirmation des acquis essentiels, relance de la mission et des objectifs à poursuivre, nouveaux défis d'engagement éducatif et de responsabilité académique, évaluation plus rigoureuse et plus transparente, renouvellement et renforcement des partenariats essentiels: le chantier est vaste. Le chantier est vaste, mais nécessaire et exaltant. Nécessaire, parce que, rénovés en profondeur comme l'ont réclamé de multiples voix, les collèges font manifestement partie des instruments grâce auxquels se construira le Québec du XXIe siècle. Exaltant aussi, parce qu'il n'y a pas de tâche plus motivante et plus déterminante que celle qui mise résolument sur le potentiel des générations montantes. La présente proposition constitue un appel à toutes celles et à tous ceux qui, acceptant de se tourner vers l'avenir, sont prêts à mettre l'épaule à la roue pour que soit réussie la prochaine étape de l'histoire de nos collèges. L'accès à la culture et à la compétence en est l'enjeu, pour les jeunes et pour toutes celles et tous ceux qui, comme eux, comptent sur un enseignement collégial solide et reconnu.