*{ Gouvernement fédéral canadien. Budget Fédéral 1990 } Depuis 1984, ce gouvernement suit un programme cohérent et complet qui devrait permettre aux Canadiens de bénéficier d'une qualité de vie et d'une hausse de niveau de vie sans équivalent dans le monde. L'un des pivots de ce programme a été la reprise en main des finances de la nation. Nous avons accordé à cet objectif une importance tout à fait prioritaire. En effet, son atteinte nous assurera d'une plus grande marge de manoeuvre et d'une plus grande liberté d'action pour faire face aux priorités de notre gouvernement et des Canadiens. L'an dernier, j'ai exposé un plan de réduction du déficit sur cinq ans afin d'atteindre cet objectif. Ce plan constituait, et continue de représenter, la voie à suivre. A $ 30,5 milliards, le déficit du présent exercice est conforme aux prévisions. Cependant, les progrès futurs sont compromis par des tensions inflationnistes bien ancrées dans l'économie. Je demande aujourd'hui aux Canadiens de nous appuyer en participant à un large programme qui renforcera nos efforts de compression des dépenses publiques. Ce programme nous permettra de maintenir le cap sur la réalisation des objectifs que j'ai exposés dans mon dernier budget: - Nous ramènerons le déficit à $ 28,5 milliards l'an prochain. - Nous le diminuerons de moitié pour l'abaisser à $ 14 milliards au cours des trois années suivantes. - Nous le réduirons encore afin de le ramener à $ 10 milliards l'année suivante. Cela signifie que, dans cinq ans, le gouvernement commencera à rembourser ses obligations et bons du Trésor. Le pays sera nettement engagé sur le chemin d'une diminution appréciable de la dette publique. J'ai indiqué l'an dernier que, pour chaque dollar de recettes perçues par le gouvernement, les frais d'intérêt sur notre dette représentaient 35 cents, et étaient en augmentation. Il s'agit là de fonds que nous ne pouvons utiliser maintenant pour réduire les impôts ou satisfaire des priorités comme la protection de l'environnement, la recherche-développement et la formation professionnelle. Nous devons payer ces frais d'intérêt. Dans ce budget, j'indiquerai comment, au cours des cinq prochaines années, nous pourrons ramener ces 35 cents à 26 cents - et poursuivre cette baisse. La diminution des paiements d'intérêt en proportion de nos recettes accroîtra notre capacité de répondre aux aspirations des Canadiens. Voilà une importante raison de réduire notre déficit. Il existe plusieurs autres raisons, non moins importantes. Chaque dollar de déficit supplémentaire aujourd'hui alourdit la dette imposée aux générations futures. Nous avons une responsabilité envers nos enfants et nos petits-enfants: celle de bâtir pour eux, et non d'emprunter sur leur dos. La réduction du déficit fédéral contribuera à atténuer les tensions inflationnistes. Cela facilitera la baisse des taux d'intérêt. La réduction du déficit fédéral rendra le Canada moins dépendant des sources de financement étrangères. Elle renforcera notre indépendance nationale. Voilà autant de raisons convaincantes pour nous en tenir au programme mis en oeuvre en 1984. Bien des progrès ont été accomplis depuis cette date. Nous avons sensiblement réduit le poids de l'administration publique. Les dépenses consacrées à l'ensemble des programmes et services fédéraux ont progressé beaucoup moins vite que l'économie, et même plus lentement que l'inflation. Nous avons réduit les effectifs de la fonction publique de 12 000. La fonction publique est maintenant revenue à sa taille de 1973, bien que la population du Canada ait augmenté d'environ un cinquième. Dans l'ensemble, les dépenses de fonctionnement de l'État sont maintenant moins élevées qu'elles l'étaient en 1984. Lorsque nous sommes entrés en fonction, le gouvernement fédéral dépensait $ 16 milliards de plus pour ses programmes - c'est-à-dire, toutes les dépenses moins les frais d'intérêt - qu'il ne percevait de recettes. Aujourd'hui, nos dépenses de programmes sont inférieures de $ 9 milliards à nos recettes. Nous avons transformé un déficit de fonctionnement en excédent - réussissant un redressement de $ 25 milliards en cinq ans seulement. De plus, 70 pour cent de ces progrès sont imputables non à l'augmentation des recettes, mais à la compression des dépenses. Ces progrès ont été enregistrés au prix d'une réduction des dépenses de programmes en proportion de l'économie, qui sont revenues à leur plus faible niveau en près de 20 ans. Les Canadiens savent que ces progrès n'ont pas été sans peine. Ils ont ressenti les effets des mesures rigoureuses mais nécessaires qu'il fallait prendre pour protéger et renforcer l'avenir du Canada. Nos décisions se sont traduites par une adaptation difficile pour bien des Canadiens, mais les résultats économiques en valaient la peine. L'économie a enregistré une expansion pendant sept années consécutives. L'emploi a fortement progressé. Les revenus après impôt ont augmenté. Les possibilités économiques ont été élargies. La pauvreté a été combattue par le meilleur instrument de politique sociale qu'on puisse imaginer: des emplois plus nombreux. Les mesures proposées dans ce budget nous permettront de poursuivre nos progrès au cours des prochaines années en nous attaquant de front au double problème des déficits élevés et d'une inflation rapide. Je propose un programme de contrôle des dépenses sur deux ans qui s'appliquera à tous les secteurs de dépenses fédérales à l'exception des programmes de soutien du revenu des personnes âgées, des familles et des anciens combattants, de l'assurance-chômage, ainsi que du programme de péréquation et des versements du Régime d'assistance publique du Canada aux provinces à revenus plus faibles. La croissance des dépenses consacrées à un certain nombre de programmes sera limitée à cinq pour cent au cours des deux prochains exercices. D'autres programmes seront gelés à leurs niveaux actuels. Certains programmes seront réduits ou éliminés. Un contrôle encore plus rigoureux sera exercé sur les activités gouvernementales. Ce budget ne comporte aucun impôt nouveau. Le programme de contrôle des dépenses, combiné aux mesures de restriction annoncées en décembre, permettra d'économiser $ 3 milliards au cours de la première année et près de $ 4 milliards l'année suivante. Au cours des cinq prochaines années, les économies s'élèveront à plus de $ 19 milliards au total. Notre excédent de fonctionnement passera de $ 9 milliards à l'heure actuelle à $ 31 milliards en 1994-95. La mise en oeuvre de ce plan de contrôle des dépenses exigera de la patience et de la compréhension de la part des Canadiens. Dans mon budget de 1989, j'avais souligné l'importance de la lutte contre les tensions inflationnistes qui s'affirmaient dans la plupart des régions. Ce n'est qu'en freinant la demande et en atténuant ces tensions que nous pourrons rétablir un profil de croissance non inflationniste qui soit soutenable. L'économie est en période de croissance ralentie. Il n'y a pas lieu de s'en étonner ni d'essayer de l'éviter. L'année ne sera pas rose. Pourtant, en traversant l'année 1990, nous ne devrons pas oublier les enseignements du début des années 80, quand l'inflation était galopante. Évitons à tout prix de revivre le désespoir, la perte de confiance et les difficultés personnelles entraînés par les taux d'intérêt de 20 pour cent et plus que nous avait valu une inflation effrénée. Rappelons-nous plutôt les raisons pour lesquelles nous devons résoudre dès maintenant les problèmes de l'inflation et du déficit. Cela nous permettra d'établir un avenir de sécurité et de prospérité sur des bases solides: - un gouvernement ayant la capacité financière d'agir afin de maintenir les services importants et de relever les défis nouveaux; - une économie dynamique assurant la hausse du niveau de vie et de meilleures possibilités d'existence épanouie et satisfaisante; - un pays confiant, économiquement indépendant, qui soit compétitif à l'étranger et maître de son destin chez lui. Tel est l'avenir que nous forgeons depuis 1984. Pour y parvenir, nous devons poursuivre des politiques clairement marquées du sens de la responsabilité financière et économique qui permettront de réduire l'inflation et d'instaurer des conditions plus favorables à une baisse des taux d'intérêt; des politiques qui renforceront la capacité de notre nation de tenir sa place dans le monde et de la garder chez elle. Notre gouvernement continuera, non pas de prendre des mesures faciles ou populaires, mais de suivre la politique qui est la meilleure pour le pays. Préparer maintenant un avenir meilleur. Afin d'assurer la solidité de notre assise économique future, nous continuerons dans la voie tracée par le programme d'action global que nous avions exposé en novembre 1984. Ce programme comportait deux grands axes: remettre de l'ordre dans les finances publiques; promouvoir un secteur privé dynamique, innovateur et compétitif. Nos décisions ont placé les Canadiens devant un défi et les ont incités à changer leurs habitudes. Toutefois, il ne faut pas s'illusionner sur la cause réelle du besoin de changement. Ce n'est pas le gouvernement, mais un monde en évolution rapide et de plus en plus concurrentiel, où l'on ne fait de cadeau à personne. Le rythme de l'évolution économique internationale s'est accéléré au cours des 10 dernières années, alors que nos partenaires commerciaux étaient de plus en plus nombreux à mettre en oeuvre d'importantes réformes économiques. L'adaptation que nous avons réalisée, tout comme ailleurs, s'est étalée sur plusieurs années. Par contre, les changements qui se produisent actuellement en Europe de l'Est sont plutôt des bouleversements de par leur rapidité et leur ampleur. La fructueuse combinaison de la liberté politique et de l'indépendance économique permettra de libérer l'énergie créatrice de l'initiative individuelle et de faire participer un nombre croissant de pays au grand courant concurrentiel de l'économie mondiale. Au niveau tant individuel que national, nous devons nous préparer à ces situations et exploiter les possibilités qu'elles offrent. Expansion de notre potentiel économique. Dans ce monde en transformation, le Canada a besoin d'une économie souple et dynamique, qui réagisse avec efficacité et rapidité aux possibilités et aux défis nouveaux, d'une économie plus ouverte et davantage axée sur le marché, qui tire le meilleur parti de nos capacités concurrentielles. Notre programme économique, tendu vers cet objectif, a déjà produit de nombreuses initiatives destinées à renforcer la structure fondamentale de l'économie et à instaurer un cadre permettant à notre économie et aux Canadiens de mieux s'adapter au changement. Ces réformes structurelles accroîtront notre compétitivité de même que notre potentiel d'expansion et de création d'emplois. Elles encouragent l'initiative privée, éliminent les obstacles à la croissance économique, assurent l'accès aux débouchés, stimulent l'investissement et améliorent l'efficience. Elles contribuent toutes à un Canada plus productif et plus prospère. L'Accord de libre-échange canado-américain nous ouvre des possibilités nouvelles sur le vaste marché des États-Unis. A elle seule, cette initiative se traduira par une augmentation permanente de 3,5 pour cent de notre production économique. Toutes les régions en bénéficieront. L'abandon du Programme énergétique national et la déréglementation des secteurs de l'énergie et du transport ont réduit les ingérences gouvernementales dans ces domaines clés de l'économie. La réforme du régime d'impôt sur le revenu a permis d'abaisser les taux d'imposition et d'éliminer des échappatoires et des concessions fiscales. Elle a accru la production économique en renforçant les incitations au travail, à l'épargne et à l'investissement. La nouvelle Stratégie de mise en valeur de la main-d'oeuvre se traduira par une amélioration des aptitudes et de la souplesse de la population active. Une meilleure formation se traduit par de meilleurs emplois pour les travailleurs canadiens. Elle les aide à s'adapter aux technologies nouvelles et au changement. La privatisation et les sociétés d'État. Notre programme de privatisation et d'amélioration de la gestion des sociétés d'État contribue tout à la fois au renforcement de l'efficience économique et à la réduction du déficit. Depuis 1984, le gouvernement a vendu ou réduit sa participation dans 18 sociétés d'État. Huit autres ont été dissoutes. Les effectifs des sociétés d'État ont été réduits de 75 000 personnes, tant au moyen de la privatisation que grâce à une rationalisation et à l'élimination du gaspillage et des sources d'inefficacité. La situation financière de plusieurs sociétés d'État s'est nettement améliorée. Postes Canada, à partir d'un déficit de $ 400 millions, est arrivée à enregistrer un profit, et continue à améliorer son service. Le Canadien National a ramené son endettement à long terme de $ 3,5 milliards en 1986 à moins de $ 2 milliards en 1989. Afin d'assurer un meilleur rendement des investissements publics et de contribuer à la réduction du déficit, les sociétés d'État qui sont rentables devront verser des dividendes accrus à leur actionnaire, le gouvernement. Nous continuerons de privatiser des sociétés d'État et de nous départir de nos investissements lorsqu'une participation de l'État au capital de ces entités n'est plus nécessaire à la réalisation des objectifs de la politique publique. En 1984, Pétro-Canada a été mandatée à titre de société commerciale opérant au sein d'un secteur privé concurrentiel. Les projets d'expansion de la société sont tributaires de son accès à une gamme complète de possibilités de financement qui sont à la portée des sociétés à capital ouvert du secteur privé. A la suite de consultations avec la haute direction de Pétro-Canada, le gouvernement a décidé qu'il est opportun d'offrir au grand public une participation directe à la société. Le ministre d'État à la Privatisation fournira de plus amples détails sous peu et le projet de loi sera présenté plus tard cette année. Le gouvernement est confiant qu'une société Pétro-Canada privatisée, sous contrôle canadien, jouera un rôle de plus en plus important dans le secteur énergétique canadien. Nous nous proposons de vendre les actions de l'État dans Télésat Canada, dont la réussite commerciale dans les communications par satellite est désormais assurée. Cette vente contribuera à favoriser l'innovation dans un secteur de pointe de l'économie canadienne. Nous entreprenons également de dissoudre un certain nombre de sociétés d'État et d'autres organismes, dont les fonctions peuvent être assumées efficacement par d'autres entités. Réforme de la taxe de vente. Le remplacement de l'actuelle taxe sur les ventes des fabricants par la taxe sur les produits et services est un élément clé de notre programme économique. Il renforcera la compétitivité économique, contribuera à la réduction du déficit et permettra d'instaurer un régime de taxe de vente plus équitable. Il est difficile de remplacer une taxe dissimulée par une taxe qui sera visible et générale. Il s'agit d'une mesure impopulaire, mais pourtant nécessaire. La taxe actuelle détruit les emplois au Canada. Elle rend nos exportations moins compétitives et avantage les importations par rapport aux produits fabriqués au Canada. Elle coûte chaque année $ 9 milliards au Canada, sous forme de manque à produire. La TPS, en éliminant ces effets négatifs, ouvrira de nouvelles possibilités de croissance et d'emploi. Ces retombées se feront sentir dans toutes les régions du Canada. La structure actuelle de la taxe fédérale de vente encourage l'évitement fiscal. En remplaçant cette taxe peu fiable, la TPS contribuera à notre programme de réduction du déficit. Le crédit remboursable de TPS rendra le régime fiscal plus équitable. Les familles dont le revenu ne dépasse pas $ 30 000 verront leur situation améliorée par rapport au système actuel. Les trois quarts des foyers ayant pour chef de famille une personne âgée ou un parent célibataire disposeront d'un revenu après impôt plus élevé sous le régime de la TPS. Sensible aux préoccupations exprimées par les petites entreprises, le gouvernement continue de collaborer avec les provinces à la recherche des façons de réduire au minimum le fardeau entraîné par l'observation de la taxe. Réalisation du potentiel. Considérées dans leur ensemble, ces réformes accroîtront sensiblement la capacité de production de biens et de services de l'économie canadienne. Elles portent le potentiel de croissance soutenable de 2 3/4 pour cent par année en moyenne à plus de 3 1/4 pour cent. Cette croissance accrue se traduira par des emplois plus nombreux et un niveau de vie plus élevé pour les Canadiens. Sur une période de cinq ans, elle équivaudra à un gain d'environ $ 2,500 pour un ménage de quatre personnes. Le défi à relever consiste à atteindre ce potentiel de croissance plus élevé de manière à pouvoir en bénéficier. Le bilan des progrès accomplis depuis 1984 prouve que les Canadiens ont bien réagi au défi du changement et de l'adaptation. Nos réalisations le prouvent en matière de croissance et de création d'emplois. Les Canadiens qui ont un emploi sont environ 1,6 million de plus aujourd'hui qu'en 1984. Le revenu moyen après impôt a enregistré une hausse régulière, non seulement en termes nominaux mais aussi en termes réels. Cela signifie qu'aujourd'hui, 750 000 Canadiens de moins sont exposés à la pauvreté. Pour sortir du cercle vicieux des déficits. Pour réaliser ce potentiel de croissance économique et de création d'emplois plus rapides, nous devons nous appuyer sur les progrès durement gagnés que nous avons réalisés sur le plan budgétaire. Permettez-moi d'exposer clairement la nature du problème auquel nous sommes confrontés et les raisons pour lesquelles il ne peut être réglé qu'au prix d'efforts patients et constants, année après année. En fait, nous avons eu non pas un déficit, mais deux, à combattre. En 1984, le gouvernement fédéral vivait considérablement au-dessus de ses moyens. Il devait emprunter $ 16 milliards uniquement pour combler la différence entre les dépenses de programmes et de services, et les recettes qu'il percevait. C'était là le premier déficit- le déficit de fonctionnement. Simultanément, un endettement massif de $ 200 milliards entraînait des frais d'intérêt dépassant les $ 22 milliards par an. Chaque cent d'intérêt était payé au moyen d'emprunts supplémentaires. C'était là le deuxième déficit. Avant même de commencer à nous attaquer au second problème, nous devions éliminer le déficit de fonctionnement dû à l'excédent des dépenses de programmes sur les recettes. Réduction des dépenses fédérales. Dans le cadre d'un programme à long terme visant à rétablir progressivement l'équilibre des finances nationales, nous avons immédiatement engagé un effort général et soutenu de compression des dépenses. Nous nous sommes attaqués en priorité aux coûts d'opération de l'État - c'est-à-dire, les coûts de fonctionnement du gouvernement. En 1984, ces coûts s'élevaient à $ 17,4 milliards. Nous les avons ramenés à $ 16,8 milliards, malgré une charge de travail accrue. En décembre, le président du Conseil du Trésor a annoncé de nouvelles mesures visant à éliminer le gaspillage, à rendre les activités plus efficaces et à économiser $ 1,4 milliard au cours des trois prochaines années. Nous avons gelé les travaux de construction du gouvernement fédéral à Ottawa et limité les voyages des parlementaires et des fonctionnaires. Nous fermons certains restaurants parlementaires, vendons deux avions à réaction du gouvernement et fusionnons ou éliminons certains organismes fédéraux. Nous sommes en train d'éliminer le gaspillage. La productivité s'est améliorée; elle se trouvera encore renforcée par les mesures proposées dans ce budget. Nous continuerons à chercher les façons d'éliminer le gaspillage et le manque d'efficacité au cours des mois et des années à venir. Nous avons aussi supprimé les programmes qui avaient fait leur temps et réorganisé ou réduit d'autres activités. Nous avons éliminé les subventions énergétiques, fermé des usines d'eau lourde, réduit la subvention à VIA Rail et aboli le Programme de stimulation de l'exploration minière au Canada. Grâce à une discipline rigoureuse et à une bonne gestion, les dépenses de programmes, qui représentaient 19,5 pour cent de l'économie en 1984, ont été ramenées à 16 pour cent cette année. Cela équivaut à une réduction de $ 22 milliards des dépenses. Cependant, le problème auquel nous faisions face en 1984 ne se limitait pas à un excédent des dépenses. Les recettes fédérales étaient en diminution, par rapport au revenu national, depuis le milieu des années 70. Cela était dû à plusieurs raisons, notamment la multiplication des concessions fiscales et les lacunes de la taxe fédérale de vente. Nous avons mis fin à ces concessions, éliminé les échappatoires et accru les recettes. Les recettes, par rapport au revenu national, sont maintenant revenues au niveau moyen des années 70. En 1987-88, nous avons franchi notre première grande étape dans la lutte contre le déficit en transformant notre déficit de fonctionnement en excédent; celui-ci est maintenant de $ 9 milliards. Ce progrès est considérable, car il s'agit d'une modification fondamentale de l'équilibre structurel des dépenses et des recettes publiques. Pour résoudre le problème de la dette. Comme nous enregistrons maintenant un excédent de fonctionnement, le déficit total est inférieur aux emprunts nécessaires au paiement des intérêts de la dette publique. Les causes de cette augmentation rapide des frais d'intérêt méritent d'être mieux comprises. Rien de mieux que les intérêts composés - l'intérêt payé sur l'intérêt - quand vous avez de l'argent en banque. Les fonds placés à un taux composé de 10 pour cent sont doublés en sept ans environ. Ils quadruplent au bout d'environ 14 ans et atteignent près de huit fois leur montant initial en 21 ans. Le même phénomène se produit, mais dans l'autre sens, quand vous devez emprunter pour payer les intérêts d'une dette. Dans le laps de temps nécessaire à un nouveau-né pour atteindre 21 ans, une dette nationale de $ 200 milliards, à un taux composé de 10 pour cent, s'élèverait à près de $ 1,5 trillion, uniquement par le Jeu des intérêts. Bien que nous ayons ramené le taux de croissance annuel de la dette de 24 pour cent à moins de 10 pour cent depuis 1984, elle continue d'augmenter plus vite que l'économie - plus vite que nos capacités financières. Notre dette publique est passée de $ 200 milliards à $ 350 milliards en cinq ans. Sur cette augmentation, $ 120 milliards - c'est-à-dire plus des 80 pour cent - sont représentés par les intérêts composés sur les $ 200 milliards de départ. Cela démontre bien pourquoi il est si important de sortir du cercle vicieux des emprunts contractés afin de payer l'intérêt de la dette existante. Cela nous aide aussi à comprendre pourquoi le déficit est encore à $ 30 milliards, malgré les compressions des dépenses et l'augmentation des recettes fiscales depuis cinq ans. Rien que cette année, les paiements d'intérêt nous coûteront près de $ 40 milliards - soit $ 1,500 par Canadien. C'est 10 fois plus qu'il y a 15 ans. Une dette publique qui augmente plus vite que le revenu national ne fait pas que s'accroître. Elle absorbe une proportion croissante des fonds dont nous avons besoin pour maintenir les programmes en vigueur, faire face aux priorités nouvelles et éviter les hausses d'impôt. En fin de compte, elle réduit le patrimoine d'espoir et de possibilités que nous devrions transmettre à nos enfants. Nous risquons plutôt de leur léguer une dette écrasante. Les enfants d'aujourd'hui et de demain n'ont pas voix au chapitre. Ce n'est pas le cas pour nous, qui devons éviter que leur avenir soit assombri par l'amoncellement de la dette. Les mesures de contrôle des dépenses proposées dans ce budget assureront la croissance constante de notre excédent de fonctionnement. Cela est indispensable. Cependant, nous devons également réduire le fardeau imposé par des frais d'intérêt en augmentation rapide. Or, pour y parvenir, nous devons continuer de nous attaquer résolument à la principale menace qui compromet la poursuite du progrès économique et budgétaire: une inflation élevée. Défis économiques et financiers actuels. Après sept années de croissance rapide, l'économie a dépassé sa capacité de production. L'inflation s'en est trouvée alimentée. Le ralentissement actuel de l'économie contribue à réduire les contraintes, mais les tensions inflationnistes sous-jacentes demeurent trop fortes. Nous devons absolument réduire l'inflation le plus vite possible. C'est la seule manière de faire baisser les taux d'intérêt, de façon à ramener l'économie sur la voie d'une croissance durable et à continuer à résorber le déficit. Les perspectives de réduction de l'inflation et des taux ,d'intérêt dépendent du contrôle exercé sur les coûts. Si nous en demandons plus à l'économie que ce qu'elle peut produire, notre problème d'inflation né fera qu'empirer et l'économie en souffrira. Une évolution modérée des salaires et des prix accélérera le processus de réduction de l'inflation. Les hausses de traitements dans l'administration fédérale sont inférieures au taux d'inflation et au rythme d'augmentation des salaires dans le secteur privé depuis 1984. Le gouvernement réitère aujourd'hui sa volonté de restreindre les hausses salariales. J'ai demandé à mes homologues des provinces d'adopter la même politique. Il s'agira d'une année éprouvante pour l'économie canadienne. L'actualité économique ne sera guère encourageante au cours des prochains mois. La croissance sera lente. L'emploi devrait continuer de progresser, mais moins rapidement que la population active, de sorte que le taux de chômage augmentera. Dans ce contexte, nous pouvons nous attendre à une montée des revendications en quête de remèdes rapides, mais en particulier d'une forte réduction des taux d'intérêt. La frustration que la population ressent devant la persistance des taux d'intérêt élevés est compréhensible. Je la partage. Cependant, l'expérience nous a bien montré la futilité et les dangers des efforts déployés pour résoudre les problèmes économiques et financiers lorsqu'on s'attaque aux symptômes plutôt qu'aux causes du mal. L'expérience justifie également la poursuite d'une politique monétaire ferme, axée sur la lutte contre l'inflation, que la Banque du Canada applique. Je tiens à souligner ce point: les taux d'intérêt élevés ne sont qu'un symptôme d'un mal dont l'inflation est la cause. Une politique monétaire ferme contribue à freiner la demande qui impose des contraintes de capacité à l'économie et crée des tensions inflationnistes. Une telle politique attaque le problème à la racine. Tout assouplissement prématuré de la politique de crédit entraînerait une augmentation des emprunts et de la demande. Le problème inflationniste s'en trouverait aggravé et conduirait à des taux d'intérêt encore plus élevés par la suite. Les mesures proposées dans ce budget compléteront la politique monétaire dans la réduction des tensions inflationnistes. Elles nous aideront à profiter d'une inflation plus faible, de taux d'intérêt réduits et de déficits en baisse. En se renforçant mutuellement, elles permettront de revenir sans heurts à une croissance et à une création d'emplois vigoureuses et soutenues. Elles nous permettront de réaliser la production économique accrue que nos réformes structurelles ont rendue possible. Renforcement du contrôle des dépenses. Les mesures de contrôle des dépenses présentées dans ce budget sont dures. Elles traduisent le fait que, après plusieurs années de restriction, on ne peut réduire les dépenses sans douleur. L'idée selon laquelle les dépenses pourraient être sensiblement réduites sans que cela ait un effet réel hors du secteur public ne tient tout simplement pas compte de la façon dont, en pratique, l'État dépense l'argent du contribuable. Plan de contrôle des dépenses. Notre plan de contrôle des dépenses sur deux ans aura une influence marquée sur les dépenses de programmes. Tous les secteurs de dépenses de programmes ont été examinés, et les mesures proposées touchent un large éventail de programmes. En élaborant ces mesures, nous avons tenu compte de la situation financière des citoyens canadiens ainsi que des administrations publiques. - Le Plan ne touche pas les principaux transferts aux particuliers, c'est-à-dire les prestations aux personnes âgées, les allocations familiales, les pensions et allocations d'anciens combattants et les prestations d'assurance-chômage. Il ne s'applique pas non plus au programme de péréquation, ni aux transferts du Régime d'assistance publique du Canada aux provinces qui bénéficient de la péréquation. - Nous avons l;mité la croissance d'un certain nombre de programmes à 5 pour cent par année pour les deux prochains exercices. Cette mesure touche les paiements du Régime d'assistance publique du Canada aux provinces qui sont en meilleure posture financière, soit l'Ontario, la Colombie-Britannique et l'Alberta, ainsi que certaines dépenses consacrées aux sciences et à la technologie, et aux programmes des Indiens et des Inuit. Dans le budget de 1989, les dépenses prévues pour la défense et l'aide à l'étranger étaient sensiblement réduites. Étant donné la situation financière actuelle, leur croissance sera limitée à 5 pour cent par rapport à cette base réduite. - Un certain nombre de programmes resteront gelés à leurs niveaux de 1989-90 pendant les deux prochains exercices. Les transferts totaux par habitant versés aux provinces dans le cadre du Financement des programmes établis demeureront constants. Ils continueront pourtant d'augmenter, parallèlement à la population des provinces. - Nous avons réduit ou éliminé un certain nombre de programmes. Compte tenu des aspects économiques du projet et de la situation financière actuelle, le gouvernement ne donnera pas suite à son offre d'aide aux travaux de construction du projet OSLO, d'exploitation de sables bitumineux. Le Programme de stimulation de l'exploration minière au Canada prend fin à minuit le 19 février. Le gouvernement ne donnera pas suite au projet de brise-glace Polar 8 en raison des augmentations importantes des devis, des délais qui ont contribué à ces augmentations et de l'évolution de la conjoncture internationale. - L'aide aux entreprises s'inspirera davantage des principes de l'entreprise privée. A quelques exceptions près, les subventions seront éliminées et l'aide financière sera remboursable selon des modalités plus rigoureuses. Il sera ainsi clair que nous privilégions l'investissement dans le développement économique plutôt que les subventions au secteur privé. - Nous mettons en place toute une gamme d'autres mesures qui rendront les activités gouvernementales plus efficaces et moins coûteuses. Mentionnons notamment la privatisation et les mesures touchant les sociétés d'État, que j'ai déjà abordées. Le plafonnement à 2 pour cent de l'augmentation annuelle des budgets de fonctionnement et d'entretien des ministères, qui est en vigueur depuis 1986-87, sera maintenu jusqu'en 1994-95. Toutes ces mesures montrent bien que le gouvernement fédéral se serre la ceinture; nous avons réduit nos propres coûts et continuerons de le faire. Les dépenses totales consacrées aux programmes autres que ceux qui ne sont pas touchés par le plan de contrôle ou dont la croissance est limitée descendront, au cours de la prochaine année, à un niveau inférieur de $ 800 millions à celui de l'exercice en cours. L'ensemble des dépenses de programmes fédérales augmentera de 3 pour cent l'an prochain, soit nettement moins vite que l'inflation. Les droits au titre des principaux programmes de transferts fédéraux-provinciaux devraient croître à peu près au même rythme que les dépenses de programmes fédérales au cours du prochain exercice. Leur augmentation moyenne sera d'environ 2,3 pour cent dans le cas de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique de 4 pour cent pour les provinces de l'Atlantique. Les provinces à revenus plus faibles continueront de bénéficier d'un soutien fédéral proportionnellement plus important que celles à revenus élevés. Le déficit est un problème national. Il exige une solution nationale. Si nous voulons redresser les finances de la nation, les provinces doivent faire leur part, de la même façon qu'elles bénéficieront d'une diminution de l'inflation, d'une réduction des taux d'intérêt et d'une croissance économique soutenue. Poursuite du redressement financier. Ces mesures, conjuguées aux restrictions de dépenses des années précédentes, ont permis de replacer le déficit sur une courbe décroissante sans augmentation d'impôt dans ce budget. Avec le Plan de contrôle des dépenses présenté ici, nous agissons dès maintenant de façon que la situation financière du gouvernement fédéral au cours des années 90 lui permette de maintenir les programmes prioritaires auxquels les Canadiens sont attachés. J'ai déclaré à maintes occasions que notre génération ferait preuve d'irresponsabilité si elle optait pour la facilité, en transmettant le déficit actuel à nos enfants. Il serait tout aussi irresponsable de leur laisser en héritage un environnement dégradé. Au Canada comme à l'étranger, nous constatons une profonde transformation des attitudes et des opinions en matière d'environnement. Mon collègue, le ministre de l'Environnement, a engagé un dialogue exhaustif avec les Canadiens au sujet des mesures qu'il convient de prendre pour s'attaquer aux difficiles problèmes posés par la pollution de nos terres, de notre atmosphère et de nos eaux, ainsi que pour protéger nos ressources écologiques. Un peu plus tard au cours de cette année, il présentera au Parlement un programme d'action en matière d'environnement, afin d'assurer un développement durable au Canada. Les Canadiens veulent qu'on agisse pour protéger leur environnement. Ce programme comportera des mesures globales et importantes et exposera les engagements du gouvernement. Ce programme tiendra compte du sens des responsabilités financières. Effets des mesures budgétaires. Les mesures énergiques présentées dans ce budget nous ramèneront sur la trajectoire financière tracée dans le budget d'avril 1989. Nous ramènerons le déficit à $ 28,5 milliards en 1990-91. Ce chiffre tient compte des coûts transitoires de la réforme de la taxe de vente, notamment du versement anticipé du crédit de taxe sur les produits et services, de la subvention ponctuelle aux petites entreprises et du remboursement de la taxe fédérale de vente sur les stocks. Les mesures présentées dans ce budget permettront de réduire le déficit de plus de moitié, en le ramenant à $ 14 milliards d'ici 1993-94. L'année suivante: - Le déficit sera ramené à $ 10 milliards. - Le gouvernement commencera à rembourser ses obligations et ses bons du Trésor. - Les dépenses de programmes descendront à 14,2 pour cent du revenu national, leur plus faible niveau depuis la fin des années 60. - L'excédent des recettes sur les dépenses de programmes - notre excédent de fonctionnementatteindra $ 31 milliards. - Le fardeau de la dette diminuera, à mesure que la dette publique baissera par rapport au revenu national. - En conséquence, la proportion de chaque dollar de recettes qui est consacrée au paiement des intérêts de la dette passera de 35 cents - pourcentage qui augmente actuellement - à 26 cents et à moins par la suite. En résumé, nous retrouverons la liberté d'action nécessaire pour choisir vraiment le genre de pays que nous voulons transmettre à nos enfants. Nous pourrons aussi procéder à ces choix dans un climat d'inflation moins rapide, de taux d'intérêt réduits, de croissance économique durable et d'emplois et de possibilités en expansion dans toutes les régions du Canada. Je dépose le document budgétaire, lequel comporte des Avis de motions des voies et moyens. Ce document fournit plus de détails sur les mesures présentées. Conformément à une résolution de cette Chambre, je présente aujourd'hui un projet de loi sollicitant des pouvoirs d'emprunt pour l'exercice 1990-91. Je demande qu'on fixe un ordre du jour pour l'examen de ces motions. Conclusion. La souveraineté d'une nation se définit véritablement à la capacité de ses citoyens de façonner leur propre avenir. Dans le monde d'aujourd'hui, notre souveraineté n'est pas menacée par des agressions ni des forces militaires. Notre liberté et nos possibilités de réaliser les rêves que nous caressons pour nous-mêmes et pour nos enfants dépendent de la façon dont nous relevons le défi d'un monde plus concurrentiel, en proie au changement économique. Il ne faut pas songer à s'isoler de ce monde. Le Canada est un grand pays commerçant. Nous dépendons du commerce international pour un tiers de notre revenu national, des millions d'emplois et une bonne partie de notre capacité de financer les services publics importants. Ces avantages ne sont pas des acquis; ils doivent être durement gagnés. A mesure que le contexte économique international évolue, nous devons nous adapter. Si nous voulons maîtriser notre avenir dans un monde en transformation, nous devons accroître la capacité de produire et de vendre des produits et des services canadiens aussi bien chez-nous que sur les marchés extérieurs. Le Canada possède les richesses naturelles, le capital et les ressources humaines voulus pour prospérer dans un monde concurrentiel. L'existence même du Canada témoigne de sa capacité d'adaptation. Nos ancêtres ont édifié ce pays malgré d'innombrables difficultés. Les Canadiens ont traversé ensemble des périodes éprouvantes en réaffirmant sans relâche leur capacité de tirer parti de toute la diversité qui fait la richesse de notre nation avec réalisme, détermination, lucidité et compréhension. Tel était l'esprit de la Confédération et tel doit être l'esprit qui nous inspirera face à tous les défis que nous aurons à relever pour doter le Canada et les Canadiens d'un avenir meilleur. Notre capacité de garder la maîtrise de notre avenir économique est mise à l'épreuve par les problèmes jumeaux de l'inflation et d'une dette croissante. Le programme économique que j'ai décrit et les mesures déterminées que nous avons prises dans le cadre de ce programme nous permettent d'entrevoir clairement une amélioration. Qu'il ne soit pas dit, cependant, que nous avons perdu la bataille en renonçant à combattre. En fait, si notre détermination ne fléchit pas, une réduction de l'inflation est en vue, ce qui nous permettra de maîtriser notre déficit. La persévérance nous permettra d'être davantage maîtres de notre destinée et de pouvoir investir davantage dans la hausse du niveau de vie et l'amélioration de la qualité de vie de tous les Canadiens: c'est-à-dire dans la recherche et le développement, l'enseignement et la formation professionnelle, ainsi que les programmes environnementaux, sociaux et culturels. Notre détermination doit être sans faille. Nous devons continuer d'affronter les problèmes. Nous devons saisir les possibilités qui sont à notre portée pour bâtir le Canada auquel nous tenons pour nous-mêmes et pour les générations futures.