*{ Discours néo-libéral CSD, 1985 } La concertation: une nouvelle illusion ou un progrès souhaitable? La CSD est plus vivante que jamais, même si les temps sont durs pour la classe ouvrière. La CSD est une nécessité parce qu'elle a été capable de s'adapter et d'envisager des réponses aux défis de la société en mutation. Malgré les difficultés actuelles, rien ne pourra ébranler notre volonté collective d'être la Centrale de l'avenir, c'est-à-dire une Centrale qui offre un programme d'action rempli d'espoir. La CSD sait ce qu'elle veut, parce qu'elle a un programme d'action moderne pour les relations de travail et pour instaurer une politique de plein emploi. Les syndicats québécois devront changer leur mentalité et prendre des responsabilités dans la société. Nous ne sommes plus à l'époque de la contestation et de l'abondance, nous sommes dans une période de crise profonde qui n'est pas encore résolue. Quoi faire pour s'en sortir collectivement? Il n'y a qu'une seule voie possible: celle de s'engager solidairement au redressement socio-économique de notre pays. Cet engagement ne peut pas être pris unilatéralement par la CSD et ses syndicats affiliés, il concerne aussi tous les groupes patronaux et tous les autres groupes syndicaux. La concertation économique nous apparaît être une proposition acceptable. Mais nous savons qu'elle ne peut être une nouvelle illusion. Pour dissiper toute ambiguïté, quelle est la position de la CSD? La concertation peut être un progrès souhaitable, à la condition qu'elle soit un outil collectif de démocratie économique. Qu'entendons-nous par cet objectif général? C'est la reconnaissance d'un droit et d'une responsabilité en vue d'établir la participation des syndicats à la maîtrise de la production et du plein emploi, de même qu'à l'affectation des richesses. L'unanimité n'existe pas encore sur cette proposition, parce qu'elle suppose un changement social important dans les structures et les comportements des groupes sociaux. Des conditions préalables. Comment la concertation peut-elle être un outil collectif qui soit efficace pour résoudre à court terme les problèmes de la classe ouvrière? Les partenaires devront adopter une stratégie commune qui fixe les conditions préalables absolument nécessaires pour assurer le bon fonctionnement de la concertation. Quelles sont ces conditions préalables? Il y en a trois: 1 - les centrales syndicales doivent trouver un terrain d'entente pour modifier leurs rapports fratricides; 2 - les partenaires patronaux et syndicaux doivent aplanir leurs différends sur cinq désaccords majeurs; 3 - les incohérences de partenaires, y compris le gouvernement, devront être atténuées, sinon résolues. Pour la CSD, ces conditions sont en quelque sorte des indices servant à mesurer la légitimité et l'efficacité de la concertation. En dernier ressort, elles seront un guide pour assurer notre participation pleine et entière ou bien pour signifier notre retrait des structures officielles. Quelque soit notre décision finale, la CSD ne renoncera pas à promouvoir une politique de plein emploi, ni un programme d'égalité dans l'entreprise: partenaires d'égal à égal: c'est un droit. Première partie. La concertation questionne les partenaires socio-économiques sur leur volonté commune et leurs stratégies d'oeuvrer au redressement de la situation tragique de la classe ouvrière. D'abord un rappel sommaire des principales difficultés connues de la classe ouvrière: plus de 400 000 chômeurs et chômeuses au Québec; 10 % de la population ouvrière vit dans la pauvreté; la discrimination est un fait social saisissant à l'égard des jeunes, des femmes, des personnes âgées et des handicapées; le milieu de travail ne permet pas l'initiative et le développement personnel des travailleurs et des travailleuses; les syndicats sont non seulement discrédités dans l'opinion publique, mais ils sont combattus systématiquement comme la peste; la nouvelle illusion des syndicats indépendants émerge dans les milieux de travail; les centrales syndicales ne sont pas uniquement désunies, mais elles se combattent férocement, au lieu de concentrer leurs efforts pour regrouper la majorité des travailleurs et travailleuses appartenant à la classe ouvrière qui n'est pas encore syndiquée. La classe ouvrière québécoise ne sera plus jamais ce qu'elle a été. elle éclate de toutes parts et se transforme. Il y a de moins en moins de travail dans les secteurs traditionnels, comme les mines, les manufactures et la construction. Et la mutation technologique nous réserve des surprises par l'implantation des robots. Le secteur tertiaire a canalisé les compétences professionnelles depuis plus de vingt ans. On prétend avec espoir que les nouveaux emplois nécessaires à la solution du chômage émergeront dans la dynamique des cols blancs et des cols roses. Dans l'attente de ce déblocage, l'on constate que l'écart important entre les sans-emplois et les détenteurs d'un emploi s'élargit de plus en plus, aussi bien par rapport au niveau de vie qu'au mode de vie. Le travail au noir ne rétablira pas cet équilibre, de même que le travail à temps partiel. La crainte du lendemain fait partie de notre environnement, de sorte que l'inquiétude est devenue une valeur prédominante dans la société. On cherche alors à se débrouiller tout seul: l'individualisme prime sur la solidarité, même si une multitude de nouveaux mouvements sociaux ont été constitués pour rassembler les gens. Face à ce bilan, une première question s'adresse aux centrales syndicales: elles devront apprendre à se concerter avant de conclure des accords avec le patronat. C'est élémentaire, parce qu'il ne suffit pas de proclamer que l'on soit d'accord avec le plein emploi; encore faut-il s'entendre sur les conditions nécessaires pour le mettre en oeuvre. Le dialogue syndical sur ces questions n'a jamais eu lieu, car la compétition entre les centrales est une priorité qui marque leurs rapports. Il est scandaleux de constater que les centrales favorisent leurs intérêts particuliers avant les intérêts collectifs de la classe ouvrière. Qu'il soit bien entendu, que la CSD ne propose pas de constituer un regroupement unitaire. Au contraire, l'objectif est plus modeste mais tout aussi vital, il consiste à définir les balises d'action sur quatre points: 1 - la représentation des centrales syndicales à la Table Nationale d'Emploi et de Concertation, de même que des modalités souples pour améliorer le sort de la classe ouvrière; 2 - un protocole sur le prochain maraudage dans l'industrie de la construction; 3 - un cadre d'action pour assurer le développement du syndicalisme libre au Québec; 4 - la représentation dans les associations sectorielles dans la santé et sécurité au travail. L'absence d'entente entre les centrales et leur distance agressive entre elles, sont principalement des motifs qui permettent aux stratégies patronales de péter le feu dans les rapports sociaux. Cinq désaccords. La concertation exige non seulement un dialogue entre les parties syndicales et patronales, mais aussi des engagements communs sur des questions économiques et sociales. La réalité nous force de constater un écart entre les positions patronales et syndicales. Cet écart constitue un frein explosif empêchant la transition harmonieuse d'une société d'abondance à une nouvelle société. Cet écart se traduit par cinq désaccords profonds. Quels sont-ils? Un premier désaccord porte sur l'implantation des changements technologiques. Le dernier sommet économique sur le sujet en témoigne. Le ministre de la Concertation et de l'Emploi a référé cette question épineuse à la Table Nationale de la Concertation et de l'Emploi, mais les chances d'en arriver à un accord sont minces, tant que la partie patronale maintiendra une intransigeance aussi fanatique que passionnée. Un deuxième désaccord met en cause la prévention en matière de santé et sécurité au travail. Le patronat refuse tout investissement significatif et toute méthode de prévention progressive, sous prétexte que les coûts sont déjà excessifs pour les entreprises. Cette affirmation est caricaturale, il faut nuancer. D'abord, il est nécessaire de dénoncer cet illogisme éhonté et ce préjugé tenace, parce qu'on ne peut diminuer le fardeau des coûts de la réparation professionnelle sans prévention, c'est-à-dire sans prendre tous les moyens nécessaires pour éliminer à la source les risques d'accidents et de maladies professionnelles trop dommageables humainement. La rationalité commande que plus il y aura de prévention, moins il y aura d'accidents et moins élevés seront les coûts de réparation professionnelle. Un troisième désaccord s'exprime au sujet des acquis syndicaux par des conflits sans fin. On s'attaque à l'ancienneté comme si elle constituait le fléau majeur de la crise économique. Il y a une disproportion entre la cause et l'effet qui est intolérable. De plus, on veut imposer la clause des sous-contrats comme si elle était la principale mesure pour diminuer les coûts de production. Rarement nous parle-t-on de la nécessité pour accroître la productivité comme moyen de création de richesse. Il faut déplorer la contradiction entre le discours des associations patronales et les pratiques bornées de certains dirigeants d'entreprises. Un quatrième désaccord se manifeste à propos de la semaine de travail à trente-cinq heures. Il s'agit d'un véritable blocage. En effet, au cours de la dernière année, les partenaires ont débattu cette question sur scène publique, sans qu'il y ait eu un progrès sensible. Il aurait été si simple de mandater les institutions économiques de recherche pour étudier la légitimité de la thèse des uns et des autres ou tout simplement de scruter la faisabilité de ce moyen économique. Pendant ce débat houleux en public le ministre de la Main-d'oeuvre soumettait, en huis clos, aux partenaires un projet de cette nature dans le but de créer des emplois pour les jeunes; il y eut un accord de principe sur ledit projet, mais il y a une brouille sur la présentation écrite du programme. Un cinquième désaccord pèse sur les processus de syndicalisation. On recourt au moyen juridique pour défaire les syndicats. La CSD a investi plus d'un million et demi, depuis sa fondation, pour faire appliquer Juridiquement des droits proclamés dans le Code du travail. Nos espoirs sont tournés vers la Commission Consultative du Travail, présidée par le Juge Beaudry. Mais nous sommes poignés par une inquiétude réelle quant au sort qui sera réservé au rapport de cette commission, surtout quand on sait que le gouvernement Lévesque n'a pris aucun engagement et encore moins le parti libéral. Pour aplanir ces différends, la CSD propose que la Table Nationale de la Concertation et de l'Emploi soit le lieu privilégié pour entreprendre des négociations québécoises devant conduire à un accord général constituant les bases d'un nouveau pacte social. Les incohérences des partenaires et de l'État. La société québécoise a une expérience collective de la concertation. Après dix ans d'essais et d'erreurs, la concertation traverse une période cruciale. Quelle évaluation peut-on en faire, en particulier sous l'angle des comportements des partenaires, y compris celui de l'État. Puis il faut répondre à trois interrogations majeures pour assurer la survie de la concertation . Une évaluation des incohérences. Tout le monde reconnaît qu'il y a eu beaucoup trop de sommets nationaux, régionaux et sectoriels. La qualité et l'efficacité des sommets ont été limitées parce que les objectifs des partenaires étaient diffus et différents. Comme groupe de concertation, on n'avait pas de direction commune, même si les responsables-organisateurs ont créé des formules de recherche de consensus sur des sujets possibles. Sans doute que cette étape a été nécessaire, parce qu'on n'avait plus l'habitude de parler avec l'État et de se parler entre partenaires. La révolution tranquille avait habitué les partenaires à la consultation et à la contestation. Ces deux comportements sont passablement éloignés de la concertation et ont influencé les partenaires lorsqu'ils ont participé aux conférences socio-économiques. C'est pourquoi, on peut conclure que les sommets sont et ressemblent à des parlotes publiques. On y participe pour revendiquer, dénoncer, contester, sans volonté de prendre des engagements collectifs. Tant et aussi longtemps que les partenaires ne modifieront pas ce genre de comportements, les conférences socio-économiques ne constitueront pas un véritable lieu de concertation. La concertation est plus contraignante que la consultation et se trouve à un pôle opposé de la contestation. Elle exige la capacité de s'engager et de garantir qu'un suivi va être consenti pour donner suite aux décisions collectives. Jusqu'à maintenant, c'est surtout le gouvernement qui a pris des engagements signifiants. Les partenaires ont aussi pris des engagements qui étaient moins compromettants. Les incohérences de comportement ne sont pas une caractéristique particulière aux partenaires socio-économiques, l'État a commis des bourdes importantes qui auraient pu tout saborder l'entreprise collective de la concertation. La principale bourde gouvernementale concerne sa volonté d'imposer de nouvelles règles du jeu dans la négociation collective du secteur public et parapublic. Par stratégie politique, le gouvernement a justifié sa réforme en proclamant sa volonté de protéger le droit absolu des malades et le droit à l'éducation. Ce faisant, il brandissait l'épouvantail des grèves que la CSN a trop souvent utilisé à mauvais escient dans le secteur des affaires sociales; puis il reléguait ainsi dans l'ombre le désastreux problème des finances publiques, causé entre autres choses par une maladministration du réseau des affaires sociales, qui est centralisé entre les mains des technocrates du ministère. Même si le débat a été déplacé, il demeure tout entier. Dans cette manoeuvre, c'est le syndicalisme qui écope. Personne n'a été dupé, même si l'opinion publique appuyait fortement le gouvernement dans sa démarche pour mater le syndicalisme. La stratégie gouvernementale a été bien calculée d'autant plus que le gouvernement avait embauché les deux derniers coordonnateurs de la CSN Sans doute ont-ils eu une influence pour présenter l'avant-projet de la loi Clair dans une période rapprochée du maraudage légalisé par le Code du travail. Mais bien maligne la personne qui aurait prévu qu'une coalition se formerait en regroupant tous les syndicats du secteur public et parapublic, pour lutter contre cet avant-projet de loi, alors qu'il existait deux blocs syndicaux importants: d'une part, le front commun traditionnel et d'autre part, l'intersyndical auquel participait la CSD Comme on le sait, l'imprévisible eut lieu. Une nouvelle solidarité est née, même si elle a toujours été fragile. Les fondateurs de la coalition savent que la CSN ne l'a Pas acceptée spontanément et que cette coalition a vu le jour parce que la FTQ et la CEQ ne s'entendaient pas avec la CSN au sein du front commun traditionnel. La CSN a toujours été réticente pour participer aux diverses activités de la coalition et menait une activité parallèle pour s'afficher comme l'unique porte-parole syndical dans le secteur des Affaires sociales. Ce qui est une fiction de l'esprit puisqu'on compte plus d'une dizaine d'associations syndicales différentes, sans compter la FTQ et la CSD Malgré ces frictions, l'exercice de la concertation syndicale s'est révélé un puissant outil collectif de ralliement sur des objectifs généraux qui ont fait reculer le gouvernement, même si le projet de loi est toujours inacceptable. L'ironie de ce projet de loi se trouve d'une part, parce qu'il sape les principaux droits de la négociation collective et d'autre part, parce qu'il crée un institut de rémunération qui est un simulacre de concertation, puisque l'autorité finale demeure toujours le gouvernement. Les interrogations majeures. Malgré ces incohérences, les centrales ont continué à participer activement aux activités de concertation, surtout depuis que le gouvernement a créé un ministère de la Concertation et de l'Emploi. Mais est-ce que cette initiative fort louable est suffisante pour garantir la survie de la concertation québécoise? Trois sortes de réponses différentes et complémentaires doivent être apportées: des réponses politiques, organisationnelles et financières. 1 - Dans l'hypothèse d'un changement de gouvernement seront les intentions du nouveau gouvernement? 2 - Le gouvernement actuel veut orienter la concertation vers la définition et la mise en oeuvre d'une politique de plein emploi. Soit! Mais comment faire? Est-ce que les partenaires de la table centrale vont assumer un réel leadership? Concentreront-ils leurs efforts sur des orientations économiques générales à court et à long terme? Orienteront-ils plutôt la concertation vers les décideurs de l'entreprise? Quelle sorte de machine administrative vont-ils favoriser? Est-ce que la machine fonctionnant aux niveaux national, sectoriel et régional, sera suffisamment souple et efficace? Est-ce qu'on va maintenir la structure consultative qui existe actuellement dans tous les ministères? Est-ce que les partenaires auront une responsabilité dans la conception des programmes administratifs tant au point de vue de la création d'emplois que de la formation de la main-d'oeuvre? 3 - La troisième question se rapporte à la rentabilité économique de la concertation. Pour les partenaires, la concertation coûte de plus en plus cher, en temps et en argent. On se demande si cet investissement est véritablement bénéfique à l'ensemble des citoyens, particulièrement valable pour la classe ouvrière? Deuxième partie. La concertation n'est pas une voie d'action facile, elle est au contraire très exigeante pour les partenaires. La complaisance n'y a pas de place parce que les enjeux sont trop importants pour la classe ouvrière. La CSD a voulu démystifier ce cadre d'action en clarifiant ses objectifs et en posant des règles du jeu à suivre quant à sa participation future. Ce faisant, elle indique aussi la stratégie qu'elle entend déployer au cours des deux prochaines années pour assumer ses responsabilités dans la société, au nom des syndicats affiliés. Les revendications de la CSD. Quelle est la dimension de ce rôle syndical par rapport à l'action des syndicats affiliés? Quel est le lien de solidarité entre le rôle de la Centrale et l'action d'un syndicat dans l'entreprise? Par ses revendications, la Centrale joue un rôle à la fois indispensable et complémentaire à l'action de représentation des syndicats affiliés dans leur entreprise. N'est-il pas vrai que l'action syndicale de base (dans l'entreprise) soit menacée par l'état dramatique élevé du chômage, par l'étendue saisissante de la pauvreté ouvrière et par le climat incertain et inquiétant de l'économie. Ces problèmes collectifs sont, hélas, utilisés par le patronat comme des moyens de pression pour remettre en cause les acquis syndicaux. Un syndicat ne peut pas affronter seul et isolément cet environnement contraignant et pervers. L'inégalité de force est une évidence même. L'affiliation d'un syndicat à la CSD permet de renforcer la puissance de son action, parce qu'il peut agir avec d'autres syndicats, en toute solidarité pour apporter des correctifs. Cette solidarité s'exprime par les revendications de la Centrale. Elles ont pour but, prioritairement, d'assainir le climat général par le redressement de l'emploi et l'adaptation de la main-d'oeuvre aux changements technologiques. On ne peut pas assurer cet équilibre général sans l'intervention collective de la Centrale. La CSD n'intervient pas par opportunisme, elle a une philosophie d'action clairement exprimée dans l'article I de la Constitution. Quelle est la principale croyance qui inspire notre programme d'action dans la société? Constatant que la société brime les droits fondamentaux élémentaires des hommes et des femmes d'ici, comme le droit au travail, de gagner sa vie honorablement, à la compétence professionnelle, la CSD propose des réformes majeures pour adapter l'organisation et le fonctionnement de société dans le seul but de reconnaître et promouvoir la liberté de la personne humaine à un travail et son autonomie. Concrètement, quelles sont les revendications de la CSD pour opérer cette réforme? Le Conseil de direction a décidé, en date du 3 mai dernier, de publier nos principales revendications. Vous savez qu'elles sont orientées vers la mise en oeuvre d'une politique de plein emploi, par l'amélioration de la productivité. A cette fin, la CSD propose dix mesures essentielles et complémentaires qui doivent se réaliser par des moyens économiques, industriels et sociaux. Par les moyens économiques, nous soutenons: - qu'une politique du maintien des emplois est nécessaire; - que la réduction de la semaine de travail à 35 heures, avec compensation, de même que la préretraite sont deux sources de création d'emploi; - que le contrôle syndical sur l'implantation des technologies nouvelles est indispensable; - que l'équilibre du commerce international est nécessaire tant par le contrôle des importations que par l'accroissement des exportations. Par les moyens industriels, nous estimons: - que le développement sectoriel et régional est capital à la condition qu'il s'articule à partir de la base: milieu de travail par milieu de travail, région par région, secteur par secteur; - que l'aide à l'entreprise soit entérinée et signée par les syndicats. Par les moyens sociaux, nous proposons: - la formation d'un Comité consultatif permanent qui statuerait sur une politique nouvelle de revenu social; - la révision de la formation des adultes axée sur le droit au congé éducation; - une politique de promotion sociale dont l'objectif repose sur l'égalité des femmes, des jeunes, des personnes âgées et handicapées. Toutes ces propositions ont été exposées dans plusieurs tribunes publiques, depuis deux ans, et sont explicitées dans le document publié à l'occasion de ce Congrès et qui est intitulé: «Les revendications de la CSD» Les relations de travail. Le rôle de la CSD déborde ce cadre d'intervention dans la société pour s'intéresser de très près aux relations de travail. Diverses actions très importantes ont été conduites pour soutenir et renforcer l'action des syndicats affiliés. Tout d'abord, elle a soumis à la Commission consultative du travail, chargée de réformer les lois du travail, cinq mémoires régionaux (Trois-Rivières, Québec, Sherbrooke, Chicoutimi, Montréal), puis un mémoire provincial qui a été distribué à chaque syndicat affilié; - elle a investi près de 2 millions au cours des deux dernières années, par le Fonds de solidarité, pour aider ses syndicats affiliés à conclure des conventions collectives respectables; - elle a apporté une contribution efficace dans l'analyse financière des entreprises afin d'éclairer les syndicats affiliés sur leurs revendications salaires; - elle a contribué à la relance d'entreprises dans le but de protéger les emplois de membres de syndicats affiliés; - elle a défendu avec succès des centaines de cas d'assurance-chômage et de réparation professionnelle devant les Tribunaux administratifs, tels que le bureau de révision et de conseil d'arbitrage. Ces actions de la Centrale en faveur des syndicats affiliés ne sont peut-être pas toutes visibles à l'ensemble de nos adhérents, mais elles constituent une dynamique réelle de services efficaces rendus à nos membres, sans compter toute l'action collective des regroupements régionaux et professionnels, en matière de formation et de maintien syndical, et surtout d'amélioration des conditions de travail par la négociation collective. Partenaires d'égal à égal. Le thème du Congrès, cette année, porte sur la participation syndicale dans l'entreprise. On veut démêler la notion de participation, en indiquant les objectifs visés, les moyens à prendre, tout en révélant ses limites et ses pièges. Le choix de la participation syndicale comme moyen moderne pour améliorer les conditions de travail constitue un virage important dans les relations de travail, en ce sens qu'on s'écarte de la stratégie habituelle des syndicats américains et canadiens. En effet, la stratégie habituelle des syndicats rejette toute forme de participation des travailleurs et travailleuses à la gestion des entreprises. Deux motifs sont généralement avancés pour la justifier: - les syndicats ne veulent pas participer, parce qu'ils prétendent avoir un rôle de chien de garde, c'est-à-dire d'application de convention collective; - les syndicats ne veulent pas participer, parce qu'on ne peut coopérer avec l'employeur étant donné que les rapports sociaux sont fondamentalement antagonistes. Même si ces deux visions syndicales font encore partie des moeurs syndicales, la crise a bousculé cette rigidité traditionnelle. Il y a place à de l'ouverture. Le Fonds de solidarité de la FTQ est une intervention économique qui requiert la participation financière des gouvernements et des travailleurs et travailleuses, même si leur contribution n'est pas directe, mais plutôt centralisée entre les mains de spécialistes du même type que la SDI Malgré tout, c'est déjà une première nuance. De plus, la stratégie syndicale a été modifiée à cause des difficultés de l'entreprise: difficultés financières et de marché. Les syndicats ont participé au devenir de l'entreprise pour sauver les emplois, soit en investissant ou en devenant copropriétaires, ou encore par les coopératives de production. Mais les syndicats québécois n'ont rien innové puisque leurs confrères américains et européens ont mis également la main dans la pâte. La participation des travailleurs dans l'entreprise n'est pas un nouveau débat dans la société moderne, il existe depuis fort longtemps. En effet, la Conférence Internationale du Travail a adopté, en 1966, une proposition sur ce thème. Mais ce n'est qu'en 1981, que le BIT a publié une étude substantielle sur la participation des travailleurs et des travailleuses aux décisions de l'entreprise. Ces préoccupations s'inscrivaient dans les expériences menées en Europe Occidentale dans différents pays qui avaient déjà légiféré en cette matière, selon des modalités propres à leurs traditions et à leurs histoires sociales. Ainsi, l'Allemagne instituait la cogestion; la Belgique et les Pays-Bas s'orientèrent vers les conseils d'entreprises; récemment la France adoptait les quatre lois dites Arnoux, dont l'une traitait du développement des institutions représentatives, notamment en définissant des attributions économiques. Au Québec, les expériences de participation se différenciaient de l'Europe par leur caractère de volontariat qui s'exprimait à la base, au niveau de la micro-économie. Toute tentative de législation aurait soulevé l'ire des partenaires socio-économiques nationaux. Le Sommet économique national du Québec, en 1983, en témoigne fortement, même si l'ex-CPDQ a soumis au premier ministre Lévesque une recommandation étoffée sur ce projet. Les partenaires majoritairement socio-économiques ont même refusé majoritairement un décret qui créait une Commission d'étude sur la participation des travail leurs à l'entreprise. Le projet de la CSD. La position de la CSD est claire à l'égard de la participation: elle prétend que la sortie de la crise passe nécessairement par la démocratisation de la vie de l'entreprise. Comment accroître la productivité sans la concertation en milieu de travail? Comment relever le défit de la concurrence internationale sans la contribution dynamique des syndicats? Comment surmonter la mutation technologique sans l'apport de la qualification adaptée de la main-d'oeuvre? La CSD assume un leadership éclairé dans le mouvement syndical, parce qu'elle a expérimenté différentes formules de participation depuis plus de cinq ans, dans près de cent syndicats. La CSD n'a pas développé de modèle participatif, mais elle a mis au point une conception articulée sur une fourchette à cinq dents. En fait, que veut-on par la participation? La CSD poursuit cinq objectifs: 1 - Assurer à tous les travailleurs et travailleuses un maximum de sécurité physique et psychologique. 2 - Éviter la monotonie au travail et augmenter les responsabilités dans les entreprises, par un apprentissage adéquat et une adaptation à l'environnement technologique. 3 - Prévoir les besoins de la main-d'oeuvre pour préparer les salariés aux changements technologiques, à la mobilité professionnelle dans le but d'assurer le plein emploi. 4 - Obtenir l'information financière pour mieux partager les fruits de la productivité et sonner l'alarme avant de se trouver devant une fermeture et faillite. 5 - Sauver les emplois en participant à la gestion selon diverses modalités d'intervention. Ces objectifs donnent une vue d'ensemble et une perspective d'action qui permettent de tracer notre direction dans la broussaille des relations de travail. Notre stratégie n'est pas de partir en peur, elle veut plutôt choisir les meilleurs moyens d'intervention adaptés à notre milieu de travail pour faire face à trois approches patronales connues: Certains veulent en profiter pour reprendre des acquis syndicaux, d'autres veulent intégrer les syndicats selon les nouvelles méthodes de gestion des ressources humaines, enfin, il y a une catégorie du patronat qui tente de survivre. Les syndicats ne peuvent plus improviser, on doit se préparer et la meilleure stratégie consiste à savoir ce qu'on veut. Troisième partie. La CSD appartient à ses membres affiliés. Ce Congrès est souverain: il a toute l'autorité voulue pour conduire la CSD dans la meilleure voie en vue de favoriser la promotion collective des travailleurs et des travailleuses que nous représentons. La CSD n'a pas voulu que ce pouvoir s'exprime uniquement dans les Congrès, c'est pourquoi elle a régionalisé son action pour mieux faire participer les militants et les militantes et les syndicats à sa marche quotidienne. La régionalisation. Lors du dernier Congrès, nous avions convenu d'un programme audacieux de régionalisation, en instituant des regroupements d'action dans neuf régions. Après deux ans d'expérience, le bilan est positif, même si la régionalisation ne s'est pas développée également dans tous les milieux. On connaît les points forts et les faiblesses qui existent. La régionalisation n'a pas pour but de créer neuf petites CSD autonomes dans la CSD, il s'agit de décentraliser l'organisation des services vers la base, de développer une prise en charge plus réelle et profonde des militants et des militantes, de sorte que la CSD vive au même diapason partout dans toutes les régions et qu'elle tire ensemble sur des objectifs majeurs. Ces objectifs sont aussi impérieux aujourd'hui, il y a pourtant lieu de les rappeler et de les préciser. Ils convergent tous vers une priorité existentielle.: assurer le développement maximal de la CSD Ce développement s'enracine dans trois objectifs d'action prioritaires: 1 - L'expansion syndicale. 2 - La formation syndicale. 3 - La consolidation ou le maintien syndical. Ces trois objectifs sont indissociables: ils visent d'abord à recruter des nouveaux syndicats, puis à optimiser le sens de l'appartenance et à entretenir et renforcer l'action syndicale de base. Toutes nos ressources régionales doivent être canalisées vers ces objectifs, sans en négliger aucun. L'expansion ne doit pas être minimisée en faveur de la consolidation, ou inversement. Les secteurs réunis. L'expérience vécue dans les secteurs réunis est non seulement valable mais elle constitue un progrès en matière d'échange sur les questions professionnelles et de coordination des services par la nomination des directeurs professionnels. Il reste maintenant à franchir une autre étape qui constitue une plus grande prise en charge des responsabilités dans les relations de travail. On doit établir une égalité réelle entre les fédérations reconnues et les secteurs réunis. La Centrale ne doit pas se substituer au rôle des fédérations reconnues à l'égard des syndicats non-fédérés. Pour assurer un meilleur partage de ses ressources et pour mieux rationaliser son action en tant que centrale, la CSD se doit, au cours des deux prochaines années, d'étudier la meilleure formule avec les secteurs réunis, dans le but de concrétiser leur autonomie de fonctionnement et de services. Conclusions. Malgré les difficultés actuelles, la CSD est plus vivante que jamais. Le Comité exécutif et le Conseil de direction vous invitent, délégués, à participer activement à ce Congrès qui s'annonce exigeant et emballant, parce que les décisions à prendre sont importantes pour l'avenir. Nous savons tous par expérience que tout est possible, à la condition que la lucidité prime sur les préjugés et que la fraternité et la solidarité s'intensifient parmi nous. Le confrère Gingras demande s'il y aurait des commentaires suite à l'allocution du confrère Président. Le confrère André Baribeau signale que ce rapport du Président pourrait très bien être référé à la Commission traitant des revendications de la CSD. Il croit que ce serait un outil indispensable dans cet atelier parce qu'il comporte des choses importantes. Le confrère Renald Carey ajoute de plus que ce rapport pourrait servir de document de travail à chacun des ateliers. Lorsque le Président parle de concertation, ajoute-t-il, et qu'il demande aux associations syndicales de se concerter davantage avant d'aller revendiquer devant le patronat, faisant état de grandes priorités et entre autres de balises d'action, il semble qu'il touche particulièrement le secteur de Construction avant une période de maraudage. En tant que représentant de notre Secteur, je crois qu'on doit avant tout se respecter et s'accepter comme association syndicale. Le confrère Jean-Paul Hétu cite différents cas vécus lors du Sommet économique de 1982-83. Une centrale syndicale adverse demandait la disparition de la Centrale. Cela s'est également produit à différentes autres reprises, particulièrement dans le cadre de la coalition de l'Estrie où on a voulu me foutre à la porte et l'ensemble de l'association s'est prononcé dans la négative. L'an dernier, le Sommet économique de Jonquière avait décidé d'organiser un comité de travail dont l'objectif était de voir comment les associations syndicales et patronales créeraient de l'emploi. La proposition de ce comité visait l'exclusion de la CSD Il y eut un vote et encore une fois, l'ensemble des participants a reconnu que nous devrions être là. Il est évident, comme le mentionne le confrère Carey, que cela sous-entend la nécessité d'échanger sur un tel protocole, en particulier, lors du prochain maraudage et la première question qui se pose, c'est évidemment celle du respect intégral de notre identité et de notre présence. Ce qui est intéressant, ajoute-t-il, ces mêmes personnes qui auparavant voulaient nous exclure de la table, sont venues à maintes reprises nous demander notre accord pour former un front commun afin d'échanger et trouver des modalités d'action pour le prochain maraudage. Nous avons démontré depuis plus de dix ans que nous étions indispensables comme centrale syndicale dans les divers milieux et que nous pouvions bien représenter et de manière efficace les travailleurs et les travailleuses qui sont membres de syndicats affiliés.