*{Rapport annuel, 1971, Banque Mondiale} ACTIVITÉS AU COURS DE L'EXERCICE. Pendant l'exercice 1971 le Groupe de la banque_mondiale a nettement progressé vers son objectif qui est de doubler le volume des prêts pendant la période quinquennale de 1969 à 1973 par comparaison aux chiffres obtenus entre 1964 et 1968. Mais en même temps, la Banque et ses filiales se sont attachées de plus en plus à veiller à ce que tous les pays qui bénéficient de l'aide fournie en tirent le maximum de profil pour leur développement. C'est dans cette intention que la Banque a accru et approfondi les évaluations de projets et élargi le champ des études et des rapports concernant ses pays_membres. Les Administrateurs ont, pendant l'exercice consacré une grande partie de leurs travaux aux problèmes de politique fondamentale qui sont soulevés dans ces rapports - ils ont en outre étudié plus de trente recommandations de la Commission Pearson relatives à la politique de la Banque. Pour que le Groupe soit à même de maintenir pendant le prochain exercice le niveau d'opérations qu'il entend atteindre, il faut notamment que la troisième reconstitution des ressources de l'IDA se fasse selon le calendrier qui a été prévu; en effet, à la fin de juin 1971 l'IDA avait engagé pour des projets spécifiques tous les fonds dont elle disposait. Les négociations qui ont eu lieu à ce sujet ont été menées à bien au début de l'exercice écoulé. Mais l'accord ainsi conclu, selon lequel les pays fourniront annuellement à l'IDA pour ses engagements environ 813 millions de dollars pendant trois ans à partir de juillet 1971, ne peut prendre effet que si des pays donateurs, dont le total des engagements ne serait pas inférieur à 1.900 millions de dollars, y compris douze pays au moins de membres plus riches de la Première Partie, ont notifié à l'IDA qu'ils accepteront l'engagement et verseront les sommes spécifiées dans l'accord, Au 30 juin, dix pays de la Première Partie avaient pris les mesures législatives et autres qui étaient nécessaires et notifié à l'IDA qu'ils verseraient leur contribution. Le total combiné de leurs engagements et de ceux des pays de la Deuxième Partie qui avaient notifié à l'IDA qu'ils participeraient à la reconstitution de ses ressources reste inférieur de 828 millions de dollars au montant nécessaire, La date où l'accord prendra effet a donc été repoussée au 30 septembre 1971. Afin de mettre l'IDA en mesure de poursuivre ses opérations en attendant qu'aient été terminées les procédures de la troisième reconstitution de ses ressources, plusieurs gouvernements membres ont versé leurs contributions à l'avance juste avant ou après la clôture de l'exercice. En juin, le Danemark et la Finlande ont notifié à l'IDA qu'ils verseraient la première tranche annuelle de leurs contributions, qui sont de 8,8 millions de dollars et de 4,1 millions de dollars respectivement. D'autres avances sur leurs contributions qui ont été reçues à temps pour qu'il en soit fait mention dans le présent rapport sont celles du Canada et du Royaume-uni, chacune d'un montant de 50 millions de dollars. D'autres pays envisagent de prendre les mêmes mesures. Il est à noter aussi qu'après la fin de l'exercice, les Administrateurs de la Banque ont recommandé aux Gouverneurs d'approuver, sans attendre leur Assemblée annuelle de septembre, un don à l'IDA de 110 millions de dollars prélevés sur le revenu net de la Banque pour l'exercice 1971. Votant par correspondance, les Gouverneurs ont approuvé cette proposition au début du mois d'août. *{p. 5} Comme on le verra dans (a Deuxième Partie du présent rapport où sont analysés les flux de l'aide aux pays_en_voie_de_développement et le montant de leur dette extérieure, il reste très nécessaire que ces pays reçoivent les fonds de l'IDA et aussi que dans l'assistance totale qui leur est fournie, il y ait davantage de capitaux prêtés aux conditions de l'IDA. Les projections calculées sur la base de la dette de quatre-vingts pays_en_voie_de_développement au 31 décembre 1969, laissent penser que les obligations que ces pays ont contractées au titre du service_de_la_dette ont augmenté deux fois plus vite que leurs recettes d'exportation en 1970, soit environ 20% contre 9%. Le taux_de_croissance du PNB en 1970 a baissé dans le monde entier, mais cette baisse a été plus grave dans les pays_industrialisés et il s'ensuit que les perspectives de vente des pays insuffisamment développés sur les marchés extérieurs paraissent assez sombres. Les flux de capitaux d'origine publique et privée provenant des seize principaux pays fournisseurs d'aide aux pays_en_voie_de_développement et des institutions multilatérales de développement ont augmenté de plus de 8% en 1970 par rapport à l'année précédente, et pour la première fois ils ont atteint près de 15 milliards de dollars, Cette augmentation d'un milliard de dollars consiste dans sa quasitotalité en crédits publics à l'exportation et en fonds privés consentis à des conditions relativement rigoureuses, qui se sont dirigées surtout vers les pays dont le niveau de développement_économique est assez élevé. Par contre, les apports vers les pays pauvres d'Afrique et d'Asie du Sud ont continué à baisser, aussi bien en chiffres absolus qu'en pourcentage du total. Le volume global des dons et prêts d'origine publique et des autres catégories d'aide au développement à long_terme est resté à peu près le même qu'en 1969, et les conditions moyennes dont cette aide est assortie n'ont guère changé. Les engagements financiers que les trois institutions du Groupe de la Banque ont souscrits en faveur du développement ont atteint au total 2.581 millions de dollars pendant l'exercice 1971. Si les opérations se maintiennent à ce niveau jusqu'à la fin de l'exercice 1973, la moyenne quinquennale enregistrée depuis le 30 juin 1968 aura plus que doublé par rapport à la moyenne des cinq années précédentes. Par comparaison avec cette même période, les prêts de la Banque elle-même se sont accrus de 116%; les crédits accordés par sa filiale qui consent des conditions de faveur, l'Association Internationale de Développement (IDA) ont monté de 119% et la filiale de la Banque qui opère dans le secteur_privé, la Société Financière Internationale (SFI), a augmenté de 179% le volume de ses prêts, prises de participations et autres engagements. Pendant l'exercice étudié, la Banque a consenti à quarante et un pays soixante-dix-huit prêts d'un montant total de 1.896 millions de dollars; cinquante-trois crédits de l'IDA (584 millions de dollars au total) ont été accordés à trente-quatre de ses membres - et la SFI a apporté son aide à vingt-trois entreprises dans quinze pays et effectué un investissement régional pour une somme totale de 101 millions de dollars. Les opérations de la SFI pendant l'exercice sont exposées en détail dans son rapport annuel; un bref résumé en est donné à la page 32 du présent rapport. Le montant total des prêts accordés par la Banque et l'IDA aux pays d'Afrique, d'Asie et de l'Hémisphère occidental ne s'est guère modifié pendant l'exercice 1971 par comparaison avec l'exercice précédent. Par contre les capitaux dirigés vers les pays_en_voie_de_développement d'Europe ont augmenté par rapport à l'exercice 1970. Une approche plus large. La répartition des prêts et crédits entre les divers secteurs économiques s'est également modifiée. C'est peut-être dans l'éducation et dans la modernisation des systèmes d'adduction d'eau et d'égouts dans les villes que les augmentations ont été les plus marquées. Certes, en chiffres absolus les montants restent relativement minimes dans le total, mais la brusque augmentation des pourcentages dans ces secteurs montre bien que le Groupe de la Banque s'attache à élargir le champ de son aide au développement. D'autres signes concrets en sont l'octroi par le Groupe d'un premier prêt à un projet de lutte contre la pollution et l'insertion dans les accords de prêt et de crédit de clauses prescrivant les mesures à prendre contre la pollution. En application des politiques adoptées pendant l'exercice par les Administrateurs, le Groupe de la Banque aborde maintenant les problèmes du développement de l'éducation dans une optique beaucoup plus large et il a étendu son accord de coopération avec l'Unesco à l'aide à la planification de l'enseignement. Pour la première fois, le Groupe a apporté une assistance importante à la recherche agricole - dans un cas, il a accordé un prêt à l'un de ses membres pour l'aider à mettre sur pied un nouveau programme national - dans l'autre il s'est joint à d'autres institutions pour organiser un groupe consultatif chargé de renforcer les services d'instituts internationaux qui déjà s'occupent de recherche agricole et aussi d'en créer de nouveaux. *{p. 6} Dans le domaine de l'adduction d'eau et de l'évacuation des eaux usées, la Banque a conclu avec l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) un accord de coopération comparable à ceux en vertu desquels l'Unesco et la FAO participent à la détermination et à la préparation des projets éducatifs et agricoles de la Banque (voir p: 37). Prêts pour la reconstruction. Les Administrateurs, soucieux d'assouplir l'assistance du Groupe aux pays_en_voie_de_développement, ont étudié et précisé la politique à appliquer dans le cas des prêts hors projet. Un prêt de cette catégorie a été accordé au Nigeria pour aider ce pays à exécuter un vaste programme de reconstruction après la guerre. Le Groupe a aussi participé à d'autres formes de prêts pour la reconstruction - il a aidé le Pérou après un tremblement de terre qui a causé d'immenses dégâts - de même il a porté assistance au Pakistan à la suite du cyclone qui a ravagé une partie du pays en novembre 1970. Le Groupe de la Banque a également pris des mesures pendant l'exercice pour améliorer la qualité de ses travaux de recherche et d'analyse économique; il disposera ainsi d'un acquis plus solide pour dispenser les avis et l'assistance technique que ses pays_membres sollicitent et aussi pour ses propres besoins opérationnels. Les problèmes de l'emploi et de la distribution des revenus ont tenu une place particulière dans les études générales exécutées pendant l'exercice, dans la préparation et l'évaluation des projets et dans la rédaction des rapports économiques et des analyses sectorielles. Dans les travaux que consacre la Banque à l'étude individuelle de l'économie d'un pays, elle met l'accent sur l'analyse approfondie de chaque secteur. Pour répondre aux préoccupations exprimées par de nombreux Gouverneurs à l'Assemblée annuelle de la Banque en septembre 1970, les services de la Banque ont entrepris pendant l'exercice une étude du fardeau de la dette des pays_en_voie_de_développement et des problèmes que leur pose le service de cette dette. L'analyse de ce problème qui figure dans la Deuxième Partie du présent rapport repose pour une bonne part sur les travaux exécutés pour cette étude. Pour tirer de l'expérience passée des orientations plus précises pour aujourd'hui et demain, la Banque a créé pendant l'exercice un service d'évaluation à posteriori de ses activités, chargé de déterminer la contribution réelle qu'elles apportent au développement des pays_membres. Ce service a entrepris un certain nombre d'études pilotes destinées à mettre au point la méthodologie la plus efficace -elles comportent une analyse de l'aide fournie à la Colombie et des résultats obtenus dans ce pays et une analyse des avantages escomptés et effectivement obtenus dans le cas d'une demi-douzaine de projets énergétiques exécutés dans divers pays. *{p. 7} *{fin de section} services_publics. Le développement dépend autant du degré d'efficacité des services chargés de l'exécution des projets et des programmes que du choix judicieux de la politique générale ou de l'existence de moyens de financement suffisants. C'est ainsi que la mise en place de services bien conçus et gérés joue un rôle crucial dans tout le processus de croissance_économique. Cette remarque s'applique tout particulièrement à l'infrastructure - et l'on entend par là principalement les transports, l'énergie électrique et les autres services_publics - qui est indispensable à la création d'une industrie moderne et au développement de l'agriculture au-delà du simple niveau de la subsistance. Tous ces secteurs exigent de nombreuses ressources financières et elles font défaut dans la plupart des pays. C'est pourquoi il est indispensable que ces ressources soient réparties conformément à un ordre de priorité du développement rationnellement défini et que la planification, l'exécution des projets et leur exploitation dans ces secteurs soient aussi efficaces que possible. C'est là un domaine dans lequel le Groupe de la banque_mondiale a acquis le plus d'expérience, et c'est dans ce secteur que sa contribution au développement par l'octroi d'une assistance technique a été la plus marquée. Il y a à cela deux raisons principales, qui sont la relation qui existe entre le financement et l'assistance technique dans le Groupe de la Banque et l'exceptionnelle continuité qui caractérise une bonne part des prêts de la Banque, particulièrement dans les transports et l'énergie électrique. (Un examen des activités d assistance technique du Groupe de la Banque figure à la page 35). Un financement par le Groupe de la Banque n'est consenti que si les pays acceptent et utilisent efficacement les conseils et l'assistance technique qu'on leur fournit, aussi bien sur les problèmes de politique générale et les questions d'organisation, d'administration et de financement que sur les aspects techniques des projets. Dans le cas des transports et des services_publics, l'assistance technique dont un pays bénéficie pour organiser des services bien conçus et bien gérés peut avoir une importance primordiale, à cause de l'interdépendance qu'il y a entre ce secteur et les autres, et aussi à cause de la part des ressources publiques que ces services absorbent. Il ne s'ensuit pas néanmoins que les conditions attachées par la Banque à l'octroi de capitaux pour les projets se traduiront automatiquement par des résultats tangibles et on ne peut garantir que l'affaire sera menée à bien parce que le pays a demandé et obtenu des conseils. Il s'agit bien souvent plutôt d'assurer aux opérations une continuité grâce à laquelle prêteurs et emprunteurs pourront s'attaquer aux problèmes dans un effort commun au niveau du personnel d'exécution. Les incidences de ce secteur sur les problèmes qui se posent dans d'autres domaines. Particulièrement dans les cas où il est nécessaire de modifier la politique ou de réformer les institutions, il est évident que des relations étroites et confiantes sont indispensables pour que l'assistance technique porte tous ses fruits et que les projets soient menés à bien. Ce sont là des choses que la Banque et l'IDA ont pu constater dans de nombreux pays, lorsqu'elles ont aidé à financer une série de projets relatifs à l'électricité ou aux transports. Dans certains cas, ces rapports se sont maintenus sans guère de solution de continuité pendant de longues périodes, comme c'est le cas de la Colombie, où le Groupe a financé une série continue de projets afin de contribuer à satisfaire les besoins croissants de ce pays en énergie électrique. L'importance de cette continuité ressort peut-être avec encore plus de netteté si on fait la comparaison avec des situations où les rapports n'ont pas encore été noués avec autant de succès et l'on songe notamment aux efforts que fait le Groupe actuellement pour accroître l'aide qu'il apporte à ses États membres dans le domaine des télécommunications et dans l'approvisionnement en eau (voir ci-après, pages 29 et 27). *{p. 21} En raison du volume des ressources qui sont consacrées à ces secteurs, et du fait que les autres secteurs sont étroitement tributaires de leur efficacité, un grand nombre des problèmes fondamentaux dont les Administrateurs sont saisis, revêtent une importance particulière dans le cas des transports et des services_publics. L'un est le chômage, qui pose de graves problèmes: dans quelle mesure est-il possible, par exemple, d'utiliser des méthodes ergatiques de construction, d'exploitation et d'entretien du réseau routier, sans en même temps renoncer aux avantages du projet en cours d'exécution, parmi lesquels figure aussi la création_d'_emplois? C'est là un problème urgent, qui préoccupe de plus en plus le Groupe de la banque_mondiale à mesure que le chômage continue d'augmenter face à l'explosion démographique des pays_en_voie_de_développement. Ce dilemme se pose le plus fréquemment dans le cas des projets de construction et d'entretien des routes. Il est à espérer qu'une enquête approfondie sur les méthodes de construction, qui est actuellement menée par des équipes d'experts-conseils employés par la Banque, aidera peut-être à y trouver une solution. Il se peut aussi qu'on tire des enseignements d'une vaste étude entreprise en Afrique orientale, des différents types et normes de routes, des méthodes pour chiffrer leurs avantages relatifs, et des possibilités qu'il y aurait dans les travaux de construction de substituer la main-d'_oeuvre au capital ou inversement. Cette étude est actuellement exécutée par le Laboratoire de Recherche Routière du Royaume-uni, en coopération avec la Banque, et l'on envisage d'en organiser une analogue pour l'Afrique occidentale. Il saute aux yeux que les problèmes d'énergie, d'approvisionnement en gaz et en eau, de transports et de communications sont intimement imbriqués avec ceux que pose la croissance accélérée des villes. Où est la cause et où est l'effet? Peut-on penser qu'une amélioration de la conception de la planification et de la mise en place dans le temps de tous ces services_essentiels et peut-être de nouvelles mesures fiscales, de nouvelles procédures de fixation des tarifs, etc. pourraient contribuer à ralentir, sinon à renverser l'exode des populations rurales vers des villes déjà surpeuplées, ou à en atténuer les conséquences ? Là encore, ces problèmes sont intimement liés à ceux de la population et de l'emploi, à la lenteur avec laquelle se développe l'agriculture, au manque des installations qui pourraient donner de l'attrait à la vie à la campagne, et à ces forces qui poussent à s'agglomérer les sociétés qui se modernisent. Les réponses sont difficiles à trouver, mais les recherches se poursuivent. *{p. 22} *{fin de section} Industrie. Le Groupe de la Banque a apporté une aide considérable à l'industrie dans les pays_en_voie_de_développement, à la fois directement et par l'intermédiaire de sociétés financières de développement et autres établissements du même ordre. Cette catégorie de financement est entrée pour environ 15% dans le total des prêts, crédits et investissements pour le développement accordés par la Banque, l'IDA et la SFI au 30 juin 1971, ce qui représentait en chiffres absolus 3.132 millions de dollars. *{p. 29} N'est pas compris dans ce total l'élément d'aide à l'industrie qui peut être inclus dans les prêts et crédits consentis pour le développement général, pour l'exécution de programmes, pour des projets agricoles, ou pour quelques projets polyvalents dont les autres secteurs sont les principaux bénéficiaires. Pendant l'exercice examiné, les capitaux fournis à l'industrie ont atteint au total 386 millions de dollars à vingt-deux pays, qui se répartissent en onze prêts de la Banque de 285 millions de dollars, et en vingt-quatre investissements de la SFI de 101 millions de dollars. (On trouvera des renseignements plus détaillés sur les opérations de la SFI dans le rapport annuel de cette Société.) Au moment de la clôture de l'exercice, l'évaluation ou la négociation d'un certain nombre de projets industriels qui étaient soumis à la Banque ou à l'IDA en vue d'un financement direct, était presque terminée. L'un d'entre eux a été approuvé par les Administrateurs - il s'agit d'un projet polyvalent au Botswana, qui' a pour objet de créer l'infrastructure nécessaire à une grande entreprise d'exploitation minière du cuivre et du nickel. Un prêt de la Banque de 32 millions de dollars servira à financer ce projet, qui coûtera 60 millions de dollars, et qui comporte la production et le transport d'électricité, l'approvisionnement en eau, l'installation de moyens de transport par route et par rail, et la construction à Pikwé d'une cité qui sera dotée d'un centre médical. C'est l'aide aux sociétés financières de développement qui constitue la fraction la plus forte et augmentant le plus vite du total des prêts consacrés à l'industrie, puisqu'elle représente plus des deux cinquièmes du total depuis le début des opérations de la Banque, et les deux tiers du total pour l'exercice 1971. Sous forme de prêts, de crédits, et de prises de participations, le Groupe a fourni 264 millions de dollars pendant l'exercice à dix-huit sociétés de cette catégorie, qui ont servi à financer des entreprises dans douze pays. *{p. 30} Il s'agit là d'une augmentation des prêts de plus d'un cinquième par rapport à l'année précédente, et ce chiffre représente plus de 18% du total cumulé de 1 420 millions de dollars. Le financement, au cours de cet exercice, a comporté 253 millions de dollars de prêts de la Banque, tandis que la SFI fournissait 10 millions de dollars sous forme de prêts et investissait 700 000 dollars dans le capital social de ces sociétés. D'une manière générale, les sociétés financières de développement qui bénéficient de l'aide du Groupe de la Banque financent les projets industriels et commerciaux de petite ou moyenne importance et pour l'essentiel, elles fournissent à l'intérieur des pays, les mêmes services que ceux rendus par la SFI sur le plan international. La Banque s'est beaucoup occupée depuis 1950 de lancer cette catégorie d'institutions, soit en les finançant, soit en leur prêtant une assistance technique, et on peut dire que ces intermédiaires financiers ont beaucoup contribué au développement_économique. Elles ont particulièrement réussi à modifier les attitudes des milieux_d'_affaires et à introduire des idées nouvelles pour ce qui est de l'élaboration et de la gestion des projets. Certaines de ces sociétés sont devenues des éléments déterminants de l'industrialisation de leur pays respectifs parce qu'elles canalisent les capitaux tant publics que privés, aussi bien nationaux qu'étrangers, vers l'investissement productif. Dans un petit nombre de cas, elles ont même commencé à modifier les vues des hommes_d'_affaires et à mettre au point les mécanismes et les procédures qui permettront de créer ou développer des marchés financiers. Le Groupe de la banque_mondiale a aidé à organiser quinze de ces sociétés, auxquelles il a fourni des capitaux, et il a contribué à en réorganiser six autres. Il a également aidé à recruter des spécialistes pour les postes-clés de ces sociétés, et il en a aussi formé un grand nombre, à la fois par les cours dispensés à l'Institut de développement_économique (voir p: 38) et au moyen de programmes spéciaux. La SFI est représentée dans les conseils_d'_administration de dix-sept de ces sociétés. Les SFD obtiennent leurs fonds de diverses sources publiques et privées aussi bien dans le pays même qu'à l'étranger. La part de ces capitaux qui provient du Groupe de la banque_mondiale varie beaucoup d'une société à l'autre; elle est en moyenne d'environ 24%, mais elle peut atteindre près de 60%, tout cela en fonction des circonstances. Dans certains cas, la participation du Groupe de la Banque a été le facteur déterminant qui a permis à ces sociétés d'obtenir des fonds suffisants d'autres sources. Avec l'aide du Groupe de la Banque, les SFD ont accordé des prêts, pris des participations au capital social et souscrit d'autres engagements en faveur d'entreprises industrielles et commerciales pour un montant total qui dépasse 4 500 millions de dollars. *{p. 31} Un seul cas suffira à montrer à quel point le Groupe de la Banque a contribué au développement des sociétés financières de développement: il s'agit de la Banque turque de développement industriel (TSKB) qui, en novembre 1970, a bénéficié de sa neuvième ligne de crédit ouverte par le Groupe, soit un prêt de la Banque de 40 millions de dollars, qui porte à 128 millions de dollars l'aide totale que la TSKB a reçu de la Banque, de l'IDA et de la SFI. La TSKB fut l'un des deux premiers clients de la Banque, dans le domaine de l'aide aux sociétés financières de développement. C'est la Banque qui a été à l'origine de sa création en 1950, en lui fournissant un premier prêt de 8,7 millions de dollars. En 1963, la SFI a fait son premier investissement en actions de la TSKB et s'est fait représenter au conseil_d'_administration mais y a renoncé depuis. Un grand nombre de hauts_fonctionnaires de la TSKB sont venus à la Banque suivre une formation spéciale, certains comme boursiers de l'Institut de développement_économique, d'autres en travaillant dans les services de la Banque et de la SFI. A l'heure actuelle, la TSKB détient environ quatre cents prêts non amortis. Elle a participé à des entreprises_privées de Turquie pour un montant équivalent à 216 millions de dollars, dont 13 millions sous forme d'achat d'actions. Depuis quelques années, elle a pu accroître ses ressources en empruntant à la Banque Européenne d'Investissement et à la Kreditanstalt für Wiederaufbau. L'aide totale accordée par la SFI pendant l'exercice, a atteint 101 millions de dollars, soit une baisse par rapport au maximum de 112 millions de dollars, atteint l'exercice précédent. Cela a porté le total cumulé du financement accordé par la SFI à 578 millions de dollars, dont 50 millions de dollars sous forme d'engagements d'aide éventuelle et d'accords de garantie. Sur le total des capitaux fournis depuis sa création, 306 millions de dollars, soit plus de la moitié, ont été engagés au cours de ces trois dernières années. Sur le total qui a été fourni par la SFI pendant l'exercice 1971, 88 millions de dollars sont allés à l'industrie manufacturière, 11 millions de dollars aux sociétés financières de développement, et plus de 2 millions de dollars au tourisme. D'autres investisseurs ont participé à ces mêmes engagements financiers à concurrence de 332 millions de dollars. Un Département des marchés financiers, créé à la SFI pendant l'exercice, sera le principal instrument du Groupe de la Banque dans les efforts qu'il fait pour stimuler, dans les pays_en_voie_de_développement, l'acheminement de l'épargne privée vers les investissements productifs. *{p. 32} *{fin de section} Assistance technique et autres activités. Assistance technique. Nombreux sont les pays_en_voie_de_développement qui ont besoin qu'on les aide à déterminer et préparer les études qui orienteront leurs programmes futurs d'investissement. Le Groupe de la Banque a marqué un intérêt croissant à planifier cette assistance pour l'ensemble d'un pays afin de garantir que les études des projets hautement prioritaires sont préparées et exécutées en temps voulu, que ces études prévoient les questions qui pourraient être soulevées par des investisseurs potentiels et que l'on utilisera efficacement les ressources_humaines et financières limitées dont on dispose pour ces études. Chaque fois que cela est possible, la Banque contribue à la planification à l'échelon du pays en déterminant quelles sont les études qu'il faudra exécuter; pour ce faire, elle envoie à intervalles réguliers, des missions économiques dans les pays_membres et aussi des missions spéciales chargées d'étudier un secteur particulier. Ces travaux sont coordonnés avec ceux d'autres organismes_internationaux et bilatéraux d'aide au développement et en particulier le Programme des nations_unies pour le Développement (PNUD) et d'autres institutions de la famille des nations_unies. Des membres du personnel de ces organisations participent régulièrement aux missions organisées par la Banque ou coopèrent avec elles. La Banque a procédé à une révision de ses accords de travail avec le PNUD, qui s'attache plus que par le passé à la programmation au niveau des pays, pour garantir que les pays_membres et les institutions elles-mêmes retirent les avantages les plus grands de cette nouvelle approche. La Banque continuera à entretenir les relations les plus étroites avec le PNUD et, sur cette question de programmation par pays, elle a offert d'aider cet organisme et ses représentants toutes les fois que cela serait possible. La principale méthode qu'emploie le Groupe de la Banque pour financer l'assistance technique est d'affecter des fonds spéciaux à cette intention dans les prêts et crédits qu'il accorde pour des projets. Les objectifs sont le plus souvent: la formation à l'étranger et l'octroi de bourses pour aider les pays emprunteurs à trouver dans leur population même, les cadres de gestion et autres spécialistes dont ils ont besoin; le recrutement d'experts et de consultants étrangers qui fourniront des conseils en matière de gestion et de finances, et qui formeront le personnel nécessaire à l'exploitation efficace du projet financé par la Banque et enfin l'exécution d'études de justification économique qui prépareront une nouvelle expansion du projet ou du secteur. Au cours de l'exercice 1971, des prêts de la Banque et des crédits de l'IDA pour un montant total de 1 406 millions de dollars comprenaient des provisions pour assistance technique d'un montant de 49,6 millions de dollars. Ces provisions se répartissaient ainsi: 4,4 millions de dollars pour la formation de stagiaires à l'étranger; 40 millions de dollars pour le recrutement d'experts et de consultants étrangers et 5,2 millions de dollars pour les études de justification économique. *{p. 35} L'Indonésie a reçu un crédit d'assistance technique d'un montant de 4 millions de dollars; il doit servir à aider le Gouvernement à préparer toute une série de projets. Un crédit de 2 millions de dollars avait été accordé aux mêmes fins en 1968. La Banque fournit également de l'assistance technique en sa qualité d'organe d'exécution pour le PNUD qui est la principale source de financement de l'assistance technique au sein de la famille des nations_unies. La Banque encourage ses pays_membres à demander au PNUD les capitaux dont ils ont besoin pour des projets spécifiques d'assistance technique. Dans ce cas, la Banque aide souvent le gouvernement à préparer sa demande, et accepte, le cas échéant, de servir d'organe d'exécution, Pendant l'exercice écoulé, la Banque a servi d'organe d'exécution de seize nouveaux projets approuvés par le PNUD, le total des sommes engagées s'élevant à environ 14 millions de dollars. Sur ce montant 8 millions de dollars ont été affectés à des études des transports dans les pays suivants - Bolivie, Corée, Paraguay, Pérou, Philippines, République démocratique du Congo, République démocratique populaire du Yémen, et Sierra Leone. Le reste des engagements, soit 6 millions de dollars, serviront à financer une étude des transports et du développement urbains de Bogota, en Colombie, un projet de planification du développement en Éthiopie, une étude de l'industrie sucrière en Indonésie, un plan de développement du tourisme à Fidji, une étude du tourisme en Afghanistan, une aide à la Régie des Eaux et de l'Électricité du Pakistan Oriental et des études du système de télécommunications au Mali et au Sénégal. En règle générale, le Groupe de la Banque n'accorde pas de subventions pour l'assistance technique. Des exceptions ont été faites dans certains cas, lorsque pour des raisons de procédure, notamment, le PNUD n'a pas été en mesure de donner suite à des demandes de pays_membres que la Banque jugeait importantes dans le contexte de son propre programme de prêts. En 1971, les procédures du PNUD se sont assouplies, si bien que le Groupe de la Banque n'a pas eu à accorder des fonds uniquement destinés à l'assistance technique, exception faite du crédit de l'IDA à l'Indonésie dont il est fait mention ci-dessus. Depuis 1959, le PNUD a désigné la Banque comme organe d'exécution de quatre-vingt-huit études qu'il finançait pour une valeur totale de 76,6 millions de dollars et quarante-trois de ces études sont actuellement en cours d'exécution. Sur les quarante-cinq qui ont été menées à bien, trente-sept au total se sont concrétisées par des investissements ou des projets inclus dans le programme de prêts du Groupe de la Banque. Dans le cas de trois études, l'objectif n'était pas de mener directement à un investissement; c'est seulement dans le cas de trois études, qu'un investissement n'a pas été jugé possible. *{p. 36} *{fin de section} L'Institut de développement_économique (IDE). L'Institut de développement_économique assure, à l'intention des États insuffisamment développés, membres de la Banque, la formation de leurs fonctionnaires qui sont chargés des programmes et des projets de développement. Les cours qu'il dispense, chacun étant normalement limité à 25 participants, consistent en conférences suivies de discussions de groupes, de travaux pratiques, dont certains consistent à résoudre un problème particulier, et de visites organisées. Il est fait grand usage, dans les cours, de documents relatifs à des cas particuliers, qui, pour la plupart sont des problèmes que la Banque a dû résoudre dans la réalité. Les cours sont donnés par le personnel enseignant à plein_temps de l'Institut et par des spécialistes venant des divers départements du Groupe de la banque_mondiale, d'autres organisations_internationales, de services_publics, d'universités et d'entreprises_privées. Les cours qui ont eu lieu pendant l'exercice 1971 ont été un cours de dix-huit semaines sur le développement en général, donné en anglais; cinq cours de neuf à onze semaines sur la programmation sectorielle et l'évaluation des projets dans l'industrie, l'agriculture (deux cours), l'éducation et les transports, tous donnés en anglais; et des cours généraux d'évaluation des projets donnés en français et en espagnol sur une période de onze et neuf semaines respectivement. Les deux cents participants aux cours qui ont été dispensés cette année venaient de soixante et onze pays et de cinq organisations_internationales. Depuis sa création en 1956, plus de 1 300 fonctionnaires venant de plus de cent pays et organisations_internationales, ont suivi les cours de l'IDE. En plus des cours réguliers qu'il donne au Siège de la Banque à Washington, l'Institut aide d'autres organismes_internationaux et nationaux qui exécutent des programmes de formation. Cette aide peut prendre des formes diverses, qui sont la participation à l'organisation du cours, des conseils sur l'élaboration des programmes, le détachement de personnel enseignant pour de courtes périodes ou l'envoi de matériel d'enseignement. Un cours de huit semaines d'analyse de projets, organisé à l'intention de stagiaires africains anglophones, donné pour la première fois en 1969, a été répété à Nairobi en juillet et août 1970 avec la collaboration de l'Institut Africain de Développement et de Planification Économique (IDEP), et l'Institute for Development Studies de l'Université de Nairobi. Coordination de l'aide. Les entretiens qui ont eu lieu au cours de l'exercice avec les gouvernements membres intéressés ont montré à l'évidence que l'on attend de la Banque qu'elle s'attache davantage à améliorer la coordination de l'aide au développement. C'est un domaine dont la Banque s'est depuis longtemps préoccupé et qu'elle juge très important. Ses efforts principaux ont porté sur l'organisation et l'administration de services de coordination de l'aide fournie à des pays_en_voie_de_développement particuliers, fonction à laquelle les gouvernements et les autres institutions_internationales portent de plus en plus d'intérêt. A l'heure actuelle, les groupes de coordination de l'aide sont nombreux et variés et leurs promoteurs sont aussi très divers. Ceux qui sont le plus connus sont les consortiums, groupes consultatifs et autres organismes officiels de coordination, et les enquêtes par pays exécutées par le Comité Inter-américain de l'Alliance pour le Progrès (CIAP). La Banque préside deux consortiums, le Groupe d'aide à Ceylan et treize groupes consultatifs. La Banque est membre du Consortium d'aide à la Turquie, créé sous les auspices de l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE), ainsi que du Groupe intergouvernemental d'aide à l'Indonésie, que préside le Gouvernement des Pays-bas , elle fournit également l'aide de ses services à ces groupes et à d'autres groupes réunis par les gouvernements de la Guyane et du Honduras, ainsi qu'aux études par pays effectués par le CIAP. *{p. 38} Au cours de l'exercice, la Banque a pris des mesures pour réunir certains groupes qui étaient quelque peu entrés en veilleuse et à en former de nouveaux pour venir en aide à trois pays. C'est ainsi que le Groupe consultatif pour la Thaïlande a repris ses réunions en septembre 1970. Le Groupe pour le Nigeria a tenu une séance en mai 1971 pour la première fois depuis février 1966. Un nouveau Groupe consultatif pour les Philippines a tenu une réunion inaugurale en avril 1971 de même que, en mai les Groupes consultatifs organisés en faveur de la République démocratique du Congo et de l'Éthiopie. Il semble d'après certains faits récents que dans le cas de quelques pays, la coordination de l'aide au niveau du Groupe consultatif, qui porte normalement sur une étude des résultats économiques obtenus par le pays et de ses besoins en ressources extérieures, pourrait utilement être complétée par l'existence d'un groupe analogue de coordination organisé dans le pays même - un tel groupe pourrait rendre de grands services, particulièrement en matière de coordination de l'assistance technique et des besoins en capitaux de préinvestissement au niveau local. Dans les pays où plusieurs institutions nationales et internationales d'aide apportent une assistance financière ou autre à divers projets de développement, des problèmes de coordination se posent chaque jour qui peuvent souvent être résolus sur place si les agents locaux de ces institutions en sont informés et sont autorisés à prendre immédiatement les mesures nécessaires. Le Comité d'Aide au Développement de l'OCDE a beaucoup étudié cette coordination dans le pays même, et la Banque a participé activement aux discussions qui ont eu lieu à ce sujet. On est arrivé à l'idée, à laquelle la Banque s'est ralliée sans réserve, que le gouvernement bénéficiaire, s'il peut et veut le faire, devrait se charger d'organiser et de présider des réunions de coordination au niveau local, avec l'aide, le cas échéant, de la Banque, du PNUD et d'autres institutions. La banque_mondiale a participé à toute une série de discussions au niveau des services avec la Banque Inter-américaine de Développement (BID) et le CIAP pour améliorer la coopération entre les trois institutions. Afin d'aider le CIAP, on a décidé de coordonner, pour ce qui est aussi bien de leur déroulement dans le temps que des sujets abordés, les enquêtes qu'il exécute dans les pays avec les travaux des missions économiques de la Banque qui se rendent en amérique_latine; on vise ainsi à ce que le CIAP dispose pour ses enquêtes des rapports économiques les plus récents de la Banque. La documentation nécessaire à ses études de pays sera préparée en étroite collaboration avec la banque_mondiale, la BID et d'autres institutions, mais ce sera bien entendu, le secrétariat du CIAP qui sera responsable en dernier ressort. La Banque espère que cet accroissement de la coopération au niveau des services contribuera à améliorer la coordination de l'assistance extérieure fournie par des institutions multilatérales et nationales dans la région du CIAP. Grâce à des capitaux fournis par le PNUD, la Banque a entrepris un programme de recrutement de personnel et d'experts-conseils pour la Banque de Développement des Caraïbes, qui a été créée pendant l'exercice précédent avec l'aide technique de la Banque. De concert avec la Banque centraméricaine d'intégration économique, la Banque a étudié les possibilités d'une action commune visant à développer l'industrie dans le marché_commun centraméricain. *{p. 39} Le problème des produits de base: Mise en oeuvre des décisions. De nombreuses activités du Groupe de la Banque pendant l'exercice 1971 ont porté sur "le problème des produits de base", qui pendant les deux exercices précédents a fait l'objet de débats prolongés des Administrateurs. En 1969, ces discussions avaient abouti à une série de décisions des Administrateurs qui ont servi à orienter les travaux que le Groupe a consacré aux divers problèmes que posent les produits primaires: il s'agissait d'aider les pays trop vulnérables aux fluctuations de ces marchés à diversifier leur production, de chercher à rendre ces produits primaires plus compétitifs et d'aider à la conclusion d'arrangements internationaux destinés à stabiliser leurs prix. En fait, les Administrateurs donnaient mandat d'intensifier des efforts déjà entamés dans ces directions. *{p. 40} En 1970, les Administrateurs avaient passé en revue ces questions lorsqu'ils avaient délibéré sur deux recommandations pertinentes de la Commission Pearson; cette dernière proposait que la Banque, lors de son examen des prêts sollicités pour des projets agricoles tienne compte "non seulement de ce qu'ils rapporteront au pays emprunteur, mais aussi de l'incidence, sur les cours mondiaux, du complément de capacité productive ainsi créé"; la Commission indiquait aussi que "le financement de stocks régulateurs raisonnables à l'appui d'accords et de politiques bien conçus sur les produits, devrait être considéré comme un objectif valable de l'aide extérieure". Sur le premier point, si la Banque a déjà tenu compte de l'effet qu'un accroissement de la capacité de production pouvait avoir sur les prix, elle a reconnu qu'il fallait faire un nouvel effort pour trouver le moyen de mieux évaluer les effets des fluctuations de prix. Sur le second point, les Administrateurs n'ont pas jugé nécessaire dans l'immédiat le financement de stocks régulateurs, particulièrement parce que les moyens financiers fournis par l'intermédiaire du FMI semblent suffisants. On peut citer les activités suivantes entreprises pendant l'exercice 1971, qui sont bien dans la ligne des décisions prises par les Administrateurs dans ce secteur: - La Banque a accordé un premier prêt pour un programme national de recherche agricole (page 7) et elle est l'un des promoteurs d'un groupe consultatif qui viendra en aide à la recherche agricole internationale (page 40). - La Banque a intensifié ses travaux d'analyse des marchés et de prévision des prix, qui ont porté sur toute une gamme de produits de base. Cela a nécessité l'étude expérimentale approfondie de certains produits; la préparation, dans le cadre de tous les rapports où sont évalués des projets produisant des articles pour l'exportation, d'annexes analysant, dans toute la mesure du possible, les effets que peuvent avoir ces projets sur les marchés mondiaux; la consultation systématique de certaines organisations_internationales de produits tout au début de l'évaluation de ces projets. Pendant l'exercice, la Banque a consulté les groupes d'étude de l'Organisation pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO) sur dix de ces projets, et l'organisation_internationale du Café (OIC) à propos de l'un d'entre eux. La Banque envisage d'organiser des consultations analogues avec d'autres groupes d'études. - La coopération accrue avec le Fonds de Diversification du Café (FDC) de l'OIC, qui a été créé en 1958, et qui est le seul fonds de ce genre constitué en vertu d'un accord international sur un produit. La Banque s'est déclarée prête à conclure des arrangements de financement mixtes ou parallèles avec le FDC, pour l'exécution de projets de diversification des Cultures dans les pays producteurs de café. - La place accrue donnée à l'expansion des problèmes de diversification dans les rapports économiques et les études sectorielles de la Banque, ainsi que dans ses programmes d'investissement dans les divers pays. Études économiques. L'analyse économique est le principal instrument dont se sert la banque_mondiale pour décider de sa politique, orienter ses opérations et répondre aux demandes d'assistance technique ou d'études spéciales provenant aussi bien de gouvernements membres que des institutions mondiales de développement. Elle a renforcé ses moyens pour exécuter ces travaux pendant l'exercice 1971 (voir Mouvements du personnel et Réorganisation des départements, page 50). Plus d'une vingtaine d'importants problèmes de politique dont les Administrateurs ont été saisis pendant l'exercice, exigeaient des recherches et des analyses économiques fort étendues. Cela s'applique par exemple aux nombreuses questions qu'a soulevées la Commission Pearson dans ses recommandations, dont trente-trois s'appliquaient directement au Groupe de la banque_mondiale et que les Administrateurs ont prises en considération. Il est souvent fait mention dans le présent rapport, des discussions auxquelles elles ont donné lieu. L'application de la science économique est naturellement un élément vital de presque toutes les opérations quotidiennes. Elle fournit les principaux outils d'analyse qui permettent l'étude des économies des pays_membres et des perspectives de leur développement, ainsi que des effets probables que peut avoir telle politique déjà appliquée ou telle autre qui pourrait lui être substituée. Cette application de la science économique est indispensable pour étudier rationnellement les secteurs économiques et les priorités de financement, pour évaluer les projets, pour déterminer la solvabilité des emprunteurs et pour fournir l'assistance technique nécessaire, surtout lorsqu'il s'agit de planification et de politique_économiques. *{p. 41} Des études étroitement axées sur les opérations sont exécutées par les économistes de la Banque ou par des consultants qu'elle recrute, lorsque des problèmes se posent au cours des activités de prêts ou d'assistance technique, ou lorsqu'à l'expérience, on s'aperçoit de la nécessité d'analyses plus approfondies ou d'emploi de techniques nouvelles. Ces études se concrétisent, si besoin est, dans des monographies d'un intérêt professionnel plus vaste, qui sont publiées dans une série intitulée "World Bank Staff Occasional Papers". L'une d'entre elles, "L'analyse des risques dans des conditions d'incertitude" par Louis Y: Pouliquen, a été publiée pendant l'exercice 1971, et plusieurs autres sont en préparation. Des études d'une portée plus vaste sont parfois publiées pour la Banque sous forme de livres par la Johns Hopkins Press. On peut citer par exemple la publication pendant l'exercice 1971 de "The Structure of Protection in Developing Countries" (Les formes de la protection dans les pays_en_voie_de_développement) par Bela Balassa et ses collaborateurs. Études spéciales. Comme des problèmes plus vastes se dessinent en matière de développement, la Banque s'efforce de s'y attaquer dans de bonnes conditions et d'y trouver des solutions rationnelles en organisant des études plus fondamentales, pour lesquelles elle a recours à toutes les techniques de recherche et d'analyse dont les économistes disposent. C'est ainsi par exemple, que les services de la Banque ont entamé une vaste étude de l'emploi et de la distribution des revenus et de leur interaction avec le développement. On espère que celle étude renseignera sur l'ampleur du problème du chômage et sur les moyens à employer pour lui trouver une solution, sur les moyens de concilier ces deux politiques parfois contradictoires que sont la recherche du plein_emploi et la croissance de la production et sur les problèmes de politique qui se posent. Une étude importante sur ce sujet était presque terminée au moment où a pris fin l'exercice. Il s'agit d'une étude de programmation au Mexique qui a pour objet d'analyser les rapports entre le projet, le secteur et l'ensemble de l'économie, et qui utilise à chaque niveau un système de modèles de programmation corrélatifs. Une analyse analogue est en cours de préparation en Côte-d'Ivoire. Toutes ces études ont pour objet de rendre plus efficaces les outils dont on dispose et de mettre au point une méthodologie nouvelle, qui permettrait de trouver des solutions mieux adaptées aux questions qui confrontent aussi bien la Banque que ses pays_membres; et l'on pense notamment aux conflits qui risquent de se poser lorsqu'il y a à choisir entre la croissance de l'économie d'une part, et l'emploi et la distribution des revenus de l'autre. En 1970, à l'Assemblée annuelle du Conseil des Gouverneurs à Copenhague, de nombreux Gouverneurs ont exprimé la préoccupation que leur causent la charge toujours croissante de la dette extérieure des pays_en_voie_de_développement et la proportion de plus en plus grande de leurs recettes d'exportation qu'ils doivent consacrer au paiement du service de l'a dette. Le Président de la Banque a décidé, en réponse à ce souci, de faire exécuter une étude approfondie de ce problème par ses services et ce travail a été mené à bien. (On trouvera page 59 un examen du problème de la dette.) Il arrive à l'occasion, que d'autres institutions_internationales demandent à la Banque d'étudier des problèmes spécifiques de développement d'intérêt_commun et que, le cas échéant, elle fasse des recommandations à leur sujet. En 1969, le Conseil du Commerce et du Développement de la Conférence des nations_unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) a prié la Banque "d'étudier la possibilité d'élaborer un système de financement supplémentaire, et, si cela est jugé nécessaire, les moyens de le mettre en vigueur". Il s'agissait des dispositions que l'on pourrait prendre pour atténuer les répercussions que des baisses inattendues des recettes d'exportation de produits primaires peuvent avoir sur les programmes de développement; la Banque avait déjà en 1965 effectué une étude à ce sujet à la demande de la CNUCED. De son côté, la Commission Pearson avait insisté pour qu'un tel système soit adopté dans les plus brefs délais. Comme la Banque n'a pu obtenir la certitude que l'on disposerait des fonds nécessaires en dehors de ceux qui sont fournis pour l'aide ordinaire au développement, elle a avisé la CNUCED en août 1970, qu'elle s'abstiendrait pour le moment d'étudier plus en détail cette proposition. Les Administrateurs ont débattu de cette question en avril 1971 sur la base d'une nouvelle demande de la CNUCED insistant pour que la Banque s'efforce encore de mettre au point les détails d'un système de financement supplémentaire et d'en évaluer le coût probable; il a été décidé que l'examen du problème se poursuivrait et qu'en attendant, la Banque prendrait en considération, dans chaque cas d'espèce, les difficultés qu'une baisse de leurs recettes d'exportation causerait à un pays donné. *{p. 42} *{fin de section} TENDANCES ET PERSPECTIVES DU FINANCEMENT DU DEVELOPPEMENT. Les flux de ressources financières extérieures vers les pays_en_voie_de_développement. Les statistiques dont on dispose actuellement sur les flux de capitaux vers les pays_en_voie_de_développement en 1970 semblent confirmer les tendances qui se sont manifestées de plus en plus nettement depuis 1965. Le montant total net des apports de capitaux de toutes sources dans l'ensemble des régions en voie de développement a été proche de 15 milliards de dollars en 1970, soit une augmentation d'à peu près 1 milliard par rapport à 1969. Si cette augmentation s'explique en partie par un accroissement des apports nets des institutions multilatérales de développement, néanmoins plus de la moitié des capitaux ont été fournis par des sources bilatérales, essentiellement les crédits à l'exportation financés par les gouvernements des pays_membres du CAD et les capitaux privés, qui comprennent des crédits à l'exportation et des investissements_privés. L'aide_publique_au_développement des pays_membres du CAD qui représente la principale source de subventions et de prêts à des conditions de faveur n'a que légèrement augmenté par rapport au niveau atteint en 1967. Un aperçu des contributions des pays_membres du CAD est donné dans le tableau 3 de l'Annexe statistique. Les flux nets totaux, ont augmenté de plus de 1 milliard de dollars en 1970 par comparaison avec 1969. Néanmoins l'élément qui représente l'aide_publique_au_développement dans le total a augmenté de moins de 200 millions de dollars, ce qui fait quasi la part des flux totaux dans le PNB global des pays_membres du CAD est restée inchangée à environ 0,75%, celle de l'aide_publique_au_développement a encore baissé et ne représente plus selon les estimations que 0,34% du PNB. Dans le flux net d'aide_publique_au_développement, soit environ 6,8 milliards de dollars, la part des dons a légèrement augmenté en chiffres absolus, mais est restée à un niveau relatif d'environ 65% du total alors qu'elle atteignait près de 90% au début de la décennie écoulée. L'augmentation du total des apports publics est due à une brusque augmentation des "autres flux publics" qui ont plus que doublé pour atteindre une pointe de 1,1 milliard de dollars en 1970. Ce poste représente essentiellement des crédits à l'exportation financés par les pouvoirs_publics à des conditions où l'élément de subvention est très faible. Au début des années 1960 le poste "autres flux publics" n'entrait guère que pour 5 à 10% dans le total des apports publics de capitaux par les pays_membres du CAD; en 1970 il s'est élevé à plus de 14% du total et c'est à ce poste que l'on doit presque toute l'augmentation non négligeable inscrite dans la colonne Ides flux d'origine publique. Les apports nets de capitaux privés en provenance des pays_membres du CAD ont encore augmenté en 1970 pour atteindre 6,7 milliards de dollars, perpétuant ainsi la croissance régulière qui a commencé en 19621963 à partir d'un niveau d'environ 2,5 milliards de dollars. *{p. 55} L'augmentation en 1970 est due surtout aux crédits privés à l'exportation garantis; une forte augmentation de l'investissement direct a été annulée par une baisse équivalente des investissements de portefeuille. Au cours des cinq dernières années, le montant net des crédits privés à l'exportation accordés aux pays_en_voie_de_développement a presque doublé chaque année et en 1970 ces crédits apparaissent pour plus de 30% dans les apports totaux de capitaux privés alors qu'ils ne représentaient qu'environ 15% au début des années 1960. Pendant la même période, c'est-à-dire de 1965 à 1970, les investissements_privés directs se sont élevés en moyenne à quelque 2,5 milliards de dollars par an, avec de légères fluctuations d'une année sur l'autre. Pour ce qui est des autres apports privés, définis un peu vaguement par la rubrique "investissements de portefeuille" dans les statistiques du CAD, leur composition s'est aussi modifiée. Comme le montre le tableau 12 de l'Annexe statistique, depuis 1968 les pays_en_voie_de_développement se sont procuré sur les marchés monétaires internationaux de moins en moins de capitaux à long_terme, en partie parce que les coûts des capitaux sur ces marchés ne cessaient d'augmenter. Pour les remplacer, il y a eu une croissance phénoménale des autres formes de financement bilatéral direct de source privée, c'est-à-dire en majeure partie des prêts accordés par les banques et autres établissements financiers, tels que les compagnies d'assurances et les syndicats d'investissement. Alors que les décaissements nets de cette catégorie de financement s'élevaient à environ 500 millions de dollars par an vers 1965, ils ont plus que doublé et dépassé 1 milliard en 1970. En raison de la situation de la dette extérieure des pays_en_voie_de_développement qui sera examinée ci-après, il importe, lorsque l'on évalue ces tendances, de se rappeler les conditions auxquelles sont accordés les principaux éléments des apports totaux de capitaux. Des enquêtes récentes effectuées par la banque_mondiale indiquent que pour les quatre-vingts pays_en_voie_de_développement sur lesquels portent les tableaux de l'annexe statistique du présent Rapport, les grandes catégories de financement extérieur que nous venons de décrire sont assorties des conditions typiques résumées ci-dessus (par ordre croissant des "conditions de faveur"). Pour résumer les tendances depuis 1965 des flux nets en chiffres absolus de ressources fournies par ces catégories on peut dire que les crédits d'origine privée ont plus que doublé , que les achats d'obligations et autres flux prives n'ont guère changé , que les crédits-fournisseurs privés ont presque triplé , que les "autres flux publics" des pays_membres du CAD ont quadruplé, que les prêts multilatéraux ont augmenté d'à peu près de moitié; que les prêts en chiffres nets des pays du bloc sinosoviétique ont, selon les estimations, légèrement baissé (et en tout état de cause ne représentent qu'environ 5% du total des flux nets) , que les prêts nets des pays_membres du CAD au titre de l'aide_publique_au_développement ont augmenté d'environ 30%; et que le volume des dons s'est accru d'environ 10%. En d'autres termes, si les ressources apportées par les catégories où l'élément de subvention est relativement élevé, se sont accrues très lentement, voire pas du tout, depuis quelques années, par contre l'augmentation dans la plupart des catégories où les prêts se font à des conditions rigoureuses a été rapide, et tout porte à croire qu'elle va se poursuivre au même rythme, du moins dans l'avenir immédiat. Les tableaux 4 et 10 de l'Annexe statistique font ressortir de deux façons différentes les conséquences de ces tendances. Le tableau 10 montre que dans toutes les régions en voie de développement l'élément de subvention dans le total global des prêts et des dons qui leur sont fournis a baissé depuis 1965. *{p. 56} Dans la majeure partie des cas cette baisse a été régulière; pour l'ensemble des pays_en_voie_de_développement la diminution de l'élément moyen de subvention a été de l'ordre de 25% à partir du niveau de 1965. Comme les versements aux pays se font normalement avec un certain retard sur les engagements (la longueur du retard étant naturellement fonction du type de transaction) il est peu vraisemblable que la composition des nouveaux flux bruts vers les pays_en_voie_de_développement se modifie dans l'immédiat. Le tableau 4 de l'Annexe statistique montre en détail quelle a été cette composition pendant quelques années récentes. Le. tableau est disposé de façon à faire ressortir les modifications dans la répartition géographique des décaissements totaux (dans la colonne de droite), les changements dans la distribution globale des flux par catégorie (dans les lignes au bas du tableau) et les changements dans la composition des flux pour chaque région (à l'intérieur du tableau). Pour ce qui est de la composition des flux par catégorie, on peut considérer que pour l'essentiel les tendances examinées ci-dessus ont abouti grosso modo à un remplacement des dons par des flux de capitaux privés assortis de conditions rigoureuses. Pendant la période étudiée, les décaissements bruts de prêts et de crédits privés qui ne représentaient autrefois qu'un quart du total sont passés maintenant à près du tiers tandis qu'au contraire la proportion des dons est tombée d'un tiers à environ un cinquième. Malgré de légères augmentations des prêts publics bilatéraux et des prêts et crédits accordés par les institutions multilatérales de développement, la part des capitaux fournis par ces sources dans les flux bruts est restée à peu près constante depuis 1965. Ces changements dans la composition des apports de capitaux ont naturellement eu des répercussions sur la répartition géographique des flux. Comme la majeure partie de l'augmentation provient de sources privées, en ont bénéficié au premier chef les régions où l'économie se développe déjà rapidement, où le niveau du développement est relativement élevé et où des possibilités exceptionnelles d'investissement se présentent, comme dans certaines des industries extractives. Par contre les régions pauvres, en particulier l'Afrique et l'Asie du Sud, où les perspectives de croissance_économique sont peut-être plus incertaines, ont reçu une part moindre du total des flux bruts de capitaux extérieurs vers les pays_en_voie_de_développement. Si en 1965 l'Afrique et l'Asie du Sud obtenaient ensemble à peu près 47% du total, cette proportion n'était plus que d'environ 33% en 1969. En chiffres absolus les flux bruts ont baissé de près d'un milliard de dollars par an pour ces deux régions alors que le total des fonds reçus par l'Asie de l'Est et les pays de l'Hémisphère occidental augmentait de plus de 1,5 milliard de dollars entre 1965 et 1969. Les tendances dans la composition des flux à l'intérieur des régions sont moins faciles à distinguer, mais elles ne semblent pas s'écarter beaucoup de celles constatées dans l'ensemble du monde. Dans toutes les régions sauf l'Afrique, la part des dons dans les apports bruts de capitaux a baissé. *{p. 57} Dans l'Hémisphère occidental la proportion des prêts et crédits d'origine privée a continué à monter lentement et en 1969 celle catégorie de financement constituait la moitié du total des décaissements bruts. On a enregistré aussi une brusque augmentation de la part totale des apports de capitaux privés au Moyen-orient et en Europe méridionale; si le niveau a doublé en Asie du Sud cela est dû surtout au fait que l'on partait d'un niveau extrêmement bas. La très forte augmentation de la part relative des flux publics bilatéraux dans le total des apports de capitaux en Asie de l'Est doit être attribuée en grande partie à la reprise des prêts à l'Indonésie par les pays_membres du CAD encore que les flux de cette catégorie vers les autres pays de la région aient aussi monté. Pour conclure, disons que les flux de capitaux privés et les crédits à l'exportation fournis par les pouvoirs_publics ont continué à augmenter rapidement tandis que les chiffres nets de l'aide_publique_au_développement semblent s'être stabilisés aux environs de 7 milliards de dollars par an. Il semble donc que l'initiative du financement extérieur passe graduellement du secteur_public au secteur_privé, ce qui a bien entendu des répercussions aussi bien quant aux conditions dont les capitaux sont assortis que de la répartition géographique des flux. Ainsi qu'il est indiqué ci-après dans la section consacrée à la dette extérieure, le service_de_la_dette qui est due aux créanciers privés pendant les quelques années à venir est déjà très élevé par rapport à la dette privée en cours et il est particulièrement lourd dans les régions où les apports de capitaux privés continuent à former une part croissante des flux totaux de capitaux extérieurs. De récentes études entreprises à l'OCDE et dans plusieurs pays_membres du CAD indiquent que cette conclusion serait encore plus affirmée si l'on disposait de données satisfaisantes sur les flux et l'accumulation des investissements directs dans les pays_en_voie_de_développement. Nous n'avons pas parlé de cette catégorie d'apports financiers dans l'examen général que nous venons de faire mais elle n'en représente pas moins la source la plus importante de capitaux privés pour les pays_en_voie_de_développement. Toutes incomplètes que soient les données dont on dispose, il semble que c'est dans les pays de l'Hémisphère occidental que se trouvait une bonne moitié du total estimé de 35 à 40 milliards de dollars que représentent les avoirs d'investisseurs directs étrangers dans les régions en voie de développement. La seule exception à l'orientation générale prise par les flux d'autres catégories de capitaux privés est que la région qui ces dernières années vient ensuite par l'importance des investissements directs est l'Afrique où l'investissement dans l'extraction pétrolière et les mines s'est vite développé. Il est difficile, et peut-être risqué, de tabler sur les tendances récentes des flux de capitaux pour dresser des prévisions pour l'avenir, même quand ces tendances semblent être nettement établies et lorsque cet effort de prévision semble souhaitable pour la planification et l'analyse du développement dans le monde. Tout ce qu'on peut dire raisonnablement à ce sujet est que les études qui ont pu être faites en ce sens indiquent que dans le proche avenir on ne saurait s'attendre à de profondes modifications des schémas des quelque cinq dernières années. Il ne faut pas oublier bien entendu que cette conclusion, certes très provisoire, pourrait être radicalement infirmée par toutes sortes d'événements, particulièrement sur le plan de la politique internationale. Par contre, une fois que l'on parvient à une conclusion de ce genre, il n'est pas du tout difficile de dresser un tableau simple et mécanique des directions générales que prendront les flux de capitaux pendant les quelques années à venir. Des travaux préliminaires en ce sens ont été entamés par la banque_mondiale et les premiers résultats n'incitent guère à l'optimisme. S'il ne se produit donc pas un renversement radical des tendances récentes quant au volume, à la composition et aux conditions des flux de capitaux vers les pays_en_voie_de_développement, on ne saurait guère s'attendre au cours des dix prochaines années à une augmentation de quelque importance du chiffre net des transferts de fonds, qui, non compris les prises de participations dans des entreprises, sont d'environ 5 milliards de dollars, ainsi que le montre le tableau 9 de l'Annexe statistique. Si les projections de ce genre ne s'écartent pas trop de la croissance des flux de capitaux et du service_de_la_dette que l'on a pu mesurer ces dix dernières années, un accroissement aussi lent des transferts totaux nets de ressources vers les pays_en_voie_de_développement a de profondes répercussions sur leur croissance_économique. Un tel volume d'apports de capitaux serait très inférieur aux estimations les plus raisonnables des besoins nets en capitaux calculés pour la prochaine décennie et serait loin d'atteindre les objectifs minimaux qui ont été suggérés pour la Deuxième décennie du développement et encore moins les chiffres plus ambitieux proposés il y a deux ans par la Commission d'étude du développement_international. En outre, si l'on garde à l'esprit les larges écarts entre les dettes et la situation de la balance_des_paiements d'un pays à l'autre, il semble inévitable que certains des pays_en_voie_de_développement aient à faire face à une diminution de leur taux_de_croissance ou à des difficultés de service_de_la_dette. *{p. 58} La dette extérieure des pays_en_voie_de_développement. Le Groupe de la banque_mondiale se préoccupe depuis de nombreuses années de la dette extérieure des pays_en_voie_de_développement "Ce souci s'explique en partie par la nécessité de protéger le propre portefeuille de prêts de la Banque, comme le stipulent ses Statuts: dès le début des opérations de prêts, les emprunteurs ont été invités à fournir à la Banque des renseignements sur l'état de leur dette en cours. Mais l'idée plus fondamentale est que le Groupe tient à ce que le développement soit mené à bien et les services de la Banque ont donc été amenés à s'intéresser particulièrement aux perspectives de la dette des pays_membres dans le cadre normal de leurs travaux économiques. Depuis quelques années les milieux internationaux s'intéressent de plus en plus à ce sujet. La Commission d'étude du développement_international, que présidait M: Lester B. Pearson, a qualifié d'explosif l'accroissement de la dette et des paiements au titre du service_de_la_dette au cours des quinze dernières années et elle a noté que "les dettes que de nombreux pays_en_voie_de_développement ont contracté pèsent lourdement sur la gestion à court et long_terme de leurs économies". Le Groupe d'études Peterson créé par le Président Nixon pour le conseiller sur les dimensions des programmes_d'_aide des États-unis pendant les années 1970 a indiqué que le fardeau actuel de la dette de nombreux pays_en_voie_de_développement était un "problème urgent" qui risquait "d'arrêter les importations et les investissements et de freiner le développement". En mars 1970 le Comité interaméricain de l'Alliance pour le Progrès a demandé à la Banque de l'aider à effectuer une étude spéciale de la dette des pays d'amérique_latine. Le Président de la banque_mondiale devant ces manifestations croissantes d'inquiétude s'est engagé à l'Assemblée annuelle de 1970 du Conseil des Gouverneurs à Copenhague à faire exécuter par les services de la Banque une étude approfondie de tous les aspects de l'endettement croissant des pays_en_voie_de_développement. Cette étude est maintenant terminée et transmise aux Gouverneurs. Les indications qui figurent dans cette partie du Rapport annuel sont pour une bonne part fondées sur les conclusions de cette enquête. La situation actuelle de la dette. Il n'est malheureusement pas possible de faire entièrement confiance aux statistiques dont on dispose sur la dette extérieure: quelques-uns des plus gros pays débiteurs eux-mêmes n'ont pas une idée précise du montant total de leur dette et les renseignements sur la dette qui n'est pas garantie par les pouvoirs_publics du pays emprunteur sont si rares qu'il a fallu inévitablement exclure totalement de notre analyse cette catégorie de dettes. Une comparaison des rapports que fournissent les pays créditeurs et les pays débiteurs donne à penser que les statistiques de la banque_mondiale sur la dette extérieure, qui jusqu'ici ont été établies à partir d'informations données par les pays débiteurs, sous-estiment quelque peu même la dette publique ou garantie par l'État, encore qu'avec le temps les données que recueillent la Banque s'améliorent sensiblement et que l'on puisse penser que de nouveaux progrès seront faits. On peut toutefois affirmer sans crainte de se tromper qu'à la fin de 1969, quatre-vingts pays_en_voie_de_développement avaient ensemble une dette publique extérieure de près de 59 milliards de dollars dont environ 13 milliards de dollars de montants non décaissés. Comme le montre le tableau 6 la moitié de cette dette est due par huit pays seulement et huit autres pays sont redevables de près de la moitié du reste. Le montant total de la dette publique extérieure en cours a augmenté au taux moyen de 14% par an de 1955 à 1969, mais comme le tableau 5 de l'Annexe statistique le montre, ce taux a un peu baissé depuis deux ou trois ans. Dans certaines régions l'augmentation était nettement plus forte que la moyenne; par exemple, en Asie du Sud (dont la dette extérieure vers 1955 n'était pas très élevée) le taux d'augmentation annuel a été de 22% et en Asie de l'Est de 19%. Par contre, dans l'Hémisphère occidental, où la dette était déjà considérable au milieu des années 1950, l'augmentation de la dette a été relativement lente puisqu'elle était en moyenne de 11% par an. Les paiements au titre du service_de_la_dette se sont aussi accrus d'environ 14% par an entre 1956 et 1969 et cette dernière année ils s'élevaient à 5 milliards de dollars. Mais il vaut la peine de noter que le service_de_la_dette a augmenté beaucoup plus lentement pendant les années 1960 (9% par an) que vers la fin des années 1950 (29% par an). Ce ralentissement a été constaté dans toutes les régions en voie de développement, à l'exception de l'Asie de l'Est où l'augmentation du service_de_la_dette s'est légèrement accélérée entre 1960 et 1970. *{p. 59} Il se peut que l'on ait surestimé le taux_de_croissance du service_de_la_dette vers la fin des années 1950 parce que les données qui portaient sur l'année de base étaient relativement peu fiables et, en tout état de cause, la dette étant relativement peu importante au départ, l'augmentation en chiffres absolus est assez modérée. Mais ce que l'on ne peut pas encore expliquer complètement c'est cette lenteur de l'augmentation des paiements du service_de_la_dette pendant les années 1960 par comparaison avec l'accroissement de la dette en cours; cela est sans doute dû à divers facteurs, notamment l'allongement pendant les premières années 1960 des échéances et des différés d'amortissement pour les prêts et crédits accordés par les pouvoirs_publics et les institutions multilatérales, l'allongement progressif des échéances moyennes des crédits-fournisseurs depuis quelques années et la renégociation de la dette multilatérale entreprise par certains grands pays débiteurs vers la fin des années 1960. Dans un certain nombre de pays_en_voie_de_développement, particulièrement en Europe méridionale, au Moyen-orient et dans l'Hémisphère occidental, le taux_de_croissance de la dette en cours dans les années 1960 n'a guère été supérieur, voire a été égal, au taux_de_croissance du PNB (aux prix courants). Dans ces mêmes régions, les paiements au litre du service_de_la_dette ont augmenté en moyenne un peu plus lentement que le PNB aux prix courants et à peu près au même rythme que les recettes en devises. Dans d'autres pays, spécialement en Asie et en Afrique aussi bien la dette non amortie que les paiements au litre du service_de_la_dette ont augmenté beaucoup plus rapidement que le PNB ou les recettes en devises. De ce fait, le ratio du service_de_la_dette aux recettes en devises (que nous appellerons ici le "ratio du service_de_la_dette") a augmenté rapidement dans ces pays (tableau 7 de l'Annexe statistique). A Ceylan par exemple ce ratio est passé de moins de 1% en 1960 à plus de 10% en 1970 et dans les deux pays Inde et Pakistan il a monté d'environ 5% à plus de 20% pendant la même période. Certes le ratio du service_de_la_dette est un indicateur assez insuffisant de la gravité du problème de la dette dans un pays, et les comparaisons internationales de ces ratios n'ont qu'une valeur très relative. Certains pays qui ont une bonne réputation sur les marchés financiers internationaux sont capables de jouir d'un crédit élevé, quel que soit le ratio de leur service_de_la_dette. Il faut aussi tenir compte d'autres facteurs si l'on veut voir le problème dans sa véritable perspective: la stabilité et la diversité des exportations du pays; les perspectives d'un accroissement des exportations dans l'avenir; la mesure dans laquelle le pays peut réduire ses importations sans que la production en subisse les contrecoups; la composition de la dette en cours; le volume des réserves de devises et la possibilité pour le pays de se procurer un financement compensatoire; et la façon dont le pays s'est acquitté jusqu'ici du service de sa dette. Néanmoins le ratio du service_de_la_dette indique dans quelle mesure le pays doit tenir compte de son endettement extérieur dans le choix de sa politique_économique et une augmentation rapide de ce ratio fait en général présager des problèmes pour l'avenir, sauf si l'on peut penser que les entrées brutes de capitaux vont rapidement augmenter ou que les perspectives de recettes d'exportation sont particulièrement bonnes. *{p. 6-} Sur le total de la dette publique extérieure en cours à la fin de 1969 une proportion de 54a% représentait la dette due à des créditeurs bilatéraux publics, 19,2% celle due à des institutions multilatérales telles que le Groupe de la Banque et les banques régionales de développement et seulement 26,4% représentaient la dette à des créanciers privés (tableau 5 de l'Annexe statistique). Sur la dette due à des créanciers privés, un peu moins de la moitié consiste en crédits-fournisseurs et pour le reste il s'agit d'obligations détenues par des investisseurs étrangers, de dettes dues à des établissements financiers et de dettes provenant de la nationalisation d'avoirs étrangers. Dans certaines régions les dettes dues à des créanciers privés étaient nettement moins importantes qu'on ne pourrait penser à la lecture de ces moyennes. C'est ainsi que la proportion de la dette totale à l'égard des créanciers privés était particulièrement faible en Asie du Sud et n'a été que de 22,3% en Afrique. Au contraire la dette envers les créanciers privés a été lourde dans l'Hémisphère occidental (37,9%), au Moyen-orient (50%) et dans un petit nombre de pays dans d'autres régions. Les différences du volume relatif de la dette envers les créanciers privés expliquent en partie pourquoi le ratio du service_de_la_dette à la dette en cours a varié d'une région à l'autre, comme les chiffres ci-dessus l'indiquent. C'est seulement au Moyen-orient et en Europe méridionale (où un très petit nombre de pays_en_voie_de_développement relativement prospères peuvent se procurer des capitaux privés à long_terme) que le ratio du service_de_la_dette dû en 1970 au titre de la dette en cours à des créanciers privés à la fin de 1969 était inférieur à 20%. On ne saurait utiliser ces ratios pour mesurer avec précision la "dureté" des conditions attachées aux emprunts et cela à cause de la forte incidence qu'à l'âge du prêt sur l'importance du ratio, au moment où se fait la mesure (le ratio est normalement beaucoup plus faible pour un prêt qui vient juste d'être accordé que pour un prêt qui est presque entièrement remboursé). Mais ces ratios donnent une indication que d'autres données confirment, à savoir que les prêts accordés par des créanciers privés ont normalement des périodes de remboursement beaucoup plus courtes que les prêts accordés par des créditeurs bilatéraux publics ou des institutions multilatérales de prêt. Pendant la période de 1970 à 1975 les pays_en_voie_de_développement auront à verser au titre du service_de_la_dette plus de 19.830 millions de dollars pour la dette de 43.410 millions de dollars non amortie à la fin de 1969, envers les créanciers bilatéraux publics et les créditeurs multilatéraux, c'est-à-dire sur celle période de six ans un ratio du service_de_la_dette à la dette encours de 46%. D'autre part, le service dû au litre de la dette d'environ 15,530 millions de dollars envers les créanciers privés devrait se monter, selon les calculs, à un total d'environ 12,970 millions de dollars, soit un ratio de 84%. Dans certains pays, tels que l'Argentine, le Brésil, le Mexique, le Pérou, les Philippines, la Yougoslavie, on peut penser que le ratio du service_de_la_dette aux créanciers privés est proche de 100% ou même le dépasse. Les difficultés du service_de_la_dette dans le passé et leurs causes. Depuis environ 1955, huit pays_en_voie_de_développement ont entamé une renégociation de leur dette multilatérale et la plupart d'entre eux ont renouvelé leur demande à plusieurs reprises. Ce nombre de pays est certes réduit mais sur la liste figurent un grand nombre des plus gros débiteurs parmi les pays_en_voie_de_développement, et il faut compter de plus qu'il y a en au moins douze autres qui ont sollicité de leurs créanciers bilatéraux un réaménagement du calendrier de remboursement de leur dette. Ces derniers mois le Pakistan a cessé de verser les paiements au litre du service_de_la_dette contractée auprès de sources bilatérales d'aide_publique_au_développement sauf s'il est autorisé à s'en acquitter en nature, et le gouvernement de ce pays a indiqué qu'il souhaiterait discuter avec ses créanciers du fardeau de la dette. *{p. 61} Dans certains débats internationaux qui ont eu lieu ces dernières années au sujet de la dette extérieure des pays_en_voie_de_développement, ce terme de "dette" est devenu presque synonyme de "problème de la dette" si bien qu'il est peut-être prudent de rappeler que ces pays, comme le font les sociétés ou les particuliers, empruntent parce qu'ils jugent que c'est de leur intérêt de le faire. Être à même d'emprunter à l'étranger constitue un avantage important et le volume de la dette extérieure d'un pays peut bien refléter non pas tellement la gravité de son "problème" que la mesure dans laquelle les pays étrangers acceptent de lui venir en aide en lui accordant des crédits. Il n'y a donc rien d'intrinsèquement menaçant dans une croissance rapide de la dette extérieure et rappeler qu'un grand nombre de pays_en_voie_de_développement pourraient aujourd'hui tirer utilement partie de capitaux extérieurs supplémentaires, c'est justifier une nouvelle augmentation de leur dette extérieure. A quoi faut-il donc attribuer ce problème de la dette auquel tant de pays_en_voie_de_développement se heurtent depuis quelques années? Les causes en sont nombreuses et aucun examen de caractère général ne saurait donner une juste idée de leur variété. Mais deux aspects du problème sont fondamentaux: dans quelle mesure le pays emprunteur est-il à même d'utiliser le capital pour accroître sa productivité ? Dans quelle mesure est-il capable de "transformer" le produit du capital en devises qui lui serviront à assurer le service de sa dette ? Il faut bien constater que dans l'un et l'autre cas, particulièrement l'aptitude à obtenir des devises, les pays_en_voie_de_développement sont plus mal placés que les pays_industrialisés. Tout d'abord l'étude de la productivité du capital montre que dans bon nombre de pays_en_voie_de_développement le rendement du capital de maints projets est au moins égal à celui que procurent les projets exécutés dans les pays_industrialisés, ou ce qui fournit une comparaison plus juste, au coût des capitaux sur les marchés internationaux. Mais dans de nombreux autres pays les projets réalisables, au niveau actuel de développement de ces pays, sont encore fort restreints. Leur nombre augmenterait si ces pays disposaient de main-d'_oeuvre qualifiée et d'une infrastructure suffisante - mais pour cela il faut investir de grosses sommes dans la construction d'écoles, la construction ou la modernisation de routes, l'installation de services médicaux (hôpitaux), etc. Or, ces investissements, sans lesquels le développement est impossible, ne sont rentables financièrement qu'après de nombreuses années. Le problème de la transformation d'une partie du rendement des investissements en devises qui serviront à assurer le service_de_la_dette extérieure n'est pas sans rapport avec la possibilité de réaliser des projets financièrement viables dans le pays emprunteur. Mais certains aspects des problèmes justifient qu'on les étudie séparément. Il est rare que le mécanisme d'ajustement de la balance_des_paiements fonctionne dans les pays_en_voie_de_développement avec autant de souplesse que dans les pays développés. Cela est dû en partie à ce que les facteurs de production sont moins mobiles dans les pays_en_voie_de_développement et qu'il est souvent long et difficile de réorienter vers les marchés internationaux des hommes et machines travaillant jusque là pour le marché intérieur. Il faut y voir aussi en partie le fait que le mécanisme d'ajustement fonctionne moins bien parce que, lorsque la réorientation des activités a été menée à bien, les pays_en_voie_de_développement s'aperçoivent souvent que les produits qu'ils sont le plus aptes à fabriquer pour les marchés internationaux sont ceux dont la vente se heurte à une faible élasticité de la demande, aux contingentements à l'importation, ou à des tarifs douaniers élevés. Il faut de toute évidence se garder de faire des prévisions générales sur l'évolution des termes de l'échange des pays_en_voie_de_développement dans leur ensemble, mais d'après ce qu'on a pu enregistrer par le passé, il y a tout lieu de croire que les prix de produits de base tels que les fibres textiles, le caoutchouc, le sucre et le thé vont baisser assez brusquement si les pays_en_voie_de_développement augmentent substantiellement leur offre sur les marchés mondiaux. C'est pour cette raison qu'il faut se féliciter des mesures qui sont actuellement prises pour accorder un certain degré de préférence, sur le marché des pays_industrialisés, aux exportations d'objets manufacturés par les pays_en_voie_de_développement. Il existe quelques pays_en_voie_de_développement qui sont tout à fait capables d'obtenir un rendement élevé des capitaux qui leur sont fournis et de "transformer" leur monnaie locale en devises. Ces pays sont à même d'emprunter de gros montants de capitaux extérieurs aux taux_d'_intérêt pratiqués dans le commerce. Mais il y a bien d'autres pays où ces conditions ne sont pas réalisées et il leur est indispensable, pour éviter les problèmes que pose le service_de_la_dette, qu'on leur fournisse des capitaux extérieurs à des conditions très favorables en moyenne. *{p. 62} Le tableau 10 de l'Annexe statistique, qui est résumé ci-après, indique que sur la période 1965-69 l'élément de subvention' des prêts et des dons accordés aux pays_en_voie_de_développement a baissé de 59% à 45% (au taux d'actualisation de 10%). Comme dans toutes les régions, sauf au Moyen-orient et dans l'Hémisphère occidental, l'élément de subvention dans les seuls prêts n'a pratiquement pas changé (ce qui est assez remarquable, si l'on considère que les taux_d'_intérêt ont monté pendant cette période sur tous les marchés du monde) cette baisse de l'élément de subvention global marque que les conditions de prêts sont devenues plus rigoureuses au Moyen-orient et dans l'Hémisphère occidental, et ce qui est encore plus grave, que le volume des dons à beaucoup diminué. De plus, il n'est pas tenu compte dans ces chiffres des coûts supplémentaires que les pays_en_voie_de_développement ont à supporter à cause des conditions qui leur sont imposées quant à l'emploi des ressources extérieures qu'ils reçoivent; c'est ainsi que la majeure partie de l'aide publique et tous les crédits à l'exportation sont "liés" à l'achat dans le pays fournisseur, et d'autres conditions encore augmentent quelquefois le coût réel de l'aide pour les bénéficiaires. Comme ces conditions relèvent le taux_d'_intérêt effectif des prêts et diminuent la valeur réelle des dons, l'élément de subvention dans le total des flux est certainement inférieur aux pourcentages indiqués ci-dessus. Il n'en faut pas moins constater que, même si l'on tient compte de ces facteurs, l'aide_publique_au_développement continue à être fournie aux pays_en_voie_de_développement à des conditions très favorables. Compte non tenu des effets de l'aide liée, l'élément de subvention de l'aide publique a été en moyenne de 80% environ au cours de ces dernières années. Les rares pays qui n'ont pas reçu une aide_publique_au_développement à des conditions très favorables sont en majeure partie des pays qui ont un revenu par habitant assez élevé ou dont les perspectives de croissance de leurs exportations paraissent bonnes. Les pays débiteurs doivent aussi tenir compte des conditions des prêts privés. L'élément de subvention des crédits à l'exportation, sans parler bien entendu des obligations émises par les pays_en_voie_de_développement et des crédits des banques commerciales, est de toute évidence beaucoup plus faible que celui de l'aide publique et pour un grand nombre de pays_en_voie_de_développement "à revenu moyen" qui utilisent beaucoup ces sources de fonds - Argentine, Grèce, Iran, Mexique, République de Chine et Venezuela par exemple - l'élément de subvention dans les apports totaux de capitaux est inévitablement assez peu élevé; on peut dire néanmoins que, tout compte fait, les conditions auxquelles les capitaux sont fournis aux pays_en_voie_de_développement pris individuellement sont raisonnablement conformes à ce que les pays en cause peuvent supporter, compte tenu de la productivité des capitaux employés et des possibilités qu'ils ont de "transformer" leurs gains en devises. Nous ne voulons pas dire par là qu'on ne peut jamais attribuer les difficultés de service_de_la_dette à des conditions de prêt mal adaptées à la situation des pays. Nous n'entendons nullement suggérer non plus que le volume du capital fourni et les conditions dont il était assorti ont été chaque fois ce qui convenait dans le cas du pays en cause. *{p. 63} Bien au contraire, la diminution des dons et l'insuffisance actuelle des nouveaux engagements de prêt ont ensemble fait beaucoup baisser ces dernières années les flux nets de ressources dans certains pays_en_voie_de_développement (voir tableau 9 de l'Annexe statistique), et ont entraîné un durcissement marqué des conditions générales des entrées totales de capitaux dans ces pays. Ce sont là les raisons qui, peut-être plus que n'importe quel autre facteur, ont imposé en 1968, un réaménagement des conditions de remboursement de la dette indienne. Mais d'une manière générale, il semble juste de dire que ce ne sont pas les conditions des prêts qui ont été la cause principale des difficultés de service_de_la_dette. Il faut bien plutôt chercher l'origine de ces difficultés dans la façon dont le pays emprunteur gère l'ensemble de son économie. Certes, c'est seulement lorsque le service_de_la_dette devient un poste important de la balance_des_paiements du pays emprunteur et qu'il se produit une crise de balance_des_paiements que l'on songe à modifier le calendrier du remboursement de sa dette. Sur les soixante-dix-neuf pays dont les ratios du service_de_la_dette sont indiqués au tableau 7 de l'Annexe statistique, dix-neuf seulement avaient un ratio moyen du service_de_la_dette dépassant 10% pendant les années 1965-69. Il est à noter que parmi ces dix-neuf figurent tous les pays dont on a dû réaménager à l'échelon multilatéral les conditions de la dette, à l'exception de l'Indonésie dont le ratio moyen du service_de_la_dette pendant cette période était de 8%. Six autres pays ont du recourir à un réaménagement bilatéral du calendrier de leur dette. Mais il est rare qu'on puisse vraiment affirmer que les crises qui ont précédé les renégociations de la dette étaient essentiellement dues à la dette même. Dans le cas de chacun des réaménagements de la dette multilatérale, la nature du problème auquel se heurtait le pays était très complexe et l'augmentation du service_de_la_dette n'en était qu'un élément. Néanmoins, si l'on fait exception de la renégociation indienne dont nous avons fait état ci-dessus, il semble que toutes ces situations peuvent se classer en deux catégories. Dans certains cas, la caractéristique dominante a été une accumulation excessive de dettes à court_terme que les pays ont contractés pour annuler à l'avance les effets d'un déséquilibre de leur balance_des_paiements , sans avoir pris en même temps des mesures pour corriger ces problèmes fondamentaux que sont par exemple une monnaie surévaluée, ou un niveau de protection excessif. Dans les autres cas, il semble plus juste de parler d'une crise du développement. Les pays rentrant dans cette catégorie ont lancé des programmes d'investissement à long_terme trop ambitieux et mal exécutés et financés au moyen de crédits à court_terme négociés sans vue d'ensemble des obligations ainsi contractées. Les garanties des crédits à l'exportation et les systèmes d'assurance dont peuvent bénéficier les fournisseurs des pays_industrialisés sont tels qu'ils ont agi sans la prudence dont ils auraient dû faire preuve à constater la mauvaise gestion évidente des projets. Tout cela s'est terminé en général par une crise politique grave, qui a mis fin à l'imprévoyance mais a laissé le pays chargé d'une dette énorme et improductive. *{p. 64} C'est aux pays_en_voie_de_développement eux-mêmes qu'il incombe au premier chef d'éviter les crises de la dette. Au sens large du terme, on peut dire qu'une gestion judicieuse de la dette est synonyme d'une politique_économique rationnelle, en effet, quel que soit le niveau d'aide que les pays étrangers peuvent apporter à des conditions de faveur, il ne suffira jamais à éviter les futures crises de la dette, si les bénéficiaires ne mobilisent pas efficacement leurs propres ressources, s'ils les investissent sans programme bien conçu ou s'ils maintiennent un taux_de_change qui n'incite pas les producteurs à travailler pour l'exportation. Au sens étroit, une gestion judicieuse de la dette impose que, le pays limite sa dette extérieure, sauf lorsqu'il peut présumer raisonnablement que les capitaux empruntés permettront une production qui peut, directement ou indirectement, être transformée en ressources supplémentaires en devises pendant la période durant laquelle il doit assurer le service_de_la_dette. Lorsqu'un pays applique ces politiques, les crises de la dette n'ont rien d'inévitable. L'exemple de la Colombie est particulièrement instructif à cet égard. Ces dernières années, la Colombie a laissé se dévaluer sa monnaie proportionnellement à la hausse des prix intérieurs; elle a accordé aux industriels et aux agriculteurs toutes sortes de stimulants qui les incitaient à exporter; elle a vigoureusement mené une politique d'accroissement des recettes fiscales, orienté les dépenses du secteur_public vers la production et appliqué une politique monétaire efficace. La Colombie en même temps n'a pas cédé à la tentation de tabler à l'excès sur les crédits-fournisseurs à court et à moyen terme. Le résultat de toutes ces mesures est que, malgré une augmentation de la dette publique extérieure de ce pays, qui est passée de 6% du PNB en 1956 à 18% en 1969, le fardeau du service_de_la_dette est resté relativement léger. Le ratio du service_de_la_dette publique aux exportations de biens et de services non-facteurs est passé d'environ 5% en 1957 à 12% en 1963, pour retomber progressivement à 8% en 1969. Le ratio du service_de_la_dette à l'épargne intérieure brute a encore moins augmenté pendant cette période. Mais le cas de la Colombie fait aussi ressortir le rôle que les pays créditeurs peuvent jouer. Si aucune aide du créancier, quel qu'en ait pu être le montant, n'aurait pu éviter les crises de la dette en Colombie dans le cas où ce pays n'aurait pas appliqué une politique rationnelle, la Colombie eût eu par contre des difficultés sur le plan politique à appliquer cette politique judicieuse, si elle n'avait pas bénéficié d'un apport généreux de capitaux extérieurs à long_terme, provenant en majeure partie de l'AID des États-unis, de la BIRD et de la BID. A la fin de 1955, la dette publique extérieure de la Colombie était dans la proportion de 54% remboursable en cinq ans; mais à la fin de 1969, cette proportion était tombée à 25%. Certes cette remarquable amélioration de la structure de la dette colombienne ne s'explique pas uniquement par le fait que ce pays s'est vu offrir des capitaux à long_terme par des institutions_publiques de prêt, comme le prouve l'absence de progrès comparable dans des pays qui ont été aussi favorisés à cet égard; mais il n'en est pas moins vrai que sans ces capitaux à long_terme, l'amélioration enregistrée en Colombie eût été extrêmement difficile à réaliser. Les perspectives d'avenir. Lorsqu'ils ont préparé l'étude de l'endettement extérieur des pays_en_voie_de_développement, les services de la Banque se sont surtout attachés à évaluer quels seraient les montants du service_de_la_dette à long_terme dans le cas d'une trentaine de pays_en_voie_de_développement, qui à eux seuls représentent à peu près 80% de la dette extérieure en cours dans tous les pays_en_voie_de_développement. De par leur nature même, des analyses de ce genre portent sur des éléments très incertains: un changement de la situation politique, l'absence de moussons, la découverte d'un minerai, un seul de ces événements ou beaucoup d'autres moins spectaculaires peuvent en très peu de temps changer radicalement les perspectives du service_de_la_dette d'un pays. Si, dans les projections qui ont été faites, on a tenu compte des modifications prévues des prix à l'exportation, il a été impossible de prendre en considération les effets éventuels d'une accélération de l'inflation sur les marchés mondiaux, ou de modifications Substantielles des politiques en matière de commerce extérieur et de taux_de_change. Il est donc très difficile de généraliser dans ce domaine, mais il semble sur la base de l'échantillon retenu que l'on puisse grouper la plupart des pays_en_voie_de_développement en trois catégories. Dans la première figure la majorité des pays_en_voie_de_développement qui, comme par le passé, devraient pouvoir dans l'avenir prévisible, éviter de graves difficultés de service_de_la_dette. Dans certains cas, cela s'explique parce que ces pays n'ont encore contracté que très peu de dettes extérieures et qu'ils ont obtenu de l'étranger des ressources à des conditions très favorables (comme dans le cas de nombreux pays africains). *{p. 65} Il faut pour d'autres pays attribuer cette situation relativement favorable au fait qu'ils savent gérer rationnellement une dette même importante, lorsque les paiements du service_de_la_dette sont concentrés sur une période relativement courte, le pays a de grandes possibilités d'améliorer la situation en remplaçant la dette à court_terme par une dette à plus longue échéance lorsqu'il s'est acquitté de la dette antérieure. Dans un cas, celui de l'Indonésie, le pays a déjà obtenu un réaménagement de sa dette à des conditions très favorables, ce qui devrait le mettre en mesure d'éviter toute nouvelle difficulté de service_de_la_dette. Les pays de cette catégorie représentaient ensemble plus de la moitié de la dette des pays_en_voie_de_développement à la fin de 1969. Dans la deuxième catégorie, on ne trouve go 1 un très petit nombre de pays, mais qui entrent pour environ un cinquième dans la dette totale des pays_en_voie_de_développement. Il s'agit essentiellement de pays dont le développement exigera pendant une longue période à venir l'apport d'une aide extérieure massive, soit parce qu'ils sont extrêmement pauvres, soit parce qu'ils ne savent pas gérer rationnellement leurs ressources intérieures, soit enfin parce qu'une médiocre gestion de leur dette dans le passé leur a déjà créé de graves difficultés dans ce domaine, Si l'on veut éviter la nécessité de réaménager les conditions de remboursement de la dette de ces pays, il sera indispensable de leur fournir à des conditions favorables un fort volume d'aide extérieure et aussi qu'ils administrent leur économie dans de bonnes conditions. D'ailleurs, s'il fallait renégocier la dette il est probable que ce qu'il faudrait pour ces pays, c'est une dette consentie à long_terme et à des conditions très favorables. La troisième catégorie de pays en compte à peu près une douzaine mais qui représentent environ un quart de la dette totale des pays_en_voie_de_développement; ce sont pour la plupart des pays au PNB par habitant relativement élevé ou en voie de croissance rapide, et qui ont de bonnes perspectives d'exporter leurs produits. Pour eux, on peut penser que leur croissance_économique se fera assez rapidement sans leur poser de problèmes de la dette et sans qu'il soit besoin d'une aide à des conditions favorables, pourvu qu'ils continuent à appliquer une politique_économique satisfaisante et à bien gérer leur dette. Une autre caractéristique commune à tous ces pays est que les paiements au litre du service_de_la_dette drainent, et devraient continuer à drainer dans l'avenir à moyen terme, une bonne part de leurs recettes annuelles en devises. Dans la plupart de ces pays aussi la dette est dans une large proportion à échéance courte. C'est pourquoi ils sont vulnérables à des baisses inattendues de leurs avoirs en devises ou à de brusques augmentations des importations. C'est pourquoi il faut, que tous, dans l'élaboration de leur politique_économique, prêtent une attention particulière à leur dette extérieure. Cela ne veut pas dire pour autant que ces pays risquent d'avoir des difficultés de service_de_la_dette; selon toute probabilité, tel ne sera pas le cas pour la plupart d'entre eux. D'ailleurs, même si ces difficultés se produisent, elles seront sans doute passagères et ne porteront que sur une partie de la dette totale du pays. Dans certains cas, il suffira d'entamer bilatéralement une négociation visant à recapitaliser, ou réaménager dans le temps, les paiements au titre du service_de_la_dette. Comme leurs perspectives sont bonnes pour l'essentiel et que la proportion de leur dette extérieure à rembourser dans l'avenir immédiat est relativement élevée, l'aide qu'on pourrait leur apporter si cela est nécessaire, devrait surtout viser à répartir sur une période plus longue le remboursement de la dette.